Shaanxi : à Weinan, des cyprès millénaires, transmettent la culture à travers les générations

Des cyprès anciens au temple de Cangjie, dans le comté de Baishui, à Weinan, dans la province du Shaanxi (nord-ouest de la Chine). (Photo / Peng Yipeng)

Entrez dans le temple de Cangjie, dans le comté de Baishui, à Weinan, dans la province du Shaanxi (nord-ouest de la Chine). Là, un cyprès imposant attire immédiatement l'attention. Son tronc est si large que cinq ou six personnes pourraient à peine l'encercler. Son écorce patinée est comme drapée de rubans, ses stries variées sont comme écrivant un enregistrement du temps.

Ce cyprès est celui qui fut planté par Cangjie, le légendaire créateur des caractères chinois. Mesurant 16 mètres de haut, pour un diamètre à hauteur de poitrine de 2,48 mètres et une circonférence au sol de 9,9 mètres, cet arbre a pris racine sur le plateau de Lœss il y a environ 5 000 ans.

Des cyprès anciens sont disséminés dans l'enceinte du temple, chacun portant un lourd poids historique. « On compte ici plus de 40 cyprès de plus de 1 000 ans, avec une moyenne d'âge d'environ 3 000 ans. Outre le cyprès de Cangjie, vieux de 5 000 ans, trois ont plus de 4 000 ans et 14 ont plus de 3 000 ans », a expliqué Liang Ni, guide touristique, désignant les géants un par un.

Selon la deuxième enquête nationale chinoise sur les arbres anciens et célèbres, le Shaanxi compte plus de 727 000 arbres de ce type, dont plus de 11 000 spécimens solitaires et 271 bosquets totalisant environ 716 000 arbres.

Sous la brise d'automne, les cyprès bruissent tels des conteurs d'histoires anciennes. La tradition veut que Cangjie ait servi d'historien pour l'ancêtre légendaire Huangdi, ou l'Empereur Jaune, et que, lorsque la technique des nœuds ne suffisait plus à répondre aux exigences de la complexité croissante des affaires, il ait créé les premiers caractères chinois. Ce cyprès aurait été planté de sa main. Aujourd'hui, les visiteurs s'arrêtent en dessous, caressent son écorce rugueuse, étudient son veinage caractéristique et s'émerveillent des millénaires qu'il incarne.

Pour préserver ces trésors, les autorités locales ont mis en place des mesures de protection complètes. En 2019, Weinan a adopté le Règlement sur la protection du tombeau et du temple de Cangjie, plaçant les cyprès du temple sous protection légale. Un règlement sur la protection des arbres anciens et célèbres a renforcé ces efforts de conservation.

La technologie offre des moyens plus intelligents de préserver les arbres. Un registre détaillé a été créé pour le cyprès planté par Cangjie, documentant son état physique, les mesures d'entretien et son environnement de croissance, et le connectant à une plateforme de suivi en temps réel partagée aux niveaux national, provincial, municipal et du comté. Un groupe d'experts reconnus en conservation des arbres anciens et des vestiges culturels effectue des contrôles réguliers, formant un modèle « un arbre, une équipe » combinant conseils d'experts, supervision du comté et gardiens responsables.

« Grâce à la surveillance numérique, nous pouvons suivre la croissance du cyprès en temps réel. Si nous constatons un jaunissement des feuilles ou une écorce anormale, l'équipe d'experts intervient rapidement pour diagnostiquer et mettre en œuvre des mesures de rajeunissement », a expliqué Li Min, directeur adjoint de l'Administration des vestiges culturels du temple de Cangjie.

Parallèlement à la préservation, des efforts sont également déployés pour transmettre le patrimoine culturel incarné par ces arbres anciens. Chaque année, à l'occasion de la Pluie de Grains, ou « Guyu » en chinois, terme solaire marquant la fin du printemps et coïncidant avec la Journée de la langue chinoise des Nations Unies, le temple accueille des événements culturels commémorant Cangjie. À l'ombre de cyprès centenaires, les jeunes visiteurs s'essayent à la gravure sur bois, observant les traits des caractères se dessiner du bout des doigts et s'imprégnant du charme de la tradition. Des salles d'exposition, ornées d'images, de textes et d'objets, invitent les visiteurs à découvrir les origines et l'évolution des caractères chinois tout en admirant les arbres.

Ce cyprès cinq fois millénaire relie le passé et l'avenir. Au printemps 2012, un jeune arbre a été découvert poussant sous le cyprès centenaire. « Cela prouve que le cyprès de Cangjie peut se reproduire naturellement à partir de ses graines. Treize ans plus tard, il est en pleine croissance », a déclaré Ren Zhigang, de l'administration du temple. « Constater une telle vigueur nous a incités à explorer la sélection spatiale afin d'étendre sa riche lignée génétique ».

Début 2020, les autorités locales se sont associées au centre de recherche en technologie et ingénierie de la sélection spatiale de la province du Shaanxi pour explorer la propagation spatiale. « La sélection spatiale offre une nouvelle voie technologique pour la conservation et la revitalisation des ressources génétiques du cyprès de Cangjie », a noté M. Ren. « La descendance pourrait être plus vigoureuse et plus résistante, ce qui est important pour la préservation de la variété ».

En mai de la même année, des graines récoltées sur le cyprès ancien ont été embarquées dans l'espace à bord d'une fusée Longue Marche. Aujourd'hui, à la base de sélection des cyprès de Cangjie, dans le comté de Baishui, des semis « sélectionnés dans l'espace » déploient de tendres pousses vertes. Certains ont déjà été transplantés au temple, perpétuant ainsi l'héritage génétique de leur ancêtre vieux de 5 000 ans.

(Par Zhang Danhua, journaliste au Quotidien du Peuple)