La campagne électorale pour les présidentielles, prévues le 17 avril, en Algérie, vient de boucler, non sans encombre, sa deuxième et avant-dernière semaine. Cette étape a été entachée par des actes de violence et des cas d'irrégularités.
L'événement le plus "dangereux" jamais enregistré sur le territoire national lors de ce rendez-vous électoral est celui qui s'est produit samedi dans la ville de Béjaïa (240 km à l'est d'Alger), lorsque le directeur de campagne du président sortant Abdelaziz Bouteflika, en l'occurrence l'ancien Premier ministre Abdelmalek Sellal, a été contraint d'annuler son meeting après que des manifestants en furie se sont opposés à la tenue de la réunion publique prévue dans la maison de la culture Taous Amrouche.
Outre l'annulation de la réunion, des dizaines de blessés ont été enregistrés parmi les policiers antiémeutes dépêchés sur les lieux, les manifestants et les journalistes, ainsi que des dégâts matériels causés notamment à la maison de la culture devant abriter le meeting, laquelle a été saccagée et brûlée en partie.
Dans un communiqué, la direction de la campagne de M. Bouteflika a accusé des «groupuscules fascistes", qui ont appelé au boycott des élections, d'être derrière ce dérapage. Elle a accusé le Mouvement pour l'Autonomie de la Kabylie (MAK, mouvement séparatiste connu de la région de Kabylie) ainsi que le mouvement «Barakat ! (ça suffit)" né quelques jours avant le lancement de la campagne électorale (23 mars), qui a fait de son opposition à la candidature de M. Bouteflika son crédo.
Barakat ! qui a réfuté les accusations portées contre lui, a toutefois justifié son opposition à la candidature de M. Bouteflika par le fait que ce dernier ne jouit pas de toutes ces capacités physiques pour être réélu pour une quatrième fois au poste de chef de l'Etat.
Agé de 77 ans, le président Bouteflika a été victime l'année dernière d'un accident vasculaire cérébral (AVC) qui a réduit sa mobilité, au point qu'il n'a animé aucun meeting de campagne.
Après l'incident de Béjaïa, la Commission nationale indépendante de surveillance de l'élection présidentielle (CNISEL, composée de magistrats) a saisi le parquet pour prendre les mesures prévues par la loi, une fois qu'elle a statué sur les faits et conclu qu'il s'agit d'«une infraction au code pénal".
Evoquant d'autres irrégularités, le président de la CNISEL, Fateh Boutbik a, lors d'une conférence de presse, souligné que la Commission «est destinataire de deux à trois recours par jour, dénonçant pour leur majorité le parti pris de certains médias pour un candidat donné, ou une protection sécuritaire défaillante tant pour les candidats que pour leurs représentants, ainsi que l'affichage anarchique".
Par ailleurs, la Commission «a saisi le Premier ministre par intérim au sujet de plaintes faisant état d'utilisation de moyens et de cadres de l'Etat lors de la campagne électorale, et a reçu en réponse un rappel des lois régissant ce volet, lesquelles consacrent la neutralité de l'Administration", a fait savoir le responsable de la Commission.
Enfin, le président de la CNISEL a précisé que ladite Commission a statué sur 61 des 70 recours dont elle a été destinataire depuis le début de la campagne électorale (23 mars), le reste faisant toujours l'objet d'examen.
Pour les présidentielles, six candidats, dont le président Bouteflika et un de ses anciens chefs du gouvernement Ali Benflis sont entrés le 23 mars en campagne électorale, laquelle se poursuivra jusqu'au 13 avril. Ils tenteront de convaincre les 23 millions d'électeurs de voter pour eux.
Outre MM. Bouteflika et Benflis, les quatre autres candidats à la magistrature suprême du pays sont la Secrétaire générale du Parti des Travailleurs (PT) Louisa Hanoune, le président du Front national algérien (FNA) Moussa Touati, le chef du parti AHD 54, Ali Fawzi Rebaine, et le leader du Front El Moustakbel (FM), Abdelaziz Belaïd.