Le dragon, qui est en Chine symbole du pouvoir impérial et de la fortune, a depuis toujours un caractère masculin. Il est aujourd'hui - et pour la première fois - associé aux femmes par la couturière Guo Pei. « Maintenant que le pouvoir impérial a disparu, le dragon a perdu son caractère sexué et ne représente plus que la perfection et la puissance. Les femmes modernes, malgré leur apparence de faiblesse, ont une grande force intérieure et sont exigeantes envers elles-mêmes. Elles ont l'esprit entreprenant, sont indépendantes et se respectent. Puisqu'elles sont en tous points égales aux hommes, elles incarnent aussi le dragon », explique doucement Guo Pei, une jolie femme vêtue avec goût. « Chaque femme porte dans son cœur un dragon, qui est soit elle-même, soit celui qu'elle attend. »
Sans doute Guo Pei reste-elle inconnue du grand public, mais dans les milieux de la mode - chinois comme internationaux - elle exerce une forte influence. En mai 2012, elle a, pour la quatrième fois en 26 ans de carrière, présenté ses créations de haute couture. Placé sous le thème « Les mariées chinoises et l'histoire du dragon », le défilé a attiré de nombreuses personnalités de la mode et du spectacle. « En tant que doyenne de la haute couture en Chine, Guo Pei dicte les normes et le style de la haute couture chinoise », commente le rédacteur en chef d'un magazine de mode. Avec ce défilé, Guo Pei espère amener les jeunes Chinoises à apprécier les robes de mariée de style local.
Du cousu main
La collection présentée par Guo Pei comprenait une robe de mariée portée par un mannequin qui évoluait sur scène comme une ballerine. Très remarquée avec son corsage doré, cette robe de mousseline rouge vif à la longue traîne s'inspirait de la riche tradition chinoise.
Une autre, courte cette fois, relevait d'un mélange d'avant-garde et de traditionnel, d'oriental et d'occidental : les manches et les côtés de la ceinture décorés de plis proéminents rappelant l'épine dorsale du dragon ; des caractères (double bonheur) en rouge sur le devant ; une mantille dorée somptueuse.
Guo Pei dit avoir mis à contribution toute l'expérience acquise en 26 ans de carrière dans cette collection de cinquante robes de mariée, dans le but avoué d'en faire les « plus belles de toutes les robes de mariée ».
Elle a sélectionné des tissus de partout dans le monde et s'est inspirée pour sa collection des techniques européennes, indiennes et japonaises. « Le fil que nous utilisons est lui aussi particulier. C'est une fibre importée du Japon, qui étincelle à la lumière. »
Elle a coopéré pour la première fois avec un maître joaillier pour créer une robe de mariée ultra-luxueuse, avec plus de 400 000 perles originales. Beaucoup de gens sont curieux de sa valeur. Guo Pei esquive la question, en disant : « Le prix ne m'intéresse pas. Pour moi, elle est inestimable. Au début, parce que nous maîtrisions mal la technologie, nous avons détruit beaucoup de ces perles grosses comme des grains de millet en cherchant à les perforer - jusqu'à trois perles perdues pour chacune qui était réussie. Avec le temps, nous avons fini par réapprendre cette technique de broderie des "perles de millet", oubliée depuis longtemps. Je ne saurais vraiment pas comment mesurer sa valeur. »