Dernière mise à jour à 09h36 le 07/07
Le dernier rapport de l'ONUSIDA sur le Sida révèle des réussites dans la réduction de nouvelles infections et dans la réalisation de l'objectif ambitieux 90-90-90, mais montre également des échecs, et cela indique que la tâche est encore loin d'être achevée, a déclaré la directrice exécutive de l'ONUSIDA, Winnie Byanyima, dans une interview accordée récemment à Xinhua.
Selon le Rapport mondial 2020 de l'ONUSIDA publié lundi, des progrès significatifs ont été faits dans le monde entier pour "accélérer le déploiement des services de lutte contre le VIH", suite à la décision de l'Assemblée générale des Nations Unies il y a quatre ans de mettre un terme au Sida d'ici 2030. Toutefois, "aucun des objectifs mondiaux fixés pour 2020" par rapport à la campagne visant à mettre fin au Sida "ne sera atteint", et cela est dû au "trop peu de ressources" investies et à la pandémie de COVID-19 en cours.
C'est pour cela que nous l'avons intitulé [le rapport] "Agissons maintenant", a déclaré la directrice exécutive de l'ONUSIDA. "Notre progression vers la fin du Sida, en tant que menace à la santé publique, d'ici 2030, était déjà lente avant l'épidémie de COVID-19", a-t-elle prévenu dans le rapport, "maintenant cette crise risque potentiellement de nous faire perdre encore plus de terrain".
Selon Mme Byanyima, à ce jour, encore 38 millions de personnes dans le monde, dont une grande partie constituée de jeunes, sont atteintes par le VIH et, de tous ceux-ci, 25,4 millions sont sous traitement. Cela signifie que 4,6 millions attendent encore d'accéder aux soins. "L'année dernière, nous avons encore enregistré à un nombre élevé de décès, autour de 690.000 personnes, dus à des pathologies liées au Sida, ce qui est largement supérieur à l'objectif de 500.000 décès de 2010. C'est inacceptable!" a-t-elle souligné.
"Toutefois, nous voyons que certains pays, dotés de la volonté politique d'investir des ressources dans ce secteur, ont diminué le nombre de décès", a-t-elle fait remarquer. L'Afrique du Sud, par exemple, a diminué le taux de mortalité de 53% en 10 ans, alors que la moyenne mondiale s'élève à 23%. "Si un pays peut le faire, nous pouvons le faire dans d'autres pays également", a-t-elle ajouté.
Mme Byanyima a souligné que les décès se vérifient principalement dans des populations clé, qui comprennent des groupes vulnérables comme les personnes LGBT, les travailleurs du sexe, et les personnes consommatrices de drogues, qui se trouvent en marge de la société et qui voient leurs droits violés. "C'est pour cela que nous assistons à davantage de décès en Afrique centrale et méridionale".
Elle a confirmé que l'ONUSIDA est en train d'établir une nouvelle stratégie et que l'année prochaine elle présentera à l'Assemblée Générale des Nations Unies une résolution visant à adopter de nouveaux objectifs plus ambitieux.
Actuellement, l'ONUSIDA possède une série d'objectifs qui visent à mettre fin à l'épidémie de Sida d'ici 2030. Ils incluent : faire connaître à 90% des personnes atteintes par le VIH leur statut sérologique, d'ici 2020 ; fournir à 90% des personnes auxquelles une infection de VIH a été diagnostiquée un traitement antirétroviral durable, d'ici 2020 ; éliminer le virus chez 90% des personnes ayant suivi un traitement antirétroviral, d'ici 2020.
Puisque les deux tiers de la population atteinte par le VIH se trouvent en Afrique, Mme Byanyima a spécifié les zones qui nécessitent de faire des progrès dans le continent, tels que diminuer la vulnérabilité des femmes et des filles.
"Il s'agit d'affronter ces barrières structurelles, les inégalités qui sont à la base de la vulnérabilité élevée des femmes et des filles, par exemple en continuant à les scolariser, en leur donnant accès à la santé et aux droits en matière de sexualité et de procréation, ainsi qu'à une éducation complète à la sexualité".
Par rapport aux progrès réalisés en Afrique, la directrice exécutive de l'ONUSIDA a attiré l'attention sur la contribution de la Chine dans le soutien au renforcement des capacités sanitaires en Afrique, notamment lors du combat contre le Sida.
"La Chine entretient une relation forte avec l'Afrique, qui a existé pendant de nombreuses années. Nous voyons la Chine aider les pays africains à renforcer leurs systèmes sanitaires ; nous voyons la Chine soutenir le nouveau Centre africain pour le contrôle et la prévention des maladies, un centre très important pour toute la région. La Chine aide également à combattre les épidémies, en particulier celles de VIH et de COVID-19. Par conséquent, il s'agit d'une relation importante", a-t-elle indiqué.
Elle a ajouté que l'ONUSIDA entretient de bonnes relations avec le gouvernement chinois, précisant : "Tous les ans, nous amenons des équipes techniques en Chine pour avoir des échanges avec les scientifiques, les techniciens et d'autres professionnels chinois, afin de partager les connaissances qui peuvent servir au renforcement des capacités en Afrique. C'est un très bon soutien. La Chine a également présidé un Conseil de l'ONUSIDA l'année dernière, nous donnant une direction stratégique et fournissant son soutien".
"Une chose que nous avons appris de la crise de COVID-19 est que personne n'est en sécurité tant que tout le monde ne l'est pas. Nous avons besoin du système multilatéral", a poursuivi Mme Byanyima, "La Chine est une grande défenseure du système multilatéral. Par rapport à la question sanitaire, nous continuons à apprécier le soutien de la Chine à travers les Nations Unies, et nous en sommes reconnaissants".
Elle a encouragé chaque gouvernement à considérer les questions sanitaires comme des questions globales, et à ne pas se focaliser sur soi-même pour trouver des solutions individuelles. "La Chine a déclaré qu'un vaccin constitue un bien public mondial. Nous voulons encourager la Chine à maintenir cette position. Et si elle devait disposer d'un vaccin, à le rendre disponible en tant que bien public mondial", a-t-elle conclu.