Trente-six ans après l'ouverture de la Chine, la première génération de nouveaux riches est en train de passer le relais à ses enfants. Comment ces jeunes nés avec une cuillère d'argent dans la bouche gèrent-ils la fortune léguée par leurs parents ?
"Certains se livrent aux plaisirs : vin, voitures de luxe et boîtes de nuit", déplore Zeng Xianzhang, membre du conseil d'administration de Give2Asia (organisation philanthropique américaine). Face à cette situation, il propose la mise en place d'un "écosystème" permettant à la deuxième génération de riches chinois de soutenir de manière efficace et durable le développement social du pays et de contribuer à la gloire familiale.
Il s'est exprimé en ce sens lors d'un forum annuel des fondations privées de Chine organisé les 8 et 9 décembre dans la capitale chinoise. L'un des principaux sujets de cette édition était l'héritage de la fortune familiale.
Il est difficile de trouver des interlocuteurs, indique Xu Yongguang, président du conseil d'administration de la Fondation privée Nandu, "en Chine, le concept de philanthropie familiale n'a pas une bonne image chez les personnes ordinaires comme chez les riches."
Le milliardaire Lu Dezhi, président du conseil d'administration de la Fondation philanthropique Huamin, constate que la haine envers les riches, mode de pensée hérité de l'histoire féodale de la Chine, est encore populaire de nos jours, dans un contexte de fossé croissant entre riches et pauvres.
"Si les riches ne créent pas de fondations privées, personne ne sait qu'ils sont riches. Cependant, une fois créée, une fondation est exposée à la supervision du public, et la fortune familiale au regard du public", estime M. Lu, qui a investi 50 millions de yuans dans sa fondation.
Toutefois, il a appelé les riches chinois à se lancer dans le secteur philanthropique pour le bien-être de la société et la longévité de leur famille. "Ces personnes doivent prendre leurs responsabilités, au lieu d'émigrer aux Etats-Unis", déclare-t-il.
Au cours des 30 prochaines années, la philanthropie familiale deviendra une force sociale que la Chine aura besoin de cultiver, note M. Lu.
Aux yeux de Xu Yongguang, Internet est aujourd'hui devenu un moyen efficace pour résoudre le problème de l'aide d'urgence à apporter à certaines personnes dans le pays. Dans ce contexte, les fondations familiales ne doivent pas toutes réaliser des contributions similaires (dons de nourritures ou de vêtements, par exemple), mais plutôt investir dans des projets innovants et prometteurs du secteur philanthropique, afin de stimuler la dynamique de l'ensemble du secteur.
Zeng Xianzhang insiste sur la théorie de l'"écosystème", citant notamment un exemple concret. Né en 1948 dans la province du Sichuan et après une longue carrière dans la Silicon Valley, M. Zeng a participé il y a dix ans à la création du "projet de berceau" à Zhongguancun, aujourd'hui l'équivalent chinois de la Silicon Valley.
Le projet de berceau a sélectionné chaque année, à travers un concours féroce, de jeunes entrepreneurs de moins de 35 ans et leur a assigné un mentor issu de l'élite du secteur commercial, afin de les aider à bâtir leurs propres empires économiques.
"La philanthropie familiale a besoin de ce genre d'écosystème pour montrer aux jeunes riches comment agir dans ce secteur", a-t-il expliqué, "Ces jeunes riches disposent de davantage de ressources, d'un bon réseau social et d'une bonne éducation. S'ils se tournent vers le développement social, ils apporteront des contributions considérables."