Le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, s'entretiendra mercredi à Paris, au lendemain de son déplacement à Kiev, avec son homologue français Laurent Fabius, et assistera au Conseil des ministres de la France, un fait inédit pour un chef de diplomatie étranger. C'est, tant pour la France que pour l'Allemagne, un événement historique reflétant l'étroitesse des relations franco-allemandes.
Il s'agit d'une mesure anormale prise par la France, qui voit de l'intérêt à apporter un changement à son Conseil des ministres pour renforcer son poids au sein de l'Europe.
Inviter le ministre allemand des Affaires étrangères au Conseil des ministres de la France, ça démontre la bonne relation entre les deux "pays axes" de l'Europe. Aujourd'hui, l'Europe ne peut résoudre le moindre problème sans l'accord de la France ni celui de l'Allemagne. Comme le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Romain Nadal, a dit lors d'un point de presse avant l'arrivée de M. Steinmeier, c'est la première fois qu'un ministre étranger des Affaires étrangères prendra part au Conseil des ministres de la France, et c'est également un signe du "dynamisme et de la confiance exceptionnelle" présents dans la relation franco-allemande.
L'invitation du ministre allemand au Conseil des ministres de la France pourrait envoyer un message clair au monde : la France était, est et sera toujours un pays clé de l'Europe, qui déploie beaucoup d'efforts pour résoudre les affaires épineuses de l'Europe.
En général, le Conseil des ministres, un rendez-vous hebdomadaire, permet au président, au Premier ministre et aux ministres du gouvernement français de discuter des dossiers les plus importants pour la France. Cette fois, le gouvernement français veut déclarer, par le biais de ce "changement", que "la France prend la responsabilité des affaires européennes".
La présence de M. Steinmeier au Conseil des ministres de la France est également un événement symbolique qui montre que la France reste un "pôle important" dans le monde. Après la Seconde Guerre mondiale, la France joue toujours un rôle important dans les affaires mondiales. Depuis Charles de Gaulle, blessé par la négligence internationale qui a suscité un sentiment amer au sein de la population, la France participe activement, coûte que coûte, aux affaires internationales, allant jusqu'à défier les Etats-Unis dans la crise irakienne, au cours de laquelle la France a prouvé qu'elle avait de bonnes raisons d'être ferme contre l'invasion étrangère en Irak.
Depuis quelques années, la France a exercé une "diplomatie de crise" remarquable. En lançant le premier raid aérien contre l'ancien régime de Khadafi, en organisant des réunions des "Amis de la Syrie", en participant activement aux négociations vis-à-vis des crises iranienne et ukrainienne, etc, la France a attiré l'attention du monde entier et a ainsi exercé son influence en tant que membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU. L'invitation de M. Steinmeier entre dans le cadre de cette "diplomatie de crise".
En outre, il s'agit d'une mesure gagnant-gagnant.
Politiquement, depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, l'Allemagne n'a jamais été aussi importante sur la scène internationale. Il est à rappeler que le premier leader européen contacté par le président russe Vladimir Poutine après l'éclatement de la crise ukrainienne était la chancelière allemande Angela Merkel. Naturellement, l'Allemagne, soutenue par une énorme influence économique, bénéficiera d'un plus grand droit de parole dans les affaires internationales.
L'alliance franco-allemande, avec les deux pays main dans la main, constitue aujourd'hui le pilier de l'Europe. Mais, avec la montée en puissance de l'Allemagne, la France peut-elle toujours maintenir l'équilibre politique de l'Europe? C'est une question à poser dans le futur.