Dernière mise à jour à 14h11 le 29/01
Créée en fin 2018 et lancée officiellement en janvier 2019, l'Observatoire français des Nouvelles Routes de la Soie (OFNRS) est un think-tank français se focalisant sur l'initiative « la Ceinture et la Route » et les avancées de ses projets dans le monde entier. Tant académique sur ses contenus d'information que pragmatique sur ses actions de conseil et de promotion de terrain, ce think-tank témoigne de l'attrait de cette initiative chinoise en France. A l'occasion de son lancement officiel, Adrien Mugnier, fondateur et président de l'OFNRS nous raconte ses expériences et ambitions en créant ce think-tank et sa vision sur la Ceinture et la Route. Ci-dessous les questions-réponses.
1. En tant que fondateur et président de l'Observatoire français des Nouvelles Routes de la Soie, pouvez-vous nous expliquer pourquoi créer cette institution et quelles en sont les axes de recherche ? Vous pouvez raconter un petit peu vos expériences personnelle et professionnelle qui vous ont motivé.
J'ai décidé de créer l'Observatoire français des Nouvelles Routes de la Soie (OFNRS) pour pallier au manque de contenu en langue française sur l'initiative « la Ceinture et la Route », lancé en 2013 par le Président chinois Xi Jinping. Celle-ci a déjà célébré ses 5 années d'existence et pourtant, peu de personnes dans le monde francophone connaissent ce projet global qui sera pourtant au cœur du 21e siècle.
L'Observatoire aura deux axes de développement : Le premier concernera avant tout, la création de contenu académique, la réalisation d'une veille quotidienne sur les avancées de la Belt and Road Initiative (BRI) dans le monde. Afin d'informer, d'analyser et de faire prendre conscience des nombreuses opportunités qu'offre ce projet. Le second axe s'oriente vers le conseil et la promotion des secteurs, des régions où des projets franco-chinois pourraient voir le jour, faisant converger les entreprises françaises vers la BRI, aussi bien en France que dans des pays tiers comme en Afrique.
Me concernant, je m'intéresse au projet de la BRI depuis 2014, lorsque je l'ai découvert durant mon année passée à l'Université de Lanzhou (Gansu), au contact d'autres étudiants, notamment africains et d'Asie centrale. Je suis diplômé en Sciences Politique et en Relations internationales, passionné par la géopolitique et les achèvements accomplis par la Chine au cours des 40 ans dernières années. J'ai beaucoup voyagé à travers la Chine depuis 6 ans. Ce projet d'ouverture, symbole du 21e siècle est selon moi une opportunité unique pour faire converger les peuples vers un développement commun. Aussi, ayant travaillé en Afrique, j'ai vu le lien fraternel avec la Chine et les apports chinois, notamment au Sénégal, un pays qui pourrait faire lien entre Chine et France.
L'OFNRS offrira un autre regard de ce que l'on peut entendre ou lire. Nos valeurs sont la promotion du multilatéralisme, le soutien au développement de chaque Etat quel que soit sa taille et la poursuite de leur intégration dans la mondialisation au service d'intérêts gagnant-gagnant.
2. Qu'est-ce que vous comptez faire pour concrétiser ces objectifs ? Présentez-nous votre équipe et les moyens d'agir en ce sens.
L'objectif de cette année 2019 est multiple, tout d'abord ça sera de continuer sur la dynamique de 2018 en augmentant notre contenu via la veille sur les nouvelles routes de la soie. Nous avons dépassé les 100 articles fin 2018 et construisons une équipe pluridisciplinaire, internationale et passionnée afin de couvrir l'ensemble des secteurs et des zones géographiques concernés par la BRI. Le travail de veille s'effectue quotidiennement, il est accompagné par des articles de types académiques plus long en contenu et en analyse. Notamment sur des questions idéologiques, géopolitiques et touchant aux relations internationales.
Nous construisons une carte interactive recensant à travers le monde les projets portés par l'initiative « la Ceinture et la Route ». En y ajoutant une forme rédigée sous forme de « série » sur des projets majeurs de la BRI. Aussi, en 2019, nous allons développer la veille économique, par secteur et le conseil aux entreprises, afin de mieux conseiller les entreprises françaises et chinoises dans d'éventuel partenariat et le développement de projet communs.
Courant 2019, l'objectif sera d'ouvrir un siège, d'accueillir des stagiaires effectuant des recherches sur la BRI, effectuer des conférences auprès des décideurs de demain, dans l'enseignement supérieur (universités et écoles de commerce). En seulement 6 mois et sans véritable structure, nous avons été contactés par des acteurs de la BRI et du grand réseau franco-chinois. Nous sommes à la recherche de partenariats institutionnels et de financements pour soutenir ce développement.
3. On compte actuellement peu de projets bilatéraux en France dans le cadre des nouvelles routes de la soie. Quel potentiel existe-t-il entre la France et la Chine pour coopérer ?
