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Pendant 20 ans, un homme de théâtre français fait de la scène un pont culturel sino-français
Patrick Sommier, homme de théâtre français, veut faire comprendre au public en France ce qu'est réellement l'opéra chinois, qui, selon lui, est une assemblée de tous les arts : la musique chantée, le théâtre, les récits...
Né en 1949, ce metteur en scène est devenu un grand passionné de l'opéra chinois lors de son premier voyage en Chine il y a vingt ans. En 2004, dans le cadre des Années croisées Chine-France, il a été invité dans la capitale chinoise à bâtir un projet avec l'Ecole d'opéra de Beijing, pour mettre en scène en France plusieurs représentations de l'opéra de Beijing, un genre théâtral chinois né vers 1800.
"Quand je suis arrivé en Chine, j'avais, comme beaucoup de monde en Europe, plein de clichés sur l'opéra chinois dans la tête : des costumes magnifiques, des maquillages multicolores, des acrobaties extraordinaires, etc", s'est rappelé M. Sommier de ses premiers jours à Beijing lors d'une récente interview accordée à Xinhua. "Mais très vite, j'ai été complètement séduit".
Dans les cours de l'Ecole d'opéra de Beijing, M. Sommier a découvert pour la première fois la vigueur de l'acteur derrière ses maquillages et costumes, et les personnages d'une force incroyable issus des grands romans classiques chinois qui font penser à la tragédie grecque. Surtout, il s'émerveillait du jeune âge des élèves et du processus de transmission de maître à élève qui se fait sur la scène, ce qui diffère des traditions théâtrales françaises, selon le septuagénaire.
"En Chine, l'acteur est sur la scène pour la vie, il est l'incarnation du théâtre. C'est unique au monde", a salué M. Sommier à Xinhua. Pour le metteur en scène, présenter ce théâtre original à un public occidental ignorant la langue et la culture chinoise a représenté un véritable casse-tête.
En 2005, suivant les propositions de M. Sommier, l'équipe de l'Ecole d'opéra de Beijing a présenté en France des spectacles d'une façon innovante : une première partie sans costumes ni maquillages pour mettre en valeur le visage et les corps des professeurs et élèves ensemble sur scène ; une deuxième partie avec des acteurs maquillés, en costume. Au programme, des classiques comme "Adieu ma concubine".
Les spectacles ont attiré, selon le réalisateur, plus de 22.000 spectateurs, presque 7.000 élèves français ont participé aux ateliers organisés en même temps sur le maquillage et la gestuelle de l'opéra chinois.
En créant une continuité entre ce qui est visible sur scène et en coulisse, M. Sommier visait à "sortir le public de son regard touristique" vis-à-vis de l'opéra chinois, de crainte qu'il ne se penche que sur l'exotisme de cet art étranger.
"Le théâtre n'est pas un produit de consommation, mais une vraie rencontre culturelle et une démarche d'aller vers ce qu'on ne connaît pas", a-t-il martelé. "A part le plaisir, il faut inciter le public à faire un petit effort pour comprendre les choses qui lui sont étrangères".
C'est ainsi qu'en 2010, M. Sommier a poursuivi sa coopération avec ses partenaires chinois pour mettre en scène, de la même manière que la précédente, une nouvelle représentation, "Au bord de l'eau", une histoire qui s'inspire d'un roman classique chinois.
Ces dernières années, Patrick Sommier ne cesse de découvrir et de faire découvrir la grande variété de l'opéra chinois. Dans la ville de Quanzhou, de la province du Fujian (sud-est), il a été fasciné par l'opéra Liyuan, une forme locale de l'opéra chinois qui est qualifiée par M. Sommier de "meilleure qu'il a vue". En 2014, il a introduit l'opéra Liyuan en France avant de l'emmener dans d'autres pays européens.
L'année dernière, Patrick Sommier a publié son dernier livre français, qui porte un titre chinois, "Ximi", ou le passionné de théâtre en français, et qui consacre le plus grand chapitre à sa rencontre avec l'opéra chinois. Grâce à cette rencontre, ce Français se convertit en amateur de la culture chinoise, de la peinture aux romans classiques. Pour lui, il est inconcevable aujourd'hui de passer à côté de la culture chinoise.
"Les différences entre l'opéra chinois et le théâtre français sont des richesses, qui permettent d'enrichir le regard du public et ainsi d'enrichir l'image d'un pays", a souligné M. Sommier, déplorant que "l'image de la Chine soit sous-représentée dans le monde".
L'année 2024 marque le 60e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques entre la Chine et la France et l'Année sino-française du tourisme culturel, qui sera jalonnée d'événements culturels bilatéraux, dont des spectacles de théâtre.
Patrick Sommier, qui a travaillé pendant presque vingt ans comme passeur culturel entre les deux pays, espère que les Français et les Chinois pourront s'offrir des spectacles de grande qualité comme cadeaux pour impressionner le public de l'autre côté.