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ZOOM AFRIQUE : L'Afrique à la recherche de solutions africaines en RDC pour éviter une spirale de chaos
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Des soldats de la paix de l'ONU en patrouille à Goma, dans la province du Nord-Kivu, dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC), le 25 janvier 2025. (Xinhua/Zanem Nety Zaidi) |
Alors que le conflit dans l'est de la République démocratique du Congo (RDC) risque de s'intensifier, comme s'alarment certains analystes, les blocs régionaux africains poursuivent leurs efforts visant à trouver des solutions africaines en dépit des revers déjà connus.
UNE REBELLION QUI CONSOMME DES TERRES
"Nous sommes venus à Goma pour vous libérer." Jeudi dernier dans le stade de l'Unité à Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, la foule se balançait, épaule contre épaule, lors d'un rassemblement organisé par la rébellion du Mouvement du 23 mars (M23) qui a dit avoir pris le contrôle de la ville depuis le 26 janvier.
Après avoir refait surface fin 2021, le M23 a pris le contrôle de nombreux territoires dans l'est de la RDC outre Goma, en particulier la cité commerciale de Bunagana, à la frontière avec l'Ouganda, et la cité minière de Rubaya, connue mondialement pour ses riches gisements de coltan.
Le dernier rapport du groupe d'experts de l'ONU indique que des administrations parallèles ont été mises en place dans différentes zones capturées par la rébellion. Celle-ci se dirige également vers le sud de la province du Sud-Kivu et aurait récemment pris le contrôle de la ville de Nyabibwe, à moins de 100 km de la capitale provinciale Bukavu.
HERITAGE DE LA DOMINATION COLONIALE OCCIDENTALE
Le conflit entre le M23 et le gouvernement congolais est profondément lié aux conséquences du génocide rwandais de 1994 et aux tensions ethniques persistantes, notamment entre les populations tutsie et hutue. La RDC accuse le Rwanda de soutenir le M23, tandis que le Rwanda affirme que l'armée congolaise s'est alliée au groupe rebelle rwandais des Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR), accusé d'être impliqué dans le génocide de 1994 contre l'ethnie tutsie.
La domination coloniale occidentale a souvent déclenché des conflits meurtriers dans la région au cours des dernières décennies. Les puissances coloniales ont tracé des frontières en fonction de leurs propres intérêts, sans tenir compte de la répartition des groupes ethniques. Elles ont également adopté une politique consistant à "diviser pour mieux régner", favorisant certains groupes par rapport à d'autres et attisant des tensions ethniques qui persistent encore aujourd'hui.
En 2004, des soldats tutsis au sein des forces gouvernementales de la RDC, qui se sentaient marginalisés, ont formé la milice anti-gouvernementale appelée le Congrès national pour la défense du peuple (CNDP). En 2009, la milice a signé un accord de paix avec le gouvernement de la RDC et a été intégrée à l'armée nationale.
En 2012, après avoir perçu un manque d'engagement envers l'accord de paix, une faction du CNDP a fait défection et a formé le M23. L'objectif déclaré du M23 était de protéger la population tutsie et de lutter pour ses droits. La même année, le groupe a pris Goma, mais s'est retiré après une médiation des pays de la région.
VERS UNE SPIRALE DE TENSIONS DANS LA REGION
"Si cela continue ainsi, la guerre risque de se généraliser dans la région", a averti le président burundais Evariste Ndayishimiye début février.
La chute de Goma "a poussé des milliers de personnes à quitter leur foyer et, une fois de plus, a laissé la région des Grands Lacs au bord d'une guerre plus vaste", a déclaré dans un rapport publié en janvier l'International Crisis Group (ICG), une organisation non gouvernementale analysant les conflits à l'échelle mondiale.
L'est de la RDC, riche en minéraux, reste un facteur clé de conflit tant que des parties se disputent le contrôle des ressources, notamment le coltan, l'étain, le tantale et l'or.
"Ce n'est pas le Burundi seulement, la Tanzanie, l'Ouganda, le Kenya, c'est toute la région, c'est une menace", a souligné M. Ndayishimiye dans une vidéo officielle publiée sur YouTube, faisant référence à ses inquiétudes concernant une guerre régionale.
SOLUTIONS AFRICAINES
Un "sommet historique", organisé conjointement par la Communauté de l'Afrique de l'Est (CAE) et la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), deux grands blocs régionaux, s'est tenu samedi dernier dans la ville portuaire tanzanienne de Dar es-Salaam pour faire face à l'escalade de la crise dans l'est de la RDC. Le président rwandais Paul Kagame et son homologue congolais Félix Tshisekedi ont tous deux assisté à la réunion.
Des pays extérieurs à la région ont proposé leur médiation, mais la RDC a tout de même insisté en faveur de solutions africaines.
Dans le communiqué publié à l'issue du sommet, les pays de la région ont proposé de fusionner le processus de Nairobi avec le processus de Luanda, un mécanisme de paix parallèle lancé par l'Union africaine (UA) et négocié par le président angolais João Lourenco.
Pour soutenir le processus fusionné dit "Luanda/Nairobi", les dirigeants régionaux ont suggéré de nommer des facilitateurs supplémentaires, dont des représentants d'autres régions d'Afrique, selon le communiqué.
Reconnaissant l'urgence de la situation, les dirigeants présents au sommet ont demandé aux chefs des forces de défense de la CAE et de la SADC de se réunir cinq jours plus tard pour élaborer des mesures techniques visant à faire respecter un cessez-le-feu immédiat et inconditionnel.
Les dirigeants ont appelé à la réouverture des voies de circulation pour rétablir les voies d'approvisionnement humanitaire, en particulier la route reliant Goma à Bukavu, qui a été coupée par l'avancée de la rébellion du M23, et l'aéroport international de Goma, qui a été gravement vandalisé pendant les hostilités.
Le communiqué réitère la demande de retrait des "forces armées étrangères non invitées" du territoire de la RDC, les dirigeants mettant l'accent sur le respect de la souveraineté et de l'intégrité territoriale du pays.
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Le personnel de santé transfère les corps des victimes à Goma, en République démocratique du Congo (RDC), le 5 février 2025. (Xinhua/Zanem Nety Zaidi) |
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Photo prise le 30 janvier 2025 montrant le centre-ville de Goma, dans la province du Nord-Kivu, en République démocratique du Congo (RDC). (Xinhua/Alain Uaykani) |