Pays à épidémie à VIH généralisée avec plus de 122.000 malades sous traitement sur un total de plus de 267.000 personnes éligibles, le Cameroun est confronté à des tensions régulières des stocks d'antirétroviraux (ARV) dues à l'insuffisance des ressources financières, selon le secrétaire permanent du Comité national de lutte contre le SIDA, le Dr. Jean Bosco Elat Nfetam.
« Nous avons des gros problèmes financiers. Je prends un exemple simple : pour l'année 2013, les besoins de douze mois se chiffrent autour de 13 milliards de francs CFA. Les disponibilités
financières ne nous permettent pas de couvrir ces coûts. Ça représente 80% du budget d'investissement du ministère de la Santé publique, pour l'achat uniquement des antirétroviraux », a-t-il souligné dans un entretien à Xinhua.
Question : D'après vos statistiques, sur plus de 570.000 malades de SIDA, seuls 47% sont sous traitement par antirétroviraux. Qu'est-ce qui explique ce gap ?
Réponse : Le gap doit s'expliquer à plusieurs niveaux. D'abord, beaucoup de patients séropositifs qui ont besoin de traitement ne connaissent pas leur statut sérologique, donc ne sollicitent pas ce service auprès des formations sanitaires. L'autre chose, c'est que les centres qui offrent les traitements à ARV pour les malades ne sont pas disséminés jusque dans les coins les plus reculés. Il est question pour nous de faire d'abord la sensibilisation pour que tout Camerounais vienne se faire dépister, question de connaître son statut sérologique, de savoir s'il est éligible au traitement pour bénéficier de ce traitement ARV. Nous envisageons, dans le cadre de la facilitation des tâches, de décentraliser de plus en plus l'offre de services de traitement. C'est-à-dire qu'au lieu de rester uniquement dans les grands hôpitaux et les hôpitaux de district, de plus en plus on va aller vers les centres médicaux d'arrondissement, dans des grands centres de santé pour offrir ce traitement. Je crois que par là nous allons augmenter cette accessibilité géographique du traitement et cela va contribuer à l'amélioration de ce taux de personnes éligibles et qui sont mises sous traitement.
Q : Il est fait état de la non-disponibilité de médicaments contre les maladies opportunistes. A quoi cela est-il dû ?
R : Il faut d'abord faire des précisions. Toutes les infections opportunistes qu'on retrouve chez les patients vivant avec le VIH ne sont pas prises en charge par le programme. Il y a certaines infections opportunistes bien précises pour lesquelles le programme met à disposition des médicaments. C'est le cas de la tuberculose et comme vous pouvez l'imaginer, c'est la première cause de mortalité chez les personnes vivant avec le VIH. Ces médicaments sont mis à la disposition des malades gratuitement à travers le Programme national de lutte contre la tuberculose. Il y a le Bactrim qui permet d'éviter les infections gastro- intestinales qui est mis en charge gratuitement. Il y a le Fluconazole qui est mis en charge gratuitement. Mais d'autres infections opportunistes, le programme ne s'en occupe pas. Donc à ce niveau-là, c'est aux malades de chercher ces médicaments. Il en est de même pour les bilans biologiques. Il y a des examens qui ne sont pas subventionnés par l'Etat.
Q : Lesquels ? R : Si un malade vivant avec le VIH a besoin d'une échographie, ce n'est pas fait gratuitement. Il y a aujourd'hui la charge virale dont les malades ont véritablement besoin pour le suivi de leur traitement mais qui n'est pas subventionnée par le gouvernement. Il y a une liste d'examens subventionnés, mais les autres qui ne sont pas subventionnées, il faut également s'attendre à ce que ce soit payant.
Q : A quoi sont également dues les ruptures de stocks des ARV ?
R : Les ruptures de stocks ou tensions de stocks, ça dépend de là où on se trouve. Nous avons des gros problèmes financiers. Je prends un exemple simple : pour l'année 2013, les besoins de douze mois se chiffrent autour de 13 milliards de francs CFA. Les disponibilités financières ne nous permettent pas de couvrir les coûts. Ça représente 80% du budget d'investissement du ministère de la Santé publique, pour l'achat uniquement des antirétroviraux. Le gouvernement, avec l'appui de ses partenaires, fait les efforts pour mobiliser les ressources pour que les patients aient accès à ces antirétroviraux. Mais, comme je le disais tout à l'heure, il y a un gap financier énorme. C'est ce gap financier qui fait que les antirétroviraux ne sont pas toujours disponibles au moment voulu et en quantités voulues. Au jour d'aujourd'hui, nous n'arrivons pas à faire les stocks de six mois, comme il y a trois ans où en plus des besoins pour le traitement il y avait un stock conséquent. Donc, chaque malade qui venait dans une formation sanitaire pouvait avoir deux ou trois mois de traitement sans beaucoup se gêner.