Richard von Weizsäcker, alors maire de Berlin Ouest, le Président américain Ronald Reagan et le Chancelier ouest-allemand Helmut Schmidt, en 1982. |
Richard von Weizsäcker, le premier président de l'Allemagne réunifiée et gardien de la conscience morale de son pays, est mort, a annoncé samedi le bureau du président à Berlin. Il avait 94 ans. M. Weizsäcker était devenu le chef de l'Etat de l'Allemagne de l'Ouest en 1984 et était toujours en poste lors de la réunification de l'Allemagne de l'Est avec la République fédérale d'Allemagne avant de démissionner en 1994. Son éloquence fit d'un poste apolitique et essentiellement honorifique un forum pour s'exprimer sur les questions d'intérêt national - ce qu'il a fait, souvent sans ménagement et, plus souvent encore de façon émouvante, même au risque de froisser les politiques.
Son discours mémorable 1985 au Parlement de Bonn pour le 40e anniversaire de la capitulation de l'Allemagne à la fin de la Seconde Guerre mondiale lui a valu le respect à l'étranger. Il avait alors exhorté tous les Allemands - jeunes ou vieux, personnellement coupables ou non – d'admettre la honte du passé de leur nation, disant que c'était la seule façon de construire un avenir pacifique et de parvenir à la réconciliation avec les nombreux peuples qui subirent le joug du Troisième Reich d'Hitler.
Richard Freiherr von Weizsäcker -Freiherr est un titre, proche de Baron- était né à Stuttgart le 15 avril 1920, dans une lignée d'aristocrates hommes d'État, théologiens et scientifiques. Son enfance errante de fils d'un diplomate, l'a vu grandir en Suisse, au Danemark et en Norvège. Son père, Ernst Freiherr von Weizsäcker, fut nommé secrétaire d'Etat au ministère des affaires étrangères en 1938 et ambassadeur au Vatican en 1943.
Après avoir brièvement étudié le droit à Oxford et à Grenoble, en France, il fut affecté au 9e régiment d'infanterie de Potsdam, une unité imprégnée des traditions de l'aristocratie royale prussienne. Le régiment pris part à l'invasion de la Pologne en 1939. Deux jours après le début de l'invasion, son frère aîné Heinrich fut tué d'une balle dans la gorge, et il veilla sur lui toute la nuit. Blessé trois fois lui-même, il fut élevé au grade de capitaine et d'adjudant régimentaire. À la fin de la guerre, le régiment avait été pratiquement dissout, parce que ses chefs, des camarades et amis de M. Weizsäcker, avaient été impliqués dans le complot raté visant à tuer Hitler en 1944.
Après la guerre, Richard von Weizsäcker rejoignit l'Union chrétienne-démocrate en 1954, mais ne devint pas actif en politique jusqu'en 1966, quand il fut admis dans l'exécutif du parti. En 1969, il a été élu au Bundestag de la Rhénanie-Palatinat, puis maire de Berlin en 1981, avant de devenir Président de la République Fédérale d'Allemagne en 1984, un mandat qui fut aussi notamment marqué par sa visite en Israël, la première d'un président allemand.