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Colère des agriculteurs : une mobilisation dirigée en France contre la fiscalité lourde et les règles de l'UE

Xinhua 01.02.2024 08h09

Depuis le 18 janvier, les agriculteurs français ont manifesté contre la baisse de leurs revenus, les charges élevées, la complexité réglementaire, la fiscalité, les contrôles administratifs ainsi que la concurrence inéquitable due aux accords de libre-échange entre l'UE et d'autres pays. Malgré les annonces du gouvernement, la mobilisation ne faiblit pas, les blocages des routes continuent, les manifestants se rapprochent de Paris.

La contestation des agriculteurs a démarré fin 2023 dans la région Occitanie, dans le sillage des manifestations que plusieurs pays européens, dont l'Allemagne, la Pologne, la Roumanie, l'Italie et l'Espagne, ont connues. Mobilisés par des syndicats tels que la FNSEA, Jeunes agriculteurs, les agriculteurs venus de toute la France ont manifesté devant des préfectures et bloqué des routes et des autoroutes, appelant à un siège de Paris.

Ils ont entamé, ce mercredi 31 janvier, leur troisième jour de blocage d'axes stratégiques autour de Paris. Des blindés de la gendarmerie ont été déployés mardi soir sur l'autoroute A6, à quelques kilomètres du Marché de Rungis, principale source d'approvisionnement en produits frais pour 18 millions de Franciliens. Le ministre français de l'Intérieur Gérald Darmanin a évoqué "plus de 100 points de blocage" et 10.000 manifestants dans toute la France, contre près de 120 points de blocage, 12.000 agriculteurs mobilisés et plus de 6.000 tracteurs, recensés par les services du renseignement territorial.

Le convoi de 200 à 300 tracteurs en route vers Rungis a fait une pause dans le Loir-et-Cher durant la nuit de mardi à mercredi. Ce mouvement rencontre une certaine popularité dans le pays, puisque les habitants des villages traversés sont sortis en nombre pour les saluer, applaudissant leur passage en brandissant des drapeaux français.

LES ACCORDS DE LIBRE-ECHANGE NEGOCIES PAR L'UE EN CAUSE

Les causes des manifestations sont nombreuses. Parmi elles, on trouve l'accord commercial en cours de négociation depuis vingt-cinq ans entre l'UE et le Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay, Uruguay), qui suscite la colère des agriculteurs français et européens.

L'objectif de l'accord est de supprimer 90% des droits de douane sur une période de dix ans. Les pays latino-américains pourraient exporter vers l'Europe 99.000 tonnes de viande bovine bénéficiant de droits de douane à 7,5%, et obtiendraient des quotas supplémentaires de 180.000 tonnes de sucre et de 100.000 tonnes de volailles respectant des normes bien inférieures aux normes européennes, et donc au prix bien plus compétitif. Malgré l'opposition exprimée par le président français, la Commission européenne a reconnu que les conditions n'étaient pas réunies pour conclure les négociations, tout en poursuivant les pourparlers à Bruxelles entre les 27 membres de l'UE et le bloc latino-américain, comprenant l'Argentine, le Brésil, l'Uruguay, le Paraguay, et bientôt la Bolivie.

Les agriculteurs réclament en sus la fin de la lourdeur administrative, le niveau de fiscalité, une juste rémunération de leur travail et pas forcément des aides - sur les 27,3 milliards d'euros que la France verse au budget européen, 18 milliards lui sont rendus, PAC (Politique agricole commune) comprise. Critiquées également, les centrales de la grande distribution, qui négocieraient trop à la baisse la rémunération des agriculteurs qui appellent à les bloquer.

DES MESURES GOUVERNEMENTALES QUI PEINENT A CONVAINCRE

Lors de son discours de politique générale devant l'Assemblée nationale le 30 janvier, le Premier ministre français Gabriel Attal a assuré qu'il devait y "avoir une exception agricole française" et promis que le gouvernement serait "au rendez-vous, sans aucune ambiguïté" pour répondre à la crise agricole. Il a promis que les aides européennes de la Politique agricole commune (PAC) seraient versées d'ici le 15 mars et que des aides fiscales supplémentaires seraient destinées aux éleveurs.

Le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau a quant à lui annoncé que le gouvernement mettait 80 millions d'euros d'aide supplémentaires pour les viticulteurs et qu'il prendrait en charge "les intérêts d'emprunt sur l'année 2024" pour soulager la trésorerie des vignerons en difficulté.

Mais ces différentes mesures gouvernementales n'ont pas fait cesser le mouvement, qui se poursuit en France. Un sommet européen extraordinaire aura lieu jeudi 1er février à Bruxelles, au cours duquel la crise agricole devrait être évoquée.

(Web editor: 孙鸿宇, Yishuang Liu)

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