Réservoir du HIV-1, le virus du SIDA le plus répandu dans le monde contrairement au HIV-2 de l'Afrique de l'Ouest, l'Afrique centrale est de plus en plus alimentée en recherches sur le SIDA au rang desquelles des travaux menés sur les hypothèses de transmission des virus de petits singes à l'homme.
Au menu des 5e Journées scientifiques de l'Agence nationale de recherches sur le SIDA et les hépatites virales (ANRS, organisme français représenté par une antenne au Cameroun) tenues les 3 et 4 juin à Yaoundé, la réflexion sur la « diversité génétique et (le) suivi des infections lentivirales (SIVs) chez les primates non humains sauvages en Afrique subsaharienne » a été une occasion d'évaluation de travaux initiés au milieu des années 1990 au Cameroun, puis étendus récemment au Gabon et en République démocratique du Congo (RDC).
Initiative d'une équipe de chercheurs français et africains conduite par le Pr. Eric Laporte de l'Université de Montpellier, ces études s'intéressent précisément à l'« identification et (aux) prévalences des SIVs chez les primates non-humains sauvages afin d'estimer les risques de nouvelles transmissions inter-espèces et d'étudier plus en détails les réservoirs des ancêtres du HIV-1 chez les grands singes en Afrique centrale : bilan au Cameroun, bilan au Gabon ».
D'emblée, le Pr. Laporte insiste à lever les équivoques. « Il faut rassurer. C'est vrai que tous les petits singes sont porteurs de virus proches du virus du SIDA, mais suffisamment éloignés. Mais, comment on se peut se contaminer ? On peut se contaminer lorsqu'on va préparer la viande de brousse, c'est-à-dire quand on va se blesser. Donc, il faut du contact de sang à sang », a-t-il souligné à Xinhua.
Le HIV-1 et le HIV-2 sont les deux grands virus du SIDA connus à ce jour dans le monde. « Le 1 circule en Afrique de l'Ouest et le 2 en Afrique centrale et puis le un est devenu pandémique, partout dans le monde. Mais dans le un, il y a quatre groupes qui correspondent à quatre épisodes de transmission singe-homme », décrit le chercheur français.
En d'autres termes, précise-t-il, « il y a eu quatre épisodes dans l'histoire qui ont donné l'épidémie. Mais seulement quatre épisodes qui ont marché, pour lesquels il y a eu l'incendie, pour lesquels on n'était pas sûr si c'est le chimpanzé ou le gorille ».
La recherche sur ce virus a mis en exergue plusieurs groupes de dissémination. Le groupe majoritaire est simplement identifié par la lettre M. d'après le Pr. Eric Laporte, « c'est le premier qui est arrivé dans un milieu favorable, où il y avait des populations qui ont eu beaucoup de relations, qui se sont transmis le virus, que ça soit au Nord, ou au Sud, ou en Asie ».
C'est ce groupe qui, de l'avis des chercheurs, sévit à 98% au Cameroun, pays à épidémie généralisée avec une prévalence de 4,3% sur un population totale de plus de 20 millions d'habitants et 122. 783 malades sous traitement à antirétroviraux (ARV) sur 267.075 personnes éligibles et un total de plus de 570.000 personnes infectées.
En revanche, les groupes O et N sont qualifiés de plus rares et très peu diffusés.
Le Pr. Laporte insiste aussi de « faire la grande différence entre l'origine du virus – une fois, ça a marché – et l'origine de l'épidémie. Il y a une image qui dit : beaucoup d'étincelles, mais un seul incendie. De temps en temps, il y a un contact singe-homme et il n'y a pas de transmission et une fois de temps en temps il y a un incendie, c'est-à-dire qu'il y a des transmissions et une chaîne de contacts ».
« L'épidémie, c'est la transmission sexuelle, c'est la transfusion sanguine, etc. Bien sûr, ce n'est pas les singes », martèle-t-il écartant la certitude de la transmission des virus de petits singes à l'homme. « Ce sont des hypothèses pour essayer de comprendre et de prévenir. Pour rassurer les populations, il n'y a pas de risques prouvés de transmission de ces virus de petits signes à l'homme », poursuit-il.
Aucune équivoque cependant concernant l'origine du virus du SIDA, car « on sait que certaines espèces de chimpanzés ou de gorilles en Afrique centrale sont porteurs de l'ancêtre, mais il a fallu un seul épisode qui ensuite est allé dans un milieu urbain, etc. pour donner l'épidémie ».
Le sujet fait couler beaucoup d'encre et de salive. Il n'épargne pas des chercheurs africains, en particulier camerounais, dans la recherche de nouvelles pistes pour comprendre la propagation continue du VIH.
C'est une recherche fondamentale qui, à l'occasion des 5e Journées scientifiques de l'ANRS, a réuni à Yaoundé des chercheurs venus de France, du Cameroun, de la République centrafricaine (RCA) , du Burkina Faso, du Sénégal, de Côte d'Ivoire, d'Afrique du Sud, d'Egypte, du Cambodge, du Vietnam et du Brésil pour un échange d'expériences et un partage de connaissances.
Pour le ministre camerounais de la Santé publique, André Mama Fouda, l'enjeu de telles assises consiste à faire avancer les progrès dans l'amélioration de la santé des populations. « Ces études qui seront disséminées nous permettent de mieux prendre en charge nos malades souffrant du VIH et des hépatites », a-t-il déclaré à l'ouverture du colloque lundi.
En plus des 4,3% pour le VIH-SIDA, le Cameroun enregistre en outre entre 10 et 12% de prévalence pur les hépatites B et C.