Les pays africains doivent prendre des décisions selon leur propre jugement
Il est certain que l'Afrique doit compter sur leurs propres forces pour se développer. Cette vision assez nouvelle permet d'orienter le développement des pays africains. Depuis longtemps, les théories et les pratiques sur le développement africain ont fortement été influencées par les pays développés occidentaux. Ces dernières années, la situation économique mondiale mouvementée a bouleversé les rapports des forces. D'un côté, la crise financière continue à sévir aux États-Unis et s'étend même à d'autres secteurs, tandis que l'Europe souffre de la crise de la dette. De l'autre, les pays émergents font une bonne figure, devenus une force motrice de l'économie mondiale. Ces mutations ont permis aux dirigeants et intellectuels africains de se rendre compte que le modèle préconisé par les Occidentaux comporte de nombreuses failles. Les Africains eux-mêmes doivent décider de la voie de développement social et économique à suivre.
Ce choix autonome d'une voie de développement adaptée se généralise parmi les dirigeants africains. Le Zimbabwe, la Tanzanie, le Kenya, la Namibie et l'Afrique du Sud ont proposé successivement de « s'aligner sur l'Orient ». Selon le président tanzanien, Jakaya Kikwete, « la Chine, autrefois l'un des pays les plus pauvres du monde, est devenue une puissance économique sur le devant de la scène mondiale. En tant que modèle de transformation, ce pays ravive l'espoir des pays africains, leur démontrant qu'il existe une possibilité de se débarrasser de la pauvreté et de s'engager sur la voie du développement. Par des politiques et des actions seyantes, nous pourrons nous aussi, un jour, devenir de grandes nations. » Cette conscience et connaissance de soi en lesquelles croit l'Afrique sont en train de devenir des principes directeurs du développement africain.
Au cours de sa visite au Nigeria, les 9 et 10 septembre 2012, le président rwandais Paul Kagame a souligné deux points importants lors de la conférence qu'il a donnée au sujet du développement africain. Premièrement, l'Afrique doit s'allier pour accroître sa compétitivité globale. Deuxièmement, c'est à l'heure où les Africains mèneront une vie décente et prendront en main le processus de leur développement que l'Afrique pourra atteindre l'objectif ci-dessus. Il a bien pris conscience que les dirigeants d'un type nouveau sont cruciaux à la stabilité sociale et au développement économique continu en Afrique. « Ces nouveaux leaders réformateurs vont conduire l'Afrique vers la prospérité et mettre en évidence la place qui lui revient. Ils doivent se montrer confiants, fermes, courageux, créatifs, ambitieux et déterminés à protéger les intérêts des peuples africains. » Il importe d'autant plus que ces nouveaux dirigeants trouvent des moyens de faire face aux défis découlant de l'idéologie et des pratiques dans leur pays. Cette idée est aussi partagée par d'autres chefs africains comme Meles Zenawi, l'ex-premier ministre éthiopien décédé récemment, et le président angolais José Eduardo dos Santos.
Cette théorie du développement endogène née en Afrique est aujourd'hui soutenue par tous et se manifeste également à travers les activités économiques sur le continent. Certains pays africains se sont unis autour d'un nouveau partenariat. Le Nigeria vient de décider d'investir 2 milliards de dollars dans la construction de la plus grande usine d'engrais sur le continent, qui fournira 10 000 emplois à la population et exportera ses produits vers les autres pays africains. En outre, le Nigeria a choisi d'utiliser 10 % de ses réserves de changes pour acheter des renminbi (monnaie chinoise) et d'instaurer des cours de chinois dans toutes les écoles publiques de Lagos. Ces décisions, prises après considération de la tendance mondiale du développement, constituent des choix stratégiques et autonomes.