Des experts marocains se sont retrouvés lundi et mardi, à Skhirate (région de Rabat), pour discuter de l'éventualité d'instaurer un nouveau système fiscal adapté au contexte et aux particularités du Maroc.
Cette rencontre intervient 13 ans après la 1ère grande réflexion sur le système fiscal marocain, enclenchée par la tenue en 1999 des 1ères Assises nationales sur la fiscalité et qui a conditionné en grande partie l'évolution de ce système depuis cette date.
L'enjeu est crucial: Répondre aux attentes des acteurs économiques mais aussi remédier à la situation difficile du pays au niveau fiscal. Le système fiscal actuel ne permet de financer que 60% des dépenses de l'Etat.
De même, 85% de l'impôt sur les sociétés sont dus aux contributions de seulement 2% des entreprises, 75% de l'impôt sur les revenus proviennent des salaires et une entreprise sur deux déclare un déficit permanent et structurel.
Pour le chef du gouvernement marocain, Abdelilah Benkirane, il est grand temps de s'attaquer aux exonérations fiscales qui grignotent 36 milliards de DH, soit 4% du PIB. L'enjeu est de taille d'autant plus que trois secteurs avalent à eux seuls plus de 70% du total des dépenses fiscales.
En attendant la réforme, M. Benkirane a annoncé quelques mesures attendues des opérateurs économiques: La titrisation du butoir de la TVA (Taxe sur la valeur ajoutée) avant la fin de l'année, la réduction des pouvoirs discrétionnaires de l'administration fiscale et une lutte sans merci contre l'informel, condition sine qua non pour cultiver le civisme fiscal.
Pour sa part, le ministre marocain de l'Economie et des finances, Nizar Baraka, a aussi annoncé une possible transformation des arriérés de la TVA sous forme de titres négociables, ce qui va permettre d'injecter 13 milliards de dirhams à l'économie marocaine. M. Baraka a appelé à scruter d'autres voies et prévoir de nouveaux mécanismes devant permettre d'améliorer le régime fiscal et consacrer la culture du civisme fiscal.
"Nous sommes appelés à corriger les disfonctionnements du régime fiscale, à penser à scruter d'autres voies et à prévoir d'autres mécanismes devant permettre d'améliorer notre régime fiscale, notamment en ce qui concerne la consécration d'une culture du civisme fiscal et l'instauration d'une administration fiscale juste et équitable", a souligné l'argentier du royaume.
Par ailleurs, l'ensemble des intervenants ont été unanimes à souligner que le système fiscal marocain est inéquitable. Une situation d'iniquité qui ne peut pas assurer au pays la sécurité financière et budgétaire et ne sert pas le principe de l'équité fiscale.
Dans leurs recommandations, les participants ont jugé impératif l'élaboration d'une étude approfondie du cadre marocain, en vue d' une meilleure régulation du régime qui ne peut être calqué sur des modèles occidentaux, mêmes les plus rigoureux.
Ils ont également appelé à la constitution de comités mixtes entre les directions du trésor et des impôts, afin de hausser le niveau de coordination entre les deux instances et de doter davantage le régime fiscal de cohérence et d'homogénéité.
En outre, les spécialistes ont suggéré l'instauration d'un impôt sur les grandes fortunes et les héritages, de manière à permettre aux assujettis à cet impôt de contribuer aux recettes fiscales, ainsi que de revoir le barème des impôts en vigueur, en particulier l'impôt sur les sociétés (IS) et celui sur les revenus (IR). Les recommandations ont porté également sur la constitution d'un conseil national pour l'impôt, dans le but d'étudier en profondeur les points forts et les enjeux du régime sur l'échelle nationale.