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A Beijing, un architecte américain construit ses rêves sous la Grande Muraille
Marcher le long de la Grande Muraille est pour beaucoup un rêve unique, mais Jim Spear est allé encore plus loin en passant les 18 dernières années dans un village situé sous cette merveille antique. « Quand j'étais enfant, je ne connaissais pas grand-chose de la Chine, mais je savais qu'il y avait une Grande Muraille », a expliqué cet architecte autodidacte américain de 68 ans. « Je n'aurais jamais rêvé à l'époque que j'aurais la chance de le visiter, et encore moins d'y vivre ».
L'un des symboles de la Chine, la Grande Muraille est en réalité une série de murs interconnectés qui s'étendent sur un total de 21 000 kilomètres, dont certains ont 2 000 ans. Elle a été inscrite au patrimoine mondial de l'UNESCO en 1987, un an après que Jim Spear a pris la décision la plus importante de sa vie et s'est installé en Chine.
L'usine transformée en hôtel conçu par Jim Spear dans la banlieue de Beijing accueille ses clients début novembre. (Photo / Xinhua)
Aujourd'hui, avec sa femme Tang Liang, il habite dans le village de Mutianyu. Dans cet endroit calme, situé au pied du tronçon Mutianyu de la Grande Muraille, à environ 80 km de Beijing, ils vivent avec leur chien dans une maison avec cour-jardin qu'ils ont eux-mêmes rénovée et qui comprend un studio de design.
L'intérêt de Jim Spear pour la Chine a commencé à l'université lorsqu'il a suivi un cours dispensé par un spécialiste chinois. Sa fascination s'est approfondie lorsqu'il a rencontré sa future épouse en 1980 et l'a épousée deux ans plus tard.
En 1986, il a décidé d'abandonner ses études de doctorat en politique chinoise à l'Université de Californie à Berkeley et de s'installer en Chine pour aller au cœur des choses. « J'ai réalisé que si je devenais un spécialiste de la Chine basé à l'étranger, je ne pourrais pas vivre l'expérience de ce qui se passait en Chine », dit-il.
Il se souvient encore très bien du moment où il est descendu de l'avion et a ressenti un lien instantané avec l'endroit qu'il avait envie de visiter. « Le pays était sauvage, peuplé de gens de toutes sortes », dit-il. « C'était très dynamique ». Il dit que c'est le destin qui l'a poussé à s'installer sous la Grande Muraille. Dans les années 1990, sa femme et lui ont découvert leur future maison à Mutianyu après une rencontre fortuite avec Li Fengquan, qui tentait de lui vendre un T-shirt.
« Je suis désolé. Je n'ai pas envie d'acheter un souvenir aujourd'hui, mais je dois vous dire que je vous envie de vivre dans un si bel endroit près de la Grande Muraille », s'est souvenu Jim Spear quand il a répondu à Li Fengquan.
Jim Spear, qui a quitté les États-Unis pour Beijing il y a 37 ans, pose dans le village de Mutianyu. (Photo / Xinhua)
« Je vais t'aider », a répondu celui qui deviendra plus tard un ami pour la vie. Et de fait, en quelques jours, Li Fengquan avait aidé le couple à obtenir un bail à long terme pour une ferme de village traditionnelle et un terrain voisin à Mutianyu.
Pendant près de 10 ans, Jim Spear et Tang Liang ont passé leurs week-ends dans cet endroit idyllique avant de décider d'en faire leur résidence à temps plein en 2005.
En tant qu'architecte, Spear a utilisé son expertise pour rénover la maison de ses rêves, qui offre de multiples vues sur la Grande Muraille.
« Dans la brume, le brouillard ou les nuages, c'est toujours beau », dit Spear. « Voir la Grande Muraille tous les jours me rappelle à quel point les gens d'ici peuvent être formidables ; lorsqu'ils sont organisés et lorsqu'ils ont un objectif commun, de grandes choses peuvent être accomplies. »
Jim Spear est plus communément connu localement sous son nom chinois Sa Yang. Il a souligné que « Yang » signifie «océan» et symbolise son caractère large d'esprit. Mais la vie au village peut être difficile et pour les plus de 500 habitants de Mutianyu, il était doublement étranger : à la fois Américain et citadin.
« Mon point de départ est que je respecte les gens qui vivent dans le village qui m'entoure », a-t-il dit.
Peu de temps après avoir embrassé la vie de village à plein temps, Jim Spear a été approché par le chef du village, Li Lianting, qui lui a expliqué que Mutianyu perdait rapidement des habitants et avait cruellement besoin d'entreprises locales. Cela a motivé l'architecte à explorer les moyens de soutenir les résidents ruraux.
Après avoir étudié la question, il a loué une école abandonnée et l'a transformée en restaurant et en usine d'art du verre pour la rendre durable. Il a également rénové une ancienne usine de tuiles à Beigou, le village voisin de Mutianyu, et l'a transformée en hôtel Brickyard.
En reconnaissance de ses contributions, Jim Spear a reçu le Prix de l'Amitié de la Grande Muraille du gouvernement de Beijing en 2014.
Incorporant des poutres apparentes, des matériaux d'origine locale comme des carreaux vernissés, des antiquités élégamment disposées, des salles de bains et des cuisines modernes, le design de Jim Spear reflète un talent pour fusionner des éléments traditionnels et modernes.
Li Lianting affirme que l'architecte a contribué à la rénovation d'une vingtaine de maisons à Mutianyu, dont certaines fonctionnent désormais comme des hôtels ou des restaurants, tout en faisant de son mieux pour préserver autant que possible les structures d'origine.
Toutefois, l'approche de Jim Spear à l'égard de son travail est loin d'être simple, car il a consacré beaucoup de temps à l'étude de l'architecture traditionnelle chinoise. Il a exploré le travail d'architectes de renom comme Liang Sicheng et s'est même plongé dans le feng shui, l'étude chinoise des présages géomantiques utilisée pour déterminer l'emplacement et l'orientation propices des bâtiments et des pièces.
« La Grande Muraille m'inspire encore aujourd'hui à bien des égards », répond-il lorsqu'on lui demande si son travail architectural s'inspire de cette imposante structure. Cependant, il souligne qu'adopter le style de la Grande Muraille ne signifie pas construire des fortifications, mais plutôt que son approche implique des conceptions qui font écho au monument, mais ne le copient pas.
Jim Spear voit de nombreuses opportunités en Chine, portées par une demande intérieure importante et un accent croissant accordé à la préservation des structures historiques. « Une partie de mon cœur est aux États-Unis et le sera toujours. Mais j'aime vivre ici. J'aime la Chine », a-t-il conclu.