Le ministre tunisien du Commerce a récemment décidé de geler les prix de neuf produits de grande consommation, une décision jugée "sage" par une majorité de Tunisiens qui souffrent d'une vie chère, un pouvoir d'achat aggravé et un rythme d'augmentation de prix en grande foulée dans les derniers mois.
En revanche, les analystes et économistes percevaient cette décision ministérielle d'"acte populiste" sans efficacité voire même une campagne électorale prématurée d'autant plus que son applicabilité demeure mise en question.
A partir du 22 avril 2013, les prix et la marge bénéficiaire de neuf produits de consommation de base ont été plafonnés à savoir les pommes de terres, les eaux minérales, les oeufs, les conserves de thon, les dérivés du lait, les dérivés du fromage, les produits détergents, les produits d'hygiène et les huiles végétales alimentaires non subventionnées.
Une majorité de chefs de familles croisés par le correspondant de l'Agence de presse Xinhua a estimé que la flambée des prix enregistrée dans les mois derniers sur le marché tunisien pourrait être atténuée suite à cette décision. "Il faut dire que ces produits objet d'ajustement de prix se veulent des denrées fondamentales consommées régulièrement pour ne pas dire quotidiennement notamment pendant le mois de Ramadan (mois saint pour les musulmans)", a confié à Xinhua Fathi godiche cadre en télécommunications.
Toutefois, cette révision des prix n'est autre qu'un coup populiste parmi une rotative électorale avant l'heure, comme avancé par certains économistes tunisiens intervenant dans la presse locale à cet effet. "Croire qu'on peut réduire l'inflation ou la stabiliser en manipulant les prix de 9 prix sur 1 000 produits composant le panier de la ménagère cela relève du populisme", a commenté l'économiste Zouheir El-Kadhi.
Intervenir sur uniquement neuf produits "se classe plutôt dans la propagande électorale, a-t-il soutenu révélant qu'environ 80% des produits sont libres et le reste est administré ou subventionné. Selon cet économiste, "l'inflation en Tunisie est essentiellement due à la hausse des salaires qui dépasse de loin ( actuellement) la productivité". Ainsi, force sera de "équilibrer ces deux composantes, chose qui n'est pas réalisable avant 2015" toujours d'après M. El-Kadhi.
Du côté du degré d'applicabilité de l'ajustement des prix de neuf produits, les statisticiens tunisiens ont abouti au même constat: "Les neufs produits concernés par cette décision sont des prix libres sur lesquels l'Etat n'a aucun contrôle contrairement aux produits subventionnés dont les carburants", s'est exprimé Mustapha Bouzayane de l'Institut national de Statistiques (INS) de Tunisie.
M. Bouzayane s'est interrogé dans une intervention au quotidien tunisien La Presse de ce mercredi sur la garantie quant au respect de tous les intervenants sur le marché tunisien de cette décision ministérielle. Ainsi, cet ajustement risque de nourrir la spéculation outre ses aspects "dérisoire" et " contreproductif", pour reprendre l'expression de M. Bouzayane.
Parallèlement aux critiques présentées suite à cette décision, l'Organisation de Défense du Consommateur (ODC) de Tunisie a indiqué que les neuf produits objet de révision des prix se trouvent désormais parmi une liste établie par l'ODC comportant un total de 20 produits. Le ministère du Commerce n'a finalement négocié que sur les 9 produits précités, a déclaré le vice- président de l'ODC Mohamed Zarouk.
D'après l'ODC, l'index de consommation familiale a été estimé en 2012 à 0,6% tandis qu'une hausse de 0,1% de ce taux est qualifié de catastrophique. Actuellement, il s'avère à l'ODC nécessaire d'engager des mesures coercitives afin de mettre un terme à de multiples dépassements qui affectent les équilibres socioéconomiques du pays. Il s'agit également de couper chemins aux spéculateurs, contrebandiers et les propriétaires des chambres frigorifiques. Par ailleurs, l'intégrité physique et morale des équipes de contrôles économique doit être assurée.