L'intervention armée de la France au Mali, largement approuvée par les Français, n'est pas sans rappeler pour certains les guerres menées par les Etats-Unis en Irak et en Afghanistan. Au-delà de la volonté d'éradiquer le terrorisme, une tâche sans doute sans fin, on peut se demander si la force seule pourra assurer la victoire sur ce fléau.
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Le Premier ministre britannique David Cameron, fort ébranlé par la tragique issue de la prise d'otages en Algérie, a fait part de son émotion, disant que la lutte contre l'intensification de la menace des militants islamistes en Afrique du Nord nécessiterait « des années, voire des décennies ».
En revanche, le président français François Hollande, semblant afficher un moral plus élevé, a lui déclaré, « Face aux terroristes, que pouvons-nous faire ? Les détruire ! ». Ce genre de paroles fortes, qu'il n'est pas le seul à avoir prononcé, n'est pas sans rappeler ce que George W. Bush avait dit en son temps.
Chacun se souvient du résultat et nous n'ignorons rien de ce qu'ont connu les Etats-Unis en Afghanistan et en Irak. Aujourd'hui, c'est au tour de l'Europe.
Conséquence directe de la prise d'otages en Algérie, la France a envoyé encore plus de troupes au Mali, avec pour objectif d'éradiquer les forces extrémistes islamistes avec le gouvernement local. Ce qui a conduit le porte-parole du groupe islamiste a dire que l'attaque contre le site gazier n'était qu'un début, et que la France devra payer le prix pour ses attaques contre les musulmans dans le Nord du Mali.
Aux yeux des Français, les paroles de François Hollande sont celles d'un dirigeant élu responsable. Mais, pour les extrémistes islamiques, ce que veulent faire les Français n'est pas autre chose qu'un acte d'agression tel qu'en ont commis autrefois les « croisés » et les sionistes.
Le chef actuel d'Al-Qaïda, Ayman al-Zawahiri a prévenu qu'il comptait entraîner des extrémistes détenant des passeports européens en Egypte et en Syrie, afin d'établir une organisation terroriste en Europe. Si à l'avenir il souhaite lancer des attaques terroristes en Europe, des combattants possédant le passeport de ces pays seront extrêmement précieux.
On se souvient du responsable des massacres de Toulouse de l'année dernière –un Français d'origine algérienne- qui avait dit espérer « voir la France capituler » et qu'il avait agi en représailles à la participation française à la guerre en Afghanistan et à l'interdiction faite aux femmes musulmanes porter le voile, et aussi pour venger les souffrances du peuple palestinien.
L'Europe a choisi d'ignorer tout cela, persistant toujours à croire que seul le recours à la force pourra éliminer les terroristes. Il semble que seule une intervention ne puisse lui apporter la tranquillité d'esprit. Les Américains ont connu les guerres en Irak et en Afghanistan, et la récolte en a été bien amère. Les médias craignent que le plus grand risque de la présence de forces militaires françaises au Mali, est que cela va faire du Mali un pôle de recrutement de djihadistes, un aimant qui va attirer des militants, amenant des extrémistes ayant la même foi à s'unir contre l'invasion d'une terre d'Islam par les "croisés" de l'Occident.
1 400 soldats français, placés sous le commandement direct du Président, on poussé vers le Nord pour continuer à s'acquitter de leur mission. Cependant, ce type de réponse risque fort d'aboutir à une autre réponse extrême : la guerre contre le terrorisme est une guerre sans fin, elle ne fera que créer des ennemis à l'infini.
L'élimination de Ben Laden fut une grande nouvelle, mais la joie a été de courte durée. Parce que depuis que Ben Laden a été qualifié de terroriste le plus dangereux du monde depuis, le monde a changé. Avant cela, Al-Qaïda pouvait sembler ne pas être aussi "organisée", aussi "forte". Mais la fragmentation d'Al-Qaïda a fait que son idéologie terroriste s'est répandue comme un cancer, touchant le Pakistan, le Yémen, la Somalie, la Syrie, l'Irak ...
Il faut bien comprendre que l'élimination de l'idéologie terroriste est plus difficile que l'élimination de personnes.
L'Occident avait pensé qu'avec le « printemps arabe », le monde arabe finirait par prendre un nouveau départ, que la guerre en Libye permettrait à certaines personnes de devenir plus mesurées, mais tout cela n'était qu'un rêve. Dans une certaine mesure, le chaos causé par l'intervention occidentale, a ouvert un marché au terrorisme.
Maintenant, c'est la guerre, mais cette guerre sera-t-elle victorieuse ? Dans le processus de libération d'otages, il est bien difficile de distinguer à l'œil nu qui est un otage et qui est un terroriste.
Le Quotidien du Peuple, Edition outre-mer (24 janvier 2013, édition 06)