Justin Lin Yifu, Président honoraire de l'Institut National de Recherche sur le Développement de la Peking University, ancien Vice-président et économiste en chef de la Banque mondiale estime que la croissance économique de la Chine va continuer à dépendre des investissements, et que l'innovation technologique et la construction d’infrastructures seront les deux composants moteurs des investissements. Selon lui, le besoin d'investissements doit s'appuyer davantage sur une politique budgétaire plutôt que sur une politique monétaire, et la consommation doit être le résultat de la croissance économique, et non pas un moyen d’encourager la croissance économique. L'essence même de la croissance économique réside dans l’amélioration permanente de la productivité du travail. Si on n’augmente pas la productivité du travail, l’augmentation de la consommation est comme une rivière sans source.
Après le début de la crise financière internationale, on a estimé, à l’étranger, que les investissements chinois étaient trop élevés et que la consommation était insuffisante, ce qui a conduit à un déséquilibre des paiements internationaux, déclenchant ainsi la crise financière mondiale. Cela a conduit de nombreux chercheurs chinois à penser que l'économie chinoise devrait être tirée par la consommation plutôt que par les investissements. M. Lin a un point de vue différent.
Il dit ainsi que « Je ne suis pas contre les dépenses. La consommation est très importante, mais la consommation doit être le résultat de la croissance économique, et non pas un moyen de promouvoir la croissance économique. A notre époque, la consommation est une nécessité, cependant, quand on a fini de consommer, il n’y a plus de consommation ; cela n'est pas viable. A notre époque, les investissements sont une nécessité ; dans la phase suivante, ils se transforment en productivité, génèrent des revenus qui soutiennent de nouvelles demandes, y compris la demande des consommateurs et la demande en investissements ».
Mettre trop l'accent sur la consommation, cela veut dire n’avoir fait aucune analyse des caractéristiques de notre situation actuelle. Aujourd’hui, les pays développés sont axés sur la consommation, la consommation y dépasse 70%, alors que nous investissons plus de 50%, comment la comparaison est-elle possible ? Si l’on accepte les théories de l'étranger, qui voudraient que la Chine s’oriente vers la consommation, cela reviendrait à pousser ouvertement la Chine dans la crise. Les pays qui sont actuellement en crise sont le plus souvent des pays qui ont connu une consommation excessive, mais en revanche on n’a jamais vu une crise provoquée par un excès d'investissement dans un pays. On l’a encore moins vu dans un processus de développement économique, comme le montrent les pays en crise, où l’on a vu l'avantage comparatif dépasser les investissements.
M. Lin a souligné que l'avenir de la croissance économique de la Chine restera lié aux investissements, et que l'innovation technologique et la construction d’infrastructures seront les deux forces motrices des investissements.
Les deux anciennes politiques fiscales proactives de la Chine consistaient à investir dans les transports ferroviaires à grande vitesse, les ports et aéroports, etc, alors que les infrastructures inter-villes restaient encore relativement faibles. En outre, s’agissant des infrastructures internes des villes, comme le métro, le traitement des eaux usées urbaines et la protection de l'environnement, encore relativement faibles, les investissements sont très élevés. Ces investissements permettront de faire naître des avantages économiques et sociaux considérables.
Sur le plan « logiciel », il y a à l’évidence un certain degré de distorsion entre les pays en développement et les pays en transition. Au fil du développement économique, nous devons constamment nous améliorer et nous perfectionner, ce qui explique pourquoi le Premier Ministre chinois Li Keqiang a souligné les nécessités de la réforme. La réforme est le plus gros bénéfice qui soit, car la réforme peut vraiment améliorer l'efficacité, et être un moteur pour la croissance économique de la Chine. Ces facteurs peuvent permettre d’assurer à la Chine la possibilité de maintenir une croissance de 8% au cours des 20 prochaines années. Mais que ce potentiel devienne réalité dépend de la poursuite des réformes.