Tout récemment, le Programme de comparaison internationale de la Banque mondiale a publié les résultats d'une étude, selon laquelle, en se basant sur la parité de pouvoir d'achat, l'économie de la Chine dépassera celle des États-Unis en 2014, la plaçant au premier rang mondial. Dès qu'il a été publié, ce résultat a d'emblée suscité l'attention des médias internationaux. La façon dont on considère ces conclusions ne concerne pas seulement la manière dont on traite la question de la détermination de l'état de l'économie chinoise, mais elle est également liée au paysage d'ensemble de l'économie mondiale.
Premièrement, il n'y a aucun mal à utiliser la parité de pouvoir d'achat pour mesurer, sur un plan statistique, le PIB d'un pays. Par rapport à la méthode du taux de change du marché, cela permet d'éliminer les erreurs causées par les fluctuations fréquentes des taux de change. Toutefois, cela ne signifie pas que cette méthode peut mesurer de manière objective la taille de l'économie d'un pays. Quand on évalue le PIB d'un pays en utilisant le critère de la parité de pouvoir d'achat, le cœur du problème est l'évaluation du coût de la vie. Or, on considère que dans l'évaluation de 2005 du Programme de comparaison internationale de la Banque mondiale, l'estimation du coût de la vie en Chine a été surévaluée de 20%. En d'autres termes, du fait de cette évaluation de l'indice du coût de la vie en Chine, l'écart entre la Chine et l'économie américaine a été virtuellement réduit, la faisant dépasser les États-Unis à l'avance, en 2014, au lieu de 2019. Ainsi, le classement par la Banque mondiale de « la Chine, première économie du monde », est elle, dans un certain sens, le résultat de l'ajustement d'indicateurs statistiques.
Deuxièmement, que l'on utilise la méthode du taux de marché ou du calcul de la parité de pouvoir d'achat pour déterminer le PIB, on n'obtient pas un reflet fidèle de la taille économique d'un pays. La raison en est que l'indice du PIB lui-même ne reflète pas la qualité des performances économique d'un pays, comme le niveau de sa structure industrielle, son niveau et ses capacités d'innovation technologique, le niveau de ses services comme l'éducation, la culture et les soins de santé, la protection de l'environnement etc. Dans ces domaines, l'écart entre la Chine et les États-Unis et d'autres pays développés est évident. Ces dernières années, que ce soit en Chine comme à l'étranger, on s'attache désormais à utiliser des critères plus objectifs d'évaluation globale de l'échelle économique d'un pays, comme son PIB vert.
Troisièmement, même si le PIB de la Chine a dépassé celui des États-Unis, cela ne signifie pas pour autant que le montant total de sa richesse est le premier du monde. L'essence même du PIB d'un pays est une notion de flux, c'est-à-dire la création de valeurs nouvelles en l'espace d'une année, tandis que la richesse est le résultat d'une accumulation, qui appartient à une notion de stock. D'autre part, le PIB est toujours un concept local, à savoir la création de valeurs nouvelles dans un pays. Les investissements d'un pays étranger ne sont pas utilisés dans le calcul de la valeur créée dans le PIB du pays d'origine ; cette richesse appartient sans nul doute au pays d'origine de ces investissements. En comparaison avec les pays développés, les investissements chinois à l'étranger viennent seulement de commencer, tandis que les investissements étrangers à l'étranger sont énormes. Aussi, quand on discute de la signification pratique de la taille économique d'un pays, on doit prendre en compte les limites de ces indicateurs du PIB.
Quatrièmement, dans le traitement de l'ensemble des indicateurs de dimension économique, il existe des différences importantes sur ce quoi se focalisent la Chine et le monde extérieur. Le monde extérieur s'intéresse davantage aux données d'ensemble, parce que du point de vue du monde extérieur, la taille globale de l'économie signifie une demande accrue, une plus grande influence internationale et ainsi de suite. En revanche, en Chine, les gens sont plus préoccupés par les indicateurs par habitant, comme le revenu disponible par habitant, la répartition des revenus, l'espace de logement par habitant, le taux de motorisation par habitant etc.
En bref, peu importe la méthode utilisée pour évaluer la taille de l'économie chinoise, la seule utilisation d'indicateurs globaux ne pourra pas changer le fait qu'à l'étape actuelle, les caractéristiques de base montrent que la Chine appartient toujours aux pays en développement. La façon dont le peuple chinois a réagi face à cette affirmation selon laquelle « l'économie de la Chine est la première du monde », différente de ce que l'Occident pensait qu'elle serait, montre que les Chinois deviennent plus matures et plus rationnels. Au cours des dernières années, le concept de développement du Gouvernement chinois a également préconisé une réduction de l'importance accordée au PIB, en faveur de la poursuite d'un développement économique et social global, équilibré et durable. Ce n'est pas sur la base d'un simple classement du PIB total que la Chine changera la direction de développement qu'elle a établie, de même que, bien sûr, la communauté internationale ne devrait pas évaluer de manière irréaliste le niveau de développement de la Chine.