Les deux pays européens, qui forment l'un des axes clés de l'Union européenne (UE), célèbrent lundi et mardi le cinquantenaire du traité de l'Elysée, qui a officiellement scellé, le 22 janvier 1963, l'ouverture de liens de coopération privilégiés entre la France et l'Allemagne.
L'heure est, par conséquent, au bilan. L'amitié franco- allemande, qui s'est progressivement développée au lendemain de la Seconde guerre mondiale, mettant fin à des décennies de conflits récurrents, est-elle toujours bien portante ? Leurs relations économiques et diplomatiques sont-elles encore au beau fixe, en dépit des changements d'orientation politique de ses dirigeants?
Le président français François Hollande et la chancelière allemande Angela Merkel doivent se réunir à Berlin afin de commémorer ce traité historique, qui, selon son signataire, le général Charles De Gaulle, a tourné la page d' "une si longue et si sanglante histoire de luttes et de combats (entre les deux Etats européens)" mais aussi ouvert les portes "d'un avenir nouveau pour la France, pour l'Allemagne, pour l'Europe".
En effet, le couple franco-allemand occupe bel et bien un rôle moteur au sein de l'UE, devenue au fil des ans l'acteur incontournable de la scène internationale que l'on sait. Toutefois, l'alternance politique qu'a connue l'Hexagone en mai dernier, avec l'élection à la présidence du pays du candidat du Parti socialiste français (PS) : François Hollande, n'était pas franchement du goût de Berlin.
La conservatrice Mme Merkel avait, en effet, ouvertement donné son soutien à Nicolas Sarkozy (2007-2012), candidat malheureux à sa propre réélection, dont elle partageait les mêmes affinités politiques de droite et avec lequel elle formait le duo "Merkozy", selon l'expression inventée par la presse.
Néanmoins, même si l'accession au pouvoir du socialiste François Hollande a jeté un froid entre Berlin et Paris, il a été en partie surmonté, grâce à l'entente des deux pays au sujet de la nécessaire rigueur budgétaire à respecter face à la crise de la dette souveraine qui affecte les pays de la région.
Conformément aux souhaits de l'Allemagne, le Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG), plus communément appelé "Pacte budgétaire européen", a été ratifié en octobre dernier par les députés français, à la demande du président et de son gouvernement, qui se sont contentés d'obtenir l'annexion au texte européen d'un volet "croissance".
Cette convergence d'opinion au sujet de la résolution de la crise de la zone euro n'est pas au rendez-vous au niveau diplomatique et militaire, comme peut l'illustrer l'intervention de l'armée française au Mali, lancée il y a une dizaine de jours à la demande de Bamako.
Berlin n'a toujours pas donné de signe concret d'alignement sur la position française prônant la lutte contre les terroristes djihadistes occupant le Nord-Mali.
Mme Merkel a timidement souligné, quelques jours après l'envoi de soldats français dans ce pays ouest-africain, que le terrorisme au Mali constituait "une menace pour l'Europe". "L'Allemagne considère que la situation dans la région fait partie de sa propre situation sécuritaire", a-t-elle poursuivi, lors d'une conférence de presse aux côtés du président ivoirien Alassane Ouattara.
Par ailleurs, le ministre allemand de la Défense, Thomas de Maizière, a décidé de prêter deux avions C17 de transport de fret aux forces françaises afin de les aider à mener à bien leurs opérations sur le territoire malien.
Sur le plan de la coopération industrielle, le couple franco- allemand bat également un peu de l'aile, puisque c'est vraisemblablement Berlin qui, de peur d'être lésé par le nouvel accord, a fait échouer en octobre 2012 une fusion stratégique entre les deux géants européens de l'aéronautique et de la défense: le groupe franco-allemand EADS et l'entreprise britannique BAE Systems.
La consolidation de l'axe franco-allemand ne sera pas chose aisée pour les deux leaders européens, M. Hollande et Mme Merkel, mais leurs retrouvailles, à l'occasion de la célébration du cinquantenaire de la signature par le général De Gaulle et le chancelier Adenauer d'un traité de réconciliation fondateur, pourraient permettre une nouvelle mise en commun de leurs intérêts respectifs.