La première fois qu'il est arrivé à Beijing, il y a dix-huit ans, Jean-Paul Vittot n'imaginait pas que les rues calmes de la capitale chinoise seraient un jour bondées de véhicules.
La ville ne possédait que deux lignes de métro en 1995, l'année où Jean-Paul est venu étudier la langue chinoise dans le cadre d'un échange. Les bicyclettes dominaient les rues, et les voitures étaient hors de portée de la majorité des habitants.
"Il y avait quelques véhicules dans la rue, mais la plupart d'entre eux étaient des mini-fourgonnettes", se rappelle ce Français de 41 ans.
Jean-Paul, qui travaille aujourd'hui comme contrôleur financier dans une filiale de l'équipementier français Valeo, se souvient de ce à quoi ressemblait le quartier près de son bureau dans l'arrondissement de Chaoyang, un endroit où les centres commerciaux et les gratte-ciel étourdissants ont aujourd'hui remplacé les petites foires et les marchés aux puces des années 1990.
"Il est rare de voir des réformes apporter de tels changements à un pays et affecter la vie d'un si grand nombre de gens", fait-il remarquer.
La Chine a adopté une série de politiques de réforme et d'ouverture en 1978. Séjournant dans le pays depuis près de vingt ans, Jean-Paul a pu témoigner des effets de cette décision historique qui a transformé Beijing en métropole moderne.
Selon Jean-Paul, c'est sa curiosité envers une société en pleine mutation sous les réformes de Deng Xiaoping qui l'a poussé à apprendre le chinois.
"Aux yeux des Européens, la Chine était à l'époque un grand pays qui s'ouvrait petit à petit après une période d'isolation", explique-t-il.
Pendant ses premières années dans la capitale, il avait le sentiment d'être dévisagé, car il était l'un des rares étrangers sur le campus et dans le quartier.
"La plupart des gens étaient bienveillants et avaient envie de communiquer", déclare Jean-Paul. "Mais j'ai parfois été interrogé par des personnes qui avaient l'air de travailler dans l'administration et qui 's'inquiétaient' de ma présence."
Cependant, les signes des grands changements que connaissait la ville étaient évidents. Beijing était en train d'améliorer ses moyens de communication, et la construction d'une autoroute reliant le centre-ville à la banlieue de Tongzhou a été lancée en 1995.
L'impact de la réforme était également palpable dans d'autres secteurs. Les entreprises d'Etat ont commencé à se privatiser dans les années 1990. Certains habitants devaient désormais acheter leurs propres logements au lieu d'en obtenir un auprès de leurs unités de travail. Et les entreprises et ressortissants étrangers étaient sujets à moins de restrictions.
L'accumulation sans précédent de richesses dans le secteur privé a sous peu accru la demande dans le marché automobile, qui a également bénéficié des politiques du gouvernement central et de l'amélioration des infrastructures urbaines.
De nombreuses entreprises étrangères visant le potentiel du marché chinois décidèrent de s'implanter dans le pays dans les années 1990. Ce fut notamment le cas de l'entreprise pour laquelle travaille Jean-Paul. Celle-ci gère des usines dans les provinces du Hubei, du Hunan et du Jilin.
Selon les données du Bureau d'Etat des statistiques, 20,6 millions d'automobiles ont été vendues en Chine en 2012, faisant du pays le plus grand marché automobile du monde.
A mesure que Beijing s'est modernisée, la circulation urbaine est devenue plus ordonnée, constate Jean-Paul, qui évoque toutefois les problèmes liés à la pollution et les embouteillages.
Depuis l'année dernière, la ville de Beijing a été affectée par plusieurs vagues de smog. Selon les experts de l'environnement, l'utilisation excessive de véhicules est en grande partie responsable des polluants présents dans l'air.
Jean-Paul conseille à la municipalité d'accorder une plus grande attention au développement des énergies vertes et à la préservation des racines culturelles de la ville.
"Pour un étranger comme moi, vivre dans une ville internationalisée comme Beijing est très confortable, mais j'ignore si les habitants locaux ont ressenti les choses de la même manière", explique Jean-Paul. Selon lui, le charme de Beijing réside aussi dans sa culture ancienne, et le Français appelle à préserver celle-ci au maximum.