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Corée du Sud : le déploiement du THAAD sert des buts électoraux

Xinhua | 15.07.2016 08h17

La décision des autorités sud-coréennes d'autoriser le déploiement sur leur sol du bouclier anti-missile américain THAAD pourrait permettre au gouvernement conservateur de Park Geun-hye de jouer sur la carte sécuritaire auprès des électeurs, alors que le Parlement est passé à gauche en avril dernier.

L'actuelle administration "a peut-être bien considéré la question THAAD sous l'angle de la fin du mandat" de Mme Park, a estimé Kim Yong-hyun, professeur d'études nord-coréennes à l'Université Dongguk. Depuis trois mois en effet, la présidente doit composer avec une Assemblée nationale dominée par les formations de centre-gauche (Minjoo et Parti du peuple) et ceci jusqu'à la prochaine présidentielle prévue en décembre 2017.

Lors d'un forum organisé mercredi par l'organisation civique Solidarité populaire pour une démocratie participative (PSPD), M. Kim a jugé que Mme Park avait utilisé la carte THAAD pour des raisons électoralistes.

Lorsque les tensions montent dans la péninsule coréenne, les Sud-Coréens ont tendance à voter pour les candidats conservateurs. Le déploiement du THAAD a engendré des peurs irraisonnées dans l'opinion publique en vertu desquelles le territoire ne saurait être protégé sans le bouclier anti-missile américain.

Séoul et Washington ont annoncé le 8 juillet dernier leur décision de déployer le THAAD d'ici la fin de l'année prochaine. Il a été ensuite précisé qu'il serait installé dans la région de Seongju, à 300km au sud-est de la capitale Séoul.

Le parti Saenuri (Nouvelle frontière) de Mme Park a enregistré une défaite surprise lors des législatives du 13 avril dernier, dans un contexte de chômage en hausse chez les jeunes diplômés, d'écart entre les riches et les pauvres et entre les salariés à temps plein et temps partiel.

Depuis cette date, la cote de popularité de la présidente n'a cessé de chuter. Selon l'institut de sondage Realmeter, le taux de confiance n'était que de 33,1% début juillet.

Pour regagner du terrain au sein de son électorat, Mme Park a donc cherché à orienter l'attention de l'opinion vers les questions sécuritaires, annonçant à la hâte le déploiement du THAAD. On s'attend à ce qu'elle joue à fond la carte du THAAD pour resserrer les rangs conservateurs, selon M. Kim.

Pourtant, il ne sera guère aisé pour Mme Park d'acquérir davantage de soutien après la décision d'installer le système anti-missiles dans la province de Gyeongsang du Nord (sud-est), dont elle est originaire.

Cette décision a en effet provoqué la colère d'habitants de la région, dont certains ont écrit des lettres enflammées pour exprimer leur forte opposition au déploiement du système THAAD, dont le radar à bande X émettra des micro-ondes très puissantes nuisibles aux organismes.

Selon un sondage mené en février dernier par Realmeter, l'opinion publique sud-coréenne est partagée quant au déploiement du système THAAD : 49,4% pour et 42,3% contre. Mais ce résultat pourra changer si ce déploiement porte atteinte aux relations avec la Chine, notamment économiques.

Le 8 juillet, date à laquelle Séoul et Washington ont annoncé la décision de déployer le système THAAD, le cours des actions d'entreprises sud-coréennes qui dépendent largement du marché et des touristes chinois a fortement chuté. En une seule journée, la valeur boursière de compagnies de produits cosmétiques et de voyagistes a perdu plus de trois billions de wons (2,6 milliards de dollars).

Cheong Seong-chang, chercheur principal à l'Institut privé Sejong, a déclaré la semaine dernière que la décision sur le THAAD provoquerait une baisse du nombre de touristes chinois en Corée du Sud, un refroidissement de la popularité de la soi-disant Vague coréenne et le boycott possible de produits sud-coréens en Chine.

Lotte Duty Free, le plus grand opérateur d'enseignes duty-free en Corée du Sud, a généré 70% de ses revenus auprès de touristes chinois au premier semestre 2016, selon l'agence de presse Yonhap. Le pourcentage était passé de 59% en 2014 à 62% l'an passé.

Moon Jae-in, ancien leader du parti Minjoo et candidat à l'élection présidentielle de 2012, a indiqué mercredi sur son compte Facebook que le déploiement du THAAD était une décision qui apportera plus d'inconvénients que d'avantages du point de vue des intérêts nationaux. Il a réclamé que cette question soit réexaminée et qu'un débat public s'ouvre.

Selon M. Moon, cette question, mal gérée par le gouvernement, a créé une crise et le soutien de l'administration Park au système THAAD met en danger la coordination internationale visant à régler le problème nucléaire de la péninsule coréenne.

(Rédacteurs :Qian HE, Guangqi CUI)
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