La Cour internationale de Justice (CIJ) a rejeté mardi les demandes respectives de la Croatie et de la Serbie s'accusant mutuellement de crimes de génocide durant les conflits dans les Balkans des années 1990.
Au titre de la procédure examinée par la Cour, la Croatie soutenait que la Serbie était responsable de violations de la Convention des Nations Unies sur le génocide pour des faits qui auraient été commis entre 1991 et 1995. Dans le même temps, la Serbie accusait la Croatie de s'être elle-même rendue coupable de violations de la Convention pour des faits qui auraient été commis en 1995 dans la République serbe de Krajina. Dans son arrêt publié mardi, cité par un communiqué de l'ONU, la CIJ a rejeté par quinze voix contre deux la demande de la Croatie et à l'unanimité la demande de la Serbie.
La Cour rappelle dans son arrêt que, le 2 juillet 1999, la République de Croatie a déposé une requête introductive d'instance contre la République fédérale de Yougoslavie au sujet d'un différend concernant des violations alléguées de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide du 9 décembre 1948. Le 18 novembre 2008, la Cour a rendu un arrêt rejetant une partie des exceptions préliminaires soulevées par la défenderesse, devenue alors la Serbie. Par la suite, la Serbie a quant à elle soumis une demande à l'encontre de la Croatie pour des allégations de crimes similaires.
Selon la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, il existe deux éléments constitutifs du génocide : l'élément matériel de l'infraction, ou ce que la Cour appelle l'actus reus, et l'intention criminelle de génocide, à savoir la mens rea. De ce fait, "l'intention de détruire, ou tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux" est la caractéristique essentielle du génocide, celle qui le distingue des autres crimes selon la Convention.
Pour condamner l'auteur d'un crime de génocide, la CIJ, dont le siège se trouve à La Haye, doit par conséquent faire la preuve, hors de tout doute raisonnable, de l'existence des deux éléments, l'actus reus et la mens rea.
Dans le cadre de la procédure, la CIJ a d'abord examiné la demande de la Croatie contre la Serbie et a été en mesure d'établir l'existence de l'actus reus. Cependant, la Cour a constaté que la mens rea faisait défaut. Du fait de l'absence d'intention de génocide, la CIJ a rejeté la demande de la Croatie dans son intégralité.
La Cour a ensuite examiné la demande de la Serbie contre la Croatie et, de façon similaire, a constaté l'élément matériel de l'infraction, mais pas l'intention criminelle. La Cour a donc également rejeté la demande de la Serbie dans son intégralité.
Dans sa décision, la Cour a cependant relevé une série de crimes commis pendant les périodes considérées, y compris des attaques généralisées contre des populations et infrastructures civiles et a réitéré sa demande aux deux parties de poursuivre leurs négociations en vue de régler le plus vite possible la question du sort des personnes disparues.
La CIJ a également encouragé les parties à poursuivre leur coopération en vue d'offrir une réparation appropriée aux victimes de ces violations, de façon à consolider la paix et la stabilité dans la région.