Une délégation du secrétariat permanent du Processus de Kimberley de la République centrafricaine (RCA) participe à une concertation ouverte lundi à Yaoundé où elle défend une stratégie de mise aux normes visant à obtenir la levée de la suspension internationale imposée en 2013 à la commercialisation des diamants bruts à cause de la guerre dans ce pays d'Afrique centrale.
"Si nous sommes ici, c'est parce que nous gérons une situation qui s'est imposée à nous", a rappelé à l'ouverture de ces assises Maxime Ange Kazagui, secrétaire permanent adjoint du processus de Kimberley national centrafricain dans une allusion au conflit armé qui se poursuit depuis l'offensive lancée en décembre 2012 par l' ex-coalition rebelle de la Séléka contre le régime de François Bozizé.
Admis au sein du Processus de Kimberley depuis sa création en janvier 2003, la RCA a de facto été suspendue en mai 2013, puisque l'objectif de cet observatoire international initié par les Nations Unies est notamment d'endiguer l'infiltration des diamants bruts dits de conflits, dans le circuit officiel de la commercialisation et par conséquent mettre un terme aux liens entre commerce de ces ressources et les conflits armés.
Avant de sombrer dans la violence, ce pays pauvre et enclavé d' Afrique centrale tirait 40% de son produit intérieur brut (PIB) de ce commerce, pour une production annuelle estimée à 400.000 carats, selon les estimations officielles confirmées par Maxime Ange Kazagui dans un entretien à Xinhua en marge de la concertation inter-Etats tenue lundi et mardi dans la capitale camerounaise.
C'est une réunion cruciale pour les autorités centrafricaines pour remettre en mouvement un pilier important de l'activité économique nationale paralysée par la crise.
Elle fait suite à deux autres abritées précédemment par le Congo-Brazzaville et la République démocratique du Congo (RDC), et qui découle d'une recommandation, lors de la plénière du Processus de Kimberley tenue en novembre 2013 à Johannesburg, en Afrique du Sud, aux pays limitrophes de la RCA d'organiser de telles rencontres en vue d'éviter l'infiltration chez eux des diamants centrafricains.
Pour Kazagui, la RCA est "un pays conforme aux requis du Processus de Kimberley et je dirais même bien avant que le Processus de Kimberley ne soit mis en place". Car, assure-t-il, c' est depuis les années 1990 que son pays a mis en place "un système de traçabilité efficace", témoignage de sa maîtrise de la chaîne de production jusqu'à l'exploitation des diamants bruts.
En dépit de la persistance des violences qui continuent de plonger nombre de populations centrafricaines vers l'exode forcé dans les pays voisins comme le Cameroun, ce responsable institutionnel à la prise de parole mesurée se défend plutôt d'un retour progressif à la normalisation dans le pays, y compris dans les zones minières.
"De la même manière que le Kimberley est un processus, a-t-il martelé à Xinhua, la sécurité en est un, c'est-à-dire elle revient. Et elle revient progressivement. Je ne vous apprends rien, quand il y a eu un conflit quelque part et que la sécurité a été remise en question, elle revient progressivement. C'est ce qui se passe dans notre pays, avec les forces étrangères en place."
Avec le Cameroun, la RCA, d'après son secrétaire permanent national adjoint du Processus de Kimberley, se concerter pour " collaborer et coopérer. Il s'agit de s'assurer que tous les requis de Kimberley sont en place des deux côtés".
C'est une déclaration confirmée par le ministre camerounais des Mines, de l'Industrie et du Développement technologique, Emmanuel Bondé, pour qui il est question de "déterminer un système de vigilance commune et favoriser ainsi une meilleure transparence".
De l'avis du ministre, "la République centrafricaine a élaboré des stratégies pour traiter les questions de non-conformité aux exigences minimales du système de certification du Processus de Kimberley et pour renforcer son système de contrôle interne, notamment à travers un plan de travail qu'elle a soumis lors de la tenue de (la) plénière du Processus de Kimberley" à Johannesburg.
Il a fait part de mesures prises par les autorités camerounaises pour éviter l'infiltration des diamants du conflit centrafricain, à savoir le renforcement du système de contrôle à la frontière commune où le dispositif sécuritaire a été renforcé avec le déploiement d'unités spéciales de l'armée nationale dont le redoutable Bataillon d'intervention rapide (BIR) spécialisé dans la lutte contre le grand banditisme.
A Yaoundé, le programme de travail de la délégation centrafricaine comporte au menu une rencontre avec les bureaux d' achat des diamants opérant au Cameroun.
Depuis sa création en 2003, le Processus de Kimberley regroupe à ce jour 81 pays et organisations qui s'échangent 99,8% de la production mondiale de diamants bruts, d'après les estimations.
Le Cameroun y a été admis le 14 août 2012, la même année que l' institution du système de certification de ce processus chargé de définir les conditions de contrôle de la production et commerce de ces ressources.
Par Raphaël MVOGO