Lors du sommet économique franco-africain qui s'est tenu le 4 décembre à Paris, le Président français François Hollande a mis l'accent sur le renforcement des liens économiques avec l'Afrique. En particulier, il a proposé que le volume de commerce entre la France et l'Afrique soit doublé. François Hollande a également annoncé la mise en place l'année prochaine d'une Fondation franco-africaine pour la croissance qui, par le biais d'échanges et de coopération entre les entreprises des deux côtés, permettra de stimuler leur vitalité, et cela comprend aussi la formation professionnelle et l'assistance technique.
Pourquoi la France doit-elle mettre davantage l'accent sur le renforcement des liens économiques avec l'Afrique ? Pour des raisons évidentes : alors que le continent connait une forte croissance économique, le commerce entre la France et l'Afrique est à la traîne par rapport aux autres pays émergents. Les chiffres sont parlants : le PIB de l'Afrique a augmenté de 3,5% en 2011, et en 2012 le taux de croissance annuel a atteint 6,6 %. Les prévisions des Nations Unies et de la Banque africaine de développement pour la croissance économique de l'Afrique sont respectivement de 4,8% et 5,3% en 2013 et 2014. Ces dix dernières années, l'Afrique est devenue plus stable, et les politiques macroéconomiques prudentes, l'amélioration des termes d'échange et de la coopération entre les pays émergents se sont montrés plutôt efficaces. Et surtout, s'agissant de la Chine, du Brésil et de l'Inde, les échanges économiques et commerciaux avec l'Afrique continuent de se renforcer. Aujourd'hui, la Chine est devenue le plus grand partenaire commercial de l'Afrique.
En revanche, ces dernières années, les échanges économiques et commerciaux entre la France et l'Afrique ont diminué. Selon les statistiques, en l'espace de 11 ans, de 2000 à 2011, la part de marché la France en Afrique subsaharienne a diminué de façon spectaculaire, passant de 10,1% à 4,7%. Face à une telle situation, le Gouvernement français ne peut naturellement manquer d'être inquiet. Chacun sait que, pour des raisons historiques, la plupart des pays de l'Afrique de l'Ouest sont de langue française. Les liens politiques et économiques de la France avec ces pays sont très étroits. Dans le même temps, la France avait également maintenu des échanges économiques et commerciaux avec de nombreux pays d'Afrique anglophone et lusophone. Mais aujourd'hui, ces relations se sont détendues, ce qui naturellement désole la France. Surtout quand on sait qu'une réduction des parts de marché a un impact direct sur les exportations françaises et l'emploi intérieur ; comment la France pourrait ne pas se sentir inquiète ? Elle va donc devoir également se battre avec acharnement pour essayer de regagner le terrain perdu.
En outre, la France n'est pas encore complètement sortie de la crise économique qui pèse sur elle. Augmenter ses exportations vers les pays africains pourrait l'aider à renflouer son économie affaiblie plus rapidement. François Hollande souhaite avec impatience que dans les cinq prochaines années, les exportations françaises vers l'Afrique puissent doubler, ce qui pourrait créer 200 000 emplois en France.
Du point de vue des échanges économiques et commerciaux franco-africains, la France a adopté une position passive, ce qui est lié avec le fait que la France a, ces dernières années, ignoré le rôle de l'Afrique. A l'époque où Nicolas Sarkozy était au pouvoir, il a aboli la cellule spécialisée en charge de l'Afrique au Palais de l'Elysée. Et après son arrivée à la tête du pays, François Hollande a encore davantage laissé la gestion des affaires africaines au Ministère des Affaires étrangères. C'est seulement après que la guerre contre le terrorisme ait commencé au Mali que le Président Hollande a recommencé à s'intéresser un peu plus aux affaires africaines. Mais il était trop tard. En outre, la France a toujours aimé lier son aide à l'Afrique à des conditions politiques, se plaisant à gesticuler et réprimander certains pays qui soi-disant « ne respectent pas la démocratie et les droits de l'homme », ce qui a pour conséquence de mettre de la distance entre la France et certains pays, affectant la coopération bilatérale dans les domaines économique et commercial.
Le fait que la France admire l'Afrique, qu'elle désire renforcer les échanges économiques et commerciaux avec elle, ne saurait être considéré comme une mauvaise chose. Certes, le changement d'attitude de la France est davantage lié à des considérations d'intérêt, mais cela permettra aussi de créer des opportunités de développement pour un certain nombre de pays africains. Toutefois, sur le marché africain, la France doit encore apprendre à rivaliser en termes d'équité et d'avantages mutuels avec les autres pays. La Chine et d'autres pays émergents sont d'abord venus sur le marché africain pour aider le continent à remédier à ses retards en termes de production et d'infrastructures, pour contribuer au développement de l'Afrique. Et si la France place également le bien-être de la population de l'Afrique en premier lieu, alors elle devra renforcer la coopération avec ces pays émergents, plutôt que d'adopter une attitude d'hostilité et même d'entrave.
Lors de la conférence économique franco-africaine à laquelle ont participé plus de 500 entreprises françaises et africaines, une équipe de recherche dirigée par l'ancien ministre français des affaires étrangères Hubert Védrine a présenté un rapport de près de 200 pages sur le développement du marché africain, et proposé 15 recommandations. On peut dire qu'elles sont les bienvenues. Parmi ces propositions, comment renforcer les relations entre la France et l'Afrique, comment faciliter l'obtention d'un visa pour la France pour les entrepreneurs africains, comment inciter les Français d'origine africaine à investir en Afrique etc. En ce qui concerne ces propositions, les entrepreneurs africains seront bien sûr les bénéficiaires. Mais pour eux, la clé sera non pas ce que la France va dire, mais ce qu'elle va faire.
Auteur : Ren Yaqiu
Date : Le 6 décembre 2013