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L’évolution « verte » : la Chine va plus loin que l’Europe

Source: le Quotidien du Peuple en ligne  16.03.2015 09h46

Aux moments où les Deux Sessions approchent de la fin à Beijing, le Quotidien du Peuple en ligne a interviewé Nathalie Bastianelli. Bonne connaisseuse de l'Empire du milieu où elle a vécu, Nathalie a fondé Belong & Partners, une plateforme dédiée à la rencontre des entreprises occidentales et du monde émergent autour des enjeux du développement durable. 

Quotidien du Peuple en ligne : Comment considérez-vous le rôle des acteurs économiques occidentaux dans le contexte chinois en ce qui concerne le développement durable ?

Nathalie Bastianelli : Les entreprises étrangères basées en Chine comprennent qu'elles doivent s'engager encore plus du fait d'un contexte de pollution très critique. C'est très important qu'elles montrent leur engagement et qu'elles le partagent.

Quotidien du Peuple en ligne : comment percevez-vous le rôle du gouvernement dans la protection de l'environnement en Chine ?

Nathalie Bastianelli : La Chine est reconnue par un grand nombre d'experts internationaux comme le pays qui a la volonté de faire évoluer son modèle économique vers un modèle plus responsable et plus durable et qui investit le plus sur les solutions. En Chine, l'organisation centralisée du pouvoir fait que les gens sont habitués à ce que les problèmes soient gérés par le gouvernement. La solution vient du haut, il y a cependant une difficulté à la faire appliquer au niveau des provinces du fait d'une forte corruption. Mon message vient dire que le gouvernement fait bien sûr sa part mais que d'autres acteurs doivent également faire leur part, notamment les entreprises privées chinoises ou étrangères implantées ici, ainsi que les consommateurs chinois.

Quotidien du Peuple en ligne : alors quel est le rôle des acteurs non-officiels ?

Il y a une grande conscience de la population chinoise sur le contexte actuel : pour eux le changement climatique n'est pas une menace mais une réalité. Mais la plupart des Chinois n'ont pas encore conscience qu'ils peuvent aider à changer les choses.

L'idée de mon événement est d'expliquer aux entreprises et aux consommateurs chinois qu'on est tous acteur du changement. Le consommateur à son rôle à jouer en choisissant des marques plus « durables». Or, cette conscience n'est pas encore très développée en Chine même si des signes apparaissent. Par exemple, un responsable d'une marque de luxe française m'a confié que contrairement aux autres pays, les clients chinois du luxe commencent à poser des questions dans leurs magasins en Chine, un phénomène qui n'existait pas avant. Ils veulent savoir si les produits sont « durables », ils veulent plus d'informations et commencent à faire attention.

Quotidien du Peuple en ligne : quelle est la situation des marques organiques chinoises ?

Nathalie Bastianelli : Le problème en Chine, c'est que les Chinois n'ont pas confiance dans leurs propres produits organiques. Je connais une marque chinoise de produits d'hygiène (shampoing, produits pour la maison). Ce sont des produits 100% fabriqués en Chine et 100% organiques, or le producteur doit prétendre qu'ils sont « fabriqués en Australie » sur leur site et dans la communication pour les vendre ici. Les Chinois font confiance aux marques étrangères mais pas aux marques locales. C'est un vrai problème. Le gouvernement devrait aider ces entreprises-là, faciliter leur développement. Pour donner un exemple, on interdit depuis quelques mois à ces sociétés d'utiliser le terme « organique » car ce mot doit maintenant être réservé pour les produits alimentaires mais on ne leur apporte pas la solution sur comment communiquer sur leur mode de production durable.

Quotidien du Peuple en ligne : les médias jouent-ils un rôle important et comment pourraient-ils agir mieux ?

Nathalie Bastianelli : Quant au rôle des médias, ils devraient plus parler des solutions, et pas uniquement des problèmes. Quand je dis qu'on est tous acteurs de changement, les médias y prennent une part importante en communiquant plus sur le sujet pour dire qui est bien. Si les médias se mettent à communiquer sur toutes ces nouvelles initiatives responsables et durables, cela va aider à changer la conscience des consommateurs et des entrepreneurs, sinon tout le monde s'en moque. Comme en Chine il y a beaucoup de médias d'Etat, il faut que ces médias montrent les initiatives qui émergent dans leur pays et ailleurs, qu'ils doivent communiquer sur tous les nouveaux modèles économiques comme l'économie collaborative, de fonctionnalité, et aussi faire passer le message que les entreprises doivent faire mieux et aller plus loin, s'engager au-delà des rapports de responsabilité sociale des entreprises (RSE). Ces rapports, ce sont des obligations légales, ça ne suffit pas.

Quotidien du Peuple en ligne : comment voyez-vous l'état économique actuel de la Chine et son avenir ?

Nathalie Bastianelli : La croissance en Chine est en baisse depuis quelques années. J'y vois deux raisons principales : la Chine est encore basée sur un modèle d'exportation et les crises des pays occidentaux ont une répercussion immédiate sur la croissance chinoise. L'économie du pays ne reposant pas encore suffisamment sur son marché intérieur.

Par ailleurs, la Chine souhaite passer d'une économie des industries lourdes à une économie de services pour faire évoluer son modèle et le rendre plus qualitatif. Cela va contribuer à rendre sa croissance à venir plus équilibrée. Un officiel chinois lors d'un déplacement en France a ainsi évoqué : « l'Europe a réussi sa révolution industrielle, ces 30 dernières années nous nous sommes développés sur votre modèle et nous avons échoué, le prix à payer est trop cher au niveau environnemental et humain. Mais l'Europe est en train de rater sa révolution verte, et nous allons réussir la notre ». Intéressant de découvrir ce point de vue.

Quotidien du Peuple en ligne : qu'est-ce que vous allez faire pour mieux démontrer la performance d'un modèle économique durable en Chine ?

Nathalie Bastianelli : Ce qui me semble aujourd'hui indispensable, c'est de montrer qu'une entreprise durable est une entreprise rentable. Qu'il existe des solutions qui viennent de l'étranger ou de Chine, que tout le monde est acteur du changement, tout ne doit pas venir de l'Etat ! Les entreprises et les consommateurs doivent prendre leur part. Ce n'est pas encore acquis, d'autant que la confiance dans les marques chinoises reste faible. Ce sont d'ailleurs des problématiques qui seront traités lors du Forum Belong que j'organise à Pékin fin septembre 2015. L'idée est d'y mettre en lumière les entreprises leaders, européennes et chinoises sur ces sujets. A travers des outils inédits et créatifs, le Forum aspire à démontrer que la responsabilité des entreprises est non seulement un gage d'innovation et de qualité mais est aussi financièrement performante.

Bio de Nathalie Bastianelli : Après plus de 20 ans dans la communication, l'événementiel et le sponsoring pour le compte du groupe Havas, Nathalie Bastianelli décide de créer sa société en 2013. Belong & Partners est une plateforme française dédiée aux entreprises et marques durables implantées en Chine dont les trois pôles d'activité sont l'organisation de forums, le conseil et la mise en réseaux. Comme Nathalie Bastianelli connaît bien la Chine, c'est l'Empire du milieu qu'elle a choisi comme premier pays d'implantation de sa société. Mais la plateforme a vocation à se déployer dans d'autres pays émergents. Parallèlement Nathalie Bastianelli est Conseillère du Commerce Extérieur de la France depuis 2007. Elle intervient régulièrement sur la RSE et le développement durable en Chine au sein des entreprises. 

(Rédacteurs :何蒨, Yin GAO)

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