Une série d'articles de Sonia Bressler sur l'art et la culture chinoise. Sonia Bressler est docteur en philosophie et épistémologie, ses recherches sur le langage l'ont conduite après l'obtention de son doctorat à prendre un train pour la Chine. De ce périple en mai 2005 est né non seulement un premier récit Paris-Moscou-Pékin mais également son amour de la Chine.
Découvrez ses textes :
L'art brut des pêcheurs de Chine http://french.peopledaily.com.cn/Culture/n/2015/0313/c31358-8862482.html
Pérégrinations en Chine http://french.peopledaily.com.cn/Culture/n/2015/0213/c31358-8850710.html
En pleine pollution, je rêve de verdure, de paysages lointains. Sans doute est-ce pour cette raison que je me suis plongée avec délices dans le livre Peintres paysans chinois. Ce livre est plein de surprises. Dès les premiers mots de l'introduction de Chi Shahong, nous sommes prévenus : « les peintures folkloriques contemporaines réalisées par des peintres paysans portent en elles l'odeur de la terre, une vision de l'art simple, et la volonté de diffuser les traditions de la culture populaire ».
Et c'est ce que l'on voit dès la première œuvre intitulée Exploitation de la montagne Xinbao de Miaolan Gao. Nous y voyons des femmes et des hommes, chacun est occupé à une tâche précise. Les hommes cassent les pierres, un peu plus haut, deux femmes cassent aussi le sol, un groupe de femmes mettent la récolte dans des paniers. Elles semblent rire et se raconter des histoires de montagne, une petite fille se joue de ce temps partagé. Tout le tableau est tenu par une autre femme qui conduit un tracteur. Les maisons, les arbres, les humains tout semble uni dans un sourire du travail partagé. Les couleurs sont celles d'un printemps, d'une nature verdoyante.
Il faut lire avec une grande attention la préface de Chi Shahong, elle y explique avec bonheur l'activité créatrice du monde rural. Elle explique qu'après « la révolution de 1949, le gouvernement de la République populaire de Chine a demandé à tous les échelons gouvernementaux « d'aider les paysans à développer leurs activités de loisir ». » Si au début il semble que ces activités avaient pour objectif d'alphabétiser la population et également de faciliter la propagande politique, elles sont devenues le lieu du développement d'un art très contemporain. Le tableau la Mélodie du printemps de Fang Qankui est une œuvre merveilleuse. Les oiseaux et les vaches ont des proportions célestes, les arbres se jouent de métaphores.
L'art ici n'est pas conçu comme un phénomène de mode. Très vite, la population s'en ai saisit pour évoquer son histoire, faire connaître ses traditions et les transmettre de génération en génération. Un art qui se joue donc des saisons et des galeries. Les peintures ont ici le goût de la terre, la saveur de la brume sur les récoltes. Elles narrent la danse des dragons, la peur des légendes et les espoirs célestes de ceux qui nourrissent la région et le pays. Les couleurs des toiles virevoltent avec le vent, se jouent du soleil, le riz parsème ses grains. On constate les valeurs de cette région : l'amitié, la solidarité, le bien vivre ensemble. Chaque toile est un régal, un plaisir des yeux qui se déguste et se savoure comme autant de plats de cette région. Je terminerai cette chronique sur la toile surprenante intitulée « le lancer de filets de Xu Lu. C'est une photographie autant qu'une photogravure, autant qu'une toile. La mer, les humains, les poissons, les filets, tout est à la même dimension, tout a son importance. Tout est uni dans le temps et l'espace. Le bleu et le blanc sont les deux seules couleurs. Une union naturelle qui souligne l'harmonie possible de l'humanité. Un clin d'œil à la vie humaine : une écume éternelle en mouvement perpéptuel.
Image : La peinture paysanne du zhejiang, coll. « art contemporain chinois » - Editeur : Horizon Oriental - ISBN10 : 2364770122 – janvier 2014
(Rédacteurs :何蒨, Français)