Le ministre centrafricain de la Communication, Alfred Poloko, a appelé mercredi la communauté internationale à faire pression sur les rebelles de la coalition Séléka qui menacent de renverser le pouvoir du président François Bozizé, afin qu'ils déposent les armes et acceptent d'aller à la table des négociations pour la paix.
« Comme le chef de l'Etat l'a annoncé, il prêt à se rendre à Libreville (au Gabon, NDLR) pour participer aux négociations sans délai et sans condition. Toute guerre se termine autour d'une table des négociations », a déclaré dans un entretien téléphonique à Xinhua le ministre Poloko, qui a qualifié de « désastre » la situation humanitaire dans la zone des combats.
Les autorités de Bangui et les rebelles qui se sont emparés d'une partie importante du territoire de la République centrafricaine (RCA) depuis leur première attaque le 10 décembre, doivent se rencontrer pour un dialogue politique direct dans la capitale gabonaise sous l'égide de la Communauté économique des Etats de l'Afrique (CEEAC) à laquelle le pays appartient.
Le président Bozizé s'est déclaré lors de la visite lundi à Bangui de son homologue béninois, Thomas Boni Yayi, président en exercice de l'Union africaine (UA), disposé à y participer et à former un gouvernement d'union nationale au terme de cette initiative à laquelle les rebelles disent également adhérer, tout en remettant en cause cependant la sincérité du chef de l'Etat.
Aucun calendrier desdits pourparlers n'a jusqu'ici été arrêté. Le ministre de la Communication dans l'entretien mercredi après- midi avec Xinhua s'est gardé de s'y prononcer, faisant savoir que le dossier ne relève pas de sa compétence.
Il a au demeurant souligné « l'urgence et la nécessité d'aller à la table des négociations et de faire des concessions dynamiques ou en d'autres termes ce que le chef de l'Etat appelle un compromis républicain, dans l'intérêt de la paix et de l'unité du pays ».
« La RCA est le seul pays de la CEMAC (Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale, NDLR) qui n'a pas encore mis en valeur son pétrole. C'est un pays dont le niveau de vie et le pouvoir d'achat des populations demeurent faibles. Nous sommes vraiment très en retard et notre ambition de développement prime sur toute autre considération », a-t-il justifié.
« C'st pourquoi, a-t-il poursuivi, nous comptons sur la communauté internationale pour qu'elle fasse pression sur ces groupes rebelles pour que très vite on aille vers la paix. »
A en croire Alfred Poloko, la zone sous occupation rebelle ( Nord et Est) est confrontée à un désastre humanitaire, « puisque les populations civiles sont aujourd'hui dans la brousse. Leur vie est menacée. Ces populations sont exposées à tout type de maladie et à l'insécurité, du fait évidemment de la présence de ces groupes rebelles ».
« C'est une situation vraiment dramatique. Les humanitaires commencent à bouger par rapport à ça. Mais, c'est difficile de venir en aide à ces populations en les regroupant, étant donné qu'elles vident dans la peur et se cachent. A Bangui, on commence à ressentir aussi le contrecoup de cette situation ».
Le coût de la vie, explique le ministre de la Communication, a énormément augmenté dans la capitale centrafricaine, confrontée à la pénurie de denrées alimentaires. « Le sac de manioc, note-t-il, est passé à 21.000 francs (CFA, 42 USD, NDLR) depuis deux-trois jours, contre 12.000 ou 13.000 francs (24 ou 26 USD) d'habitude ».
Une préoccupation, car, le manioc représente le principal aliment des Centrafricains. Les villes de Bambari (Est) et de Sibut (Nord), passées sous contrôle de la rébellion, en sont décrites comme les principales sources d'approvisionnement de Bangui, une capitale où par ailleurs « la psychose fait que de manière générale l'activité tourne au ralenti », informe en outre M. Poloko.
Il annonce l'enlèvement lundi d'un responsable français de l'usine de sucre de Ngakobo, près de Bambari, une industrie elle- même pillée par les rebelles.
Sans les rejeter, le ministre de la Communication a réagi aux informations et accusations faisant état d'arrestations et de détentions arbitraires d'habitants de Bangui par les services spéciaux gouvernementaux en indiquant que « dans la confusion générale, beaucoup de choses peuvent se passer. Il faut attendre que les responsables de la sécurité terminent leurs vérifications ».
Il a en revanche rejeté les allégations des rebelles qui annoncent le recours par le pouvoir central aux mercenaires sud- africains et rwando-congolais bayamulenge, en appui aux Forces armées centrafricaines (FACA), l'armée régulière.
« A aucun instant, s'est-il défendu, un appel n'a été lancé à des mercenaires de n'importe quel pays. C'est une guerre médiatique qu'ils (les rebelles, NDLR) mènent en complément de m'aspect militaire. Ce que je peux vous dire en tout cas, c'est qu'il n'y a pas de mercenaires, de forces non conventionnelles aux côtés de l'armée. Le gouvernement ne peut pas se permettre ce genre de faute. »
Alfred Poloko ajoute que « les forces qui sont là, proviennent soit de la CEEAC (l'organisation régionale composée de l'Angola, du Burundi, du Cameroun, du Congo, du Gabon, de la Guinée équatoriale, de la RCA, de la République démocratique du Congo, de Sao Tome-et-Principe et du Tchad a décidé l'envoi d'une force d'interposition et de dissuasion de 720 soldats pour le respect d'un cessez-le-feu, NDLR), soit des pays avec lesquels la RCA a des accord militaires ».
Au rang de ces pays, la France, qui dispose d'une base militaire à l'aéroport de Bangui et a annoncé avoir décidé de renforcer ce dispositif afin uniquement d'assurer la protection de ses ressortissants en RCA, et non pas le régime du président Bozizé.