Dernière mise à jour à 08h46 le 14/11
Joanna Mackowiak-Pandera, experte polonaise de l'énergie, a récemment retiré la plaque de cuisson au gaz de sa cuisine pour la remplacer par une plaque à induction. Elle a également fait installer des panneaux solaires et commandé une pompe à chaleur pour sa maison, en préparation de l'hiver polonais long et humide.
Cependant, le coût initial élevé de l'installation d'un système énergétique autosuffisant empêche de nombreux foyers d'emprunter la voie écologique de sortie de la crise énergétique actuelle. Même en temps normal, 37 % des foyers polonais utilisent du charbon pour se chauffer, selon les estimations officielles.
Bien que la Pologne soit le plus gros pays producteur de charbon de l'Union européenne (UE), environ 20 % de ses besoins sont couverts par les importations. En 2020, la Russie représentait 75 % des importations polonaises de charbon pour un total de 12,9 millions de tonnes, d'après les données de l'Office central polonais des statistiques.
Toutefois, depuis que la Pologne a imposé un embargo sur le charbon russe en avril dernier, bien avant l'interdiction entrée en vigueur en août dans toute l'UE, cette option n'est plus envisageable et de nombreux Polonais se sont donc retrouvés dans une situation précaire juste avant le début de la saison du chauffage.
"Nous rencontrons aujourd'hui des problèmes pour chauffer nos maisons", a déclaré Mme Mackowiak-Pandera, également présidente du Forum Energii, un groupe de réflexion polonais interdisciplinaire actif dans le domaine de l'énergie.
La situation suscite des débats et de l'anxiété car de nombreux ménages n'ont toujours pas de charbon pour se chauffer avant l'hiver, a expliqué l'ancienne sous-secrétaire à l'environnement de Pologne, ajoutant que l'importation et le remplacement de ces sources d'approvisionnement en charbon auprès d'autres pays seraient très difficiles.
La pénurie de charbon, associée à la rétention des marchés et à l'impact de l'inflation, a contribué à l'explosion des prix du charbon. "Tout le monde ne peut pas se permettre la hausse de 500 % des prix du combustible", a noté Mme Mackowiak-Pandera.
La crise énergétique qui perdure inflige d'une part un lourd fardeau financier sur les ménages et l'économie, et elle a d'autre part des conséquence sur l'environnement et la santé.
Des groupes environnementaux tels que Polish Smog Alert, une ONG reconnue dédiée à la surveillance de la qualité de l'air, craignent que de nombreuses familles ne se résolvent à brûler dans leurs fourneaux tout ce qui peut avoir une valeur calorifique, y compris leurs déchets.
"Nous appelons (ces fourneaux) des 'fumeurs'", a expliqué à Xinhua le porte-parole de l'ONG, Piotr Siergiej. "Dans ces fumeurs, les gens brûleront probablement ce qui sera le moins cher."
La qualité de l'air en Pologne est, dans tous les cas, l'une des pires en Europe. Selon les données de la Banque mondiale, 36 des 50 villes les plus polluées de l'UE se trouvent en Pologne.
D'après l'ONG, plus de 50 % de la pollution particulaire en Pologne est issue des poêles domestiques à combustible solide. Sur les près de trois millions de chaudières obsolètes utilisées dans le pays, seules 70.000 ont été remplacées par des alternatives plus efficaces et écologiques au cours des deux dernières années.
Si les conditions météorologiques sont mauvaises pendant l'hiver à venir, il y aura davantage de pollution que les années précédentes, a averti M. Siergiej.