Le géant de l'immobilier Pan Shiyi pose avec sa statue en cire lors de la cérémonie d'ouverture du Musée de cire Madame Tussauds, le 16 avril, à Beijing, en Chine. [Photo/Xinhua] |
Ce n'est pas un secret que les Chinois ont une passion pour Harvard. Les grandes intelligences sont naturellement attirées vers les universités d'élites tout comme la force physique va vers les meilleurs sports. Les tours d'ivoire commencent désormais à acclamer les candidats chinois excellents d'une manière sans précédent à l'échelle dans l'histoire. Harvard est ainsi devenu de facto une sorte d'avant-poste chinois.
Ce n'est pas un cas isolé. Que ce soit les Universités de Californie, de Berkeley et de Yale aux Etats-Unis, ou l'Université de Cambridge en Grande-Bretagne, les écoles de premier niveau sont pleines de Chinois prodigieux ou s'engagent dans des recherches et la diplomatie culturelle concernant la Chine. C'est une bonne chose pour les élites chinoises mais il y a aussi un aspect sombre – la fuite des talents.
La dernière preuve est une donation de 15 millions de dollars faite par le couple de millionnaires Pan Shiyi et Zhang Xin pour établir une "bourse d'études Soho China". Bien que cela n'ait aucun intérêt médiatique puisque de telles donations chinoises sont plus ou moins communes à Harvard, le cas a provoqué en particulier l'indignation (ou est-ce une campagne de publicité bien organisée ?) sur les réseaux sociaux chinois.
En tant que gens d'affaires, Pan et Zhang espèrent sans aucun doute une certaine forme de récompense pour leur "investissement" en plus du nom de Soho et du patronage, probablement faire recruter un de leurs proches à Harvard (un membre de la famille, un parent, un ami ou plusieurs amis ?). La plupart des commentateurs chinois n'auraient aucun problème à cela, car s'occuper de la famille ou des amis est traditionnel dans la société chinoise. En fait, la majorité de ceux qui critiques feraient sans doute la même chose s'ils en avaient les moyens financiers. Leur principale préoccupation, cependant, est celle-ci : pourquoi n'investissent-ils pas dans l'éducation en Chine ?
Les étudiants chinois (avec les autres originaires de l'Asie de l'Est comme les Singapouriens, Japonais, Sud-Coréens) ont des compétences supérieures en mathématiques, lecture et sciences. C'est un fait évident. Personne ne vit plus dans le noir. Même une étude des Nations-Unies du programme de l'OECD sur l'évaluation des étudiants internationaux confirme que les étudiants de Shanghai, Macao, Hong Kong et Taiwan sont les meilleurs du monde. Pourquoi leurs universités ne le sont pas, alors ?
Beijing, dans le même temps, travaille dur pour renverser la situation de fuite des talents et de ses effets relatifs. L'Université Tsinghua, par exemple a attiré 300 millions de dollars de donation du groupe Schwarzman dans le cadre de son initiative visant à former les "futurs dirigeants du monde". Ne voulant pas rester derrière Tsinghua, l'Université de Beijing a annoncé l'établissement de son propre programme "futurs dirigeants du monde" – l'Académie de Yenching.
La Chine a besoin, la Chine mérite son propre Harvard, et au plus vite. C'est tout à fait concevable, précisément parce que les étudiants chinois ont de l'élan et un avantage concurrentiel (qui les pousse actuellement à réussir partout dans le monde). Mais tant que les élites en Chine ne croiront pas en leur propre civilisation et préfèreront investir dans l'éducation d'ailleurs, rien de moins qu'un miracle sera nécessaire pour réveiller un milliard de personnes et cette nation si fière de son sommeil historique profond.