"Les dirigeants européens sont en état de sidération. Le rejet massif par référendum du projet des créanciers de la dette grecque les a pris par surprise et ils prennent des postures qui n'ont pas de sens", a déclaré l'eurodéputé français du Parti de Gauche Jean-Luc Mélenchon, interrogé par Xinhua, mardi, à Strasbourg, en marge de la session parlementaire où est attendu mercredi le Premier ministre grec Alexis Tsipras.
"Certains pensaient même que le référendum n'aurait pas lieu et que la brutalité des mesures feraient reculer les Grecs. D'autres ont carrément fait campagne pour le oui, n'hésitant pas à s'attaquer directement au Premier ministre Tsipras en multipliant des déclarations sur le thème 'nous préfèrerions discuter avec des technocrates'". "On peut parler d'une véritable tentative de coup d'Etat", a affirmé M. Mélenchon, fondateur en 2009 du Parti de Gauche (PG).
"L'Eurogroupe n'a plus aucun moyen de pression si ce n'est de pousser la Grèce à la banqueroute. Dans ce cas, ce sont les pays membres du mécanisme de stabilité financière, dont la France et l'Allemagne, qui devront payer. On sait pourtant comment rééchelonner la dette grecque qui pourrait même être effacée!", a estimé le leader du Parti de Gauche alors que les réunions convoquées en urgence, mardi, à Bruxelles, au plus haut niveau européen, ne montraient aucun signe de sortie de crise.
"Le scénario est exactement le même que pour Chypre. D'abord une série de pressions croissantes, puis un mémorandum d'une très grande brutalité, enfin la coupure des liquidités et un blocus financier qui plonge le pays dans une espèce d'asphyxie", a ajouté l'eurodéputé.
Après la rencontre d'urgence en tête-à-tête, lundi soir à l'Elysée, entre le président français Hollande et la chancelière allemande Angela Merkel, M. Mélenchon, candidat à l'élection présidentielle en 2012, juge encore plus sévèrement la position française. Elle "résulte des faiblesses qu'elle a déjà montrées dans le passé. Pendant longtemps, le président Hollande pensait comme beaucoup d'autres que les choses s'arrangeraient toutes seules et que la Grèce céderait", a-t-il déclaré.
L'auteur du livre "Le hareng de Bismarck, le poison allemand" n'hésite pas non plus à critiquer vertement la chancelière allemande. "Ils ont besoin d'une part d'un euro fort pour acheter à bas prix les marchandises qui viennent de l'étranger et d'autre part du versement de grosses dividendes à leurs fonds de pension dont dépendent leurs retraites. Et dans le même temps, l'Allemagne compte 13 millions de pauvres et les infrastructures sont en état de déliquescence... C'est ça, le modèle allemand, c'est une catastrophe!", assène-t-il.
Connu pour ses coups d'éclat et ses positions tranchées qui dérangent dans l'hémicycle feutré du Parlement européen, M. Mélenchon n'a pas de mots assez durs pour qualifier les socialistes français et européens et leur position sur le dossier grec : "Ils veulent faire des compromis avec le capital qui, lui, ne veut pas en faire parce qu'il s'est trans-nationalisé. Ils prétendent corriger les inégalités dans la société en partageant ce qu'ils appellent les fruits de la croissance".
"Cette attitude est absolument anti-écologique puisque elle suppose que la réserve des richesses est infinie. La Chine, elle, a compris que l'horizon de l'éco-socialisme est incontournable pour tout être humain", a encore déclaré l'eurodéputé qui ne cache pas son intérêt de très longue date pour la Chine.
Concernant les conséquences de la crise grecque à l'échelle internationale, M. Mélenchon estime par ailleurs que "l'on pourrait assister à un mouvement où ceux qui possèdent des euros cherchent à s'en défaire au profit d'une monnaie plus stable". "Cette situation fortifie la volonté des BRICS -Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud - de constituer une monnaie et d'une banque d'investissement qui leur soient communes", note le parlementaire.