Pourtant, la France aurait intérêt à considérer les opportunités offertes par la BRI. Par exemple, la route terrestre via le fret ferroviaire, devrait pousser les politiques à soutenir le projet du Lyon-Turin, qui est le segment manquant du corridor Méditerranéen du réseau européen RTE-T s'étendant de l'Espagne à la Hongrie et un projet écologique. Concernant la route maritime, la France pourrait en profiter pour moderniser ses installations portuaires en favorisant l'intermodalité et l'adaptation à l'utilisation du gaz naturel liquéfié des navires. Le Port de Marseille-Fos semble être le parfait point d'entrée de la route de la soie maritime en France. Dans le domaine du développement durable, de la logistique, de la projection des entreprises française en Chine, les nouvelles routes de la soie peuvent être sources de développement entre nos deux pays.
4. Cinq ans après le lancement de cette initiative, la Chine a conclu des contrats de coopération avec plus 140 pays, prouvant que cette initiative est de plus en plus accueillie dans le monde entier. Qu'est-ce que vous avez pu observer et qu'est-ce que vous attendez pour les années à venir ?
Depuis 2014, j'ai observé une véritable adhésion à la BRI au sein de mes réseaux africains et Est-Européens notamment, autour de cette idée de relancer les routes de la soie, dans un objectif harmonieux de développement mutuel et de rapprochement des peuples au sein de la mondialisation, aux conséquences souvent difficiles pour les pays en développement. Alors pourquoi autant de pays se sont intégrés à cette initiative ou s'y intéressent ? Et bien parce qu'il existe un réel besoin dans ces pays ! Notamment en termes d'infrastructures mais pas seulement.
Or aujourd'hui que l'initiative « la Ceinture et la Route » commence à apparaître dans les médias en Occident, on attaque la Chine sur un soi-disant « piège de la dette ». Mais ce qu'on oublie de dire, est que ces pays en développement sont pour beaucoup exclus des prêts de la part de banques, de pays ou d'organisations occidentales, il reste bien souvent que la Chine pour apporter autant de capitaux dans ce type de projet.
De plus, nous avons montré dans un article que cette accusation était fausse et relevait plutôt d'une attaque idéologique et d'un sentiment de perte d'influence. L'initiative « la Ceinture et la Route » est utile pour les pays concernés, ce besoin de développement pour ces peuples, leur intégration dans la mondialisation, n'entre jamais en ligne de compte dans la vision occidentale de la BRI, une erreur de plus. Enfin, le sentiment envers la Chine est aujourd'hui en croissance positive partout dans le monde en développement, ce qui pousse l'Occident à proposer des contre modèles (l'Inde, les États-Unis et l'Australie en proposent ou encore la stratégie de l'UE pour les infrastructures).
La perspective pour la BRI est double : Poursuivre la conduite de projets vitaux pour les pays demandeurs, tout en conservant cet esprit gagnant-gagnant, au risque que cela se retourne contre la Chine. Deuxièmement que la Chine développe une communication sur la BRI, expose son idéologie, se créer des relais dans les pays concernés afin de porter ses actions pour une meilleure acceptation, car oui la BRI est un projet qui peut bénéficier à tous.
5. La Chine veille à ce que les autres pays en voie de développement puisse profiter de la globalisation et de la coopération internationale en les intégrant dans le projet de la Ceinture et la Route, visant notamment à renforcer les infrastructures et réduire la pauvreté du continent africain. Qu'en pensez-vous de ce geste ?
Je souhaite revenir sur l'utilité de cette offre faite au monde et notamment aux pays en développement. En effet, chaque pays a le droit de s'intégrer et de ne pas se sentir exclu de la mondialisation. Si on prend l'exemple du Pacifique, les adversaires de la Chine nous parle « d'influence grandissante préoccupante », alors que les dirigeants des Fidji, Tonga, Papouasie Nouvelle-Guinée eux font état de besoins considérables en termes d'aéroport, route, pont, chemin de fer. Il y a ici, le constat évident d'une lutte d'influence, entre des pays occidentaux en perte de vitesse, incapables de proposer leur propre offre de développement et la Chine, fruit de son développement économique, offrant une alternative pour soutenir le développement partout dans le monde.
Concernant l'Afrique, la relation est ancienne avec la Chine. Les dirigeants africains se tournent vers un pays qui acceptent d'investir, d'apporter des capitaux et qui ciblent les projets clés pour chaque pays. Le cas de l'Afrique est important pour nous Français, car nous y possédons un lien également historique et d'influence. Or depuis quelques années, la Chine est passé devant, notamment au Sénégal. Au lieu de voir ceci comme une défaite à venir, pourquoi pas concevoir des projets communs, tripartite, notamment dans la gestion de ports d'Afrique de l'Ouest, montrer que la France veut et peut participer, tout en conservant une influence et développant la route maritime de la soie pour notre propre économie par exemple.
L'Observatoire français des Nouvelles Routes de la Soie, considère que cette initiative, va accompagner ce 21e siècle, et doit être vue comme une opportunité. Qu'il est nécessaire de développer une veille, de l'information, une meilleure compréhension, pour les décideurs de demain, entreprises, politiques, étudiants francophones. Notamment en France où le contenu manque et souvent orienté négativement par principe contre la Chine. Il faut rapprocher les acteurs français et francophones pour créer les conditions de projets sino-francophones. Le monde change, il faut savoir le regarder avec pragmatisme.
Par Gong Ming, correspondante du Quotidien du Peuple