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France : le président d'une commission d'enquête parlementaire dénonce les ingérences américaines

Xinhua | 12.06.2023 09h03

Lancée il y a quelques mois à l'initiative du Rassemblement national (RN), premier groupe d'opposition de l'Assemblée nationale française, la commission d'enquête parlementaire sur les ingérences étrangères a rendu public son rapport jeudi, dans l'avant-propos duquel le président de la commission, le député du RN Jean-Philippe Tanguy, a fait une récapitulation des ingérences américaines dénoncées à travers de nombreuses auditions.

GRAVES INGERENCES D'UNE PUISSANCE ALLIEE

Le RN avait demandé l'ouverture d'une commission d'enquête espérant en profiter pour mettre fin aux soupçons de ses liens avec la Russie. Pourtant, le rapport rédigé par la députée Renaissance Constance Le Grip a qualifié le parti de Jean-Philippe Tanguy de "courroie de transmission" de Moscou, une accusation dénoncée par ce dernier. Il a également déploré "le choix de la rapporteure de fausser, de minimiser et de tronquer nos travaux sur les Etats-Unis (qui) est parfaitement intolérable et doit être dénoncé comme tel".

"Les ingérences d'une puissance alliée (Etats-Unis)", écrit M. Tanguy dans son avant-propos, sont tout de même "graves puisqu'elles visent à fausser le jugement de nos concitoyens, influencer nos lois ou tirer profit de notre économie".

Pour le député du RN, les ingérences américaines n'étaient pas du tout "à la lisière de nos travaux" menés par les auditions comme l'a affirmé Mme Le Grip. Elles touchent les domaines de l'économie, de la défense, et encore du numérique français par le bias de "plusieurs lois américaines (qui) permettent à l'autorité judiciaire de s'immiscer dans des affaires qui auraient pu relever de la compétence de juridictions françaises".

A cet égard, le président de la commission a cité Bernard Emié, directeur général de la sécurité extérieure (DGSE), auditionné en huis clos, "il ne faut pas non plus être naïf sur les actions hostiles conduites par des pays amis", mais aussi les propos prononcés à huis clos du directeur national du renseignement et des enquêtes douanières (DNRED), Florian Colas, "les Etats-Unis ont (...) une logique de projection de puissance (...) par l'application extraterritoriale de leur droit".

EXTERRITORIALITE DENONCEE A TRAVERS LES AUDITIONS

La liste des personnes auditionnées comprenait des personnalités politiques de premier plan, qui face à leurs interlocuteurs de la commission d'enquête, ont mis l'accent sur les ingérences américaines contre la France.

L'ancien Premier ministre François Fillon a certifié sous serment que les seules ingérences étrangères qu'il avait constatées à Matignon émanaient "d'un pays ami et allié qui s'appelle les Etats-Unis". Il a rappelé qu'il avait durant son quinquennat été "écouté avec le président Sarkozy pendant cinq ans par la NSA", une agence de renseignements américaine. Et comme "ça vient de nos amis américains, donc c'est dans la nature des choses", a-t-il déploré.

Arnaud Montebourg, ex-ministre du Redressement productif, est en particulier revenu sur l'affaire Alstom, concernant le rachat du fleuron français par General Electric, considéré comme un scandale d'Etat et impliquant des enjeux de souveraineté industrielle. "Si nous ne faisons rien nous finirons coupés en rondelles, et dans peu de temps car tout cela va très vite", a-t-il alerté, tout en dénonçant les méthodes américaines en la matière. "C'est une stratégie : de grandes entreprises américaines travaillent avec le gouvernement des Etats-Unis qui utilise le bras armé de la justice, lequel exploite les ressources d'agences de renseignement créées pour lutter contre le terrorisme".

Michel Sapin, plusieurs fois ministre, a quant à lui indiqué qu'un responsable du ministère américain de la Justice prétendait "faire le travail à sa place" en France contre la corruption puis, une fois les modifications législatives faites en France selon les critères américains, le même responsable lui aurait répondu "maintenant, tu fais le travail toi-même".

C'était précisément en applicant le fameux Foreign Corrupt Practices Act (FCPA) que les Etats-Unis avaient retenu Frédéric Pierucci, cadre dirigeant d'Alstom, pour faire pression sur la direction d'Alstom afin qu'ils cèdent cette entreprise stratégique à General Electric. Un "quasi-otage", dénonce Jean-Philippe Tanguy en s'appuyant sur les propos d'Arnaud Montebourg. Un scandale qui figurait parmi de multiples "affaires (qui) traduisent très clairement une ingérence du droit américain en direction des entreprises françaises", a estimé lors de son audition Jean-François Bohnert, procureur financier de la République, qui a réalisé l'essentiel de son exposé préliminaire sur les ingérences américaines.

(Rédacteurs :Ying Xie, Yishuang Liu)
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