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Un artiste français rend hommage aux victimes du massacre de Nanjing en faisant don d'une peinture

Xinhua | 31.08.2015 08h33

Pour le 70ème anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale, un artiste français Christian Poirot a peint un tableau émouvant pour commémorer le massacre de Nanjing et il en fera don au Mémorial Hall à Nanjing, Chine, en décembre.

Intitulée "Délivrance", la peinture offre des dimensions impressionnantes : 2,35 mètres de haut, 7,46 mètres de large et c'est le plus grand tableau que Poirot ait jamais réalisé.

Il représente de nombreuses scènes de violence qui ont eu lieu lors du massacre de 1937, confrontant les spectateurs à l'épreuve sanglante subie par les victimes. Pendant plus de six semaines, du 13 décembre 1937 au janvier 1938, le massacre de Nanjing a vu la mort de plus de 300.000 civils chinois des mains des envahisseurs japonais.

Poirot a expliqué à XINHUA les raisons pour lesquelles il a réalisé ce tableau "Pour que le monde entier puisse voir l'oeuvre peint avec les yeux d'un européen, l'horreur infligé à des innocents et sacrifié au nom d'une idéologie fasciste nippone!"

Il y a deux ans, alors que le peintre vivait en Chine et travaillait sur des peintures de paysage, il a été frappé par une émission à la télévision. Étonné, il a vu le Premier ministre japonais Shinzo Abe visiter le mémorial de Yasukuni pour rendre hommage aux personnes tuées au service de l'empire japonais.

"Il a visité les samouraïs oui, mais aussi des criminels de guerre. Quand j'ai vu ça, j'ai explosé," s' est exclamé Poirot.

Peu de temps après, des amis chinois l'ont invité à visiter le Memorial Hall Nanjing où il a été profondément ému par l'hommage rendu aux victimes du massacre. De retour chez lui, il a commencé à lire des livres écrits par les historiens chinois, afin de bien connaître l'histoire de cette tragédie et ses détails. Très vite, il a senti le besoin d'agir.

"J'ai dit, pour ce peuple qui m'accueille toujours très gentiment, je vais faire un tableau."

En janvier 2015, il s' est mis au travail. Chaque matin, il se réveillait et lisait sur le massacre de Nanjing pour rester connecté à la réalité de ce qui était arrivé, avant d'entrer dans son atelier pour peindre.

Travaillant principalement avec une spatule, Poirot a peint ses personnages dans un style non réaliste, mais qui est profondément expressif. Les formes des personnages sont fragmentées, montrant des images dans les images et en révélant de multiples couches à chaque scène.

Quand il a finalement dévoilé sa toile, Poirot a affirmé à Xinhua que cela avait été une période où il a travaillé tous les jours avec la même douleur que les personnages de sa peinture avaient vécue et donc faire don de cette peinture était aussi une forme de délivrance pour lui. "Il faut s'interroger au fond du soi pour faire la peinture," a-t-il expliqué.

Pour le peintre français, d'autres représentations du massacre, en particulier parmi ses pairs chinois, sont trop réservées, montrant souvent des morts, mais de manière sobre et distante. Il a choisi donc une perspective différente, et a décidé de montrer les victimes de Nanjing en train d' être tuées, au lieu de les représenter déjà mortes.

Je suis un artiste français ayant étudié par la connaissance discursive qui s'acquiert par l'étude et le raisonnement.Sagissant d'une scène de massacre, mes personnages revêtent plusieurs sentiments tel la douleur , la peur l'angoisse, l'horreur et l'effroi," a-t-il continué.

La peinture qu'il a créée est remplie d'images sombres, turbulentes, et fragmentées dépeignant des dizaines de scènes du massacre. Sur la toile, les spectateurs voient des soldats japonais tuant des civils pour le sport et le divertissement, tandis que les enfants orphelins regardent avec peur après avoir perdu leurs familles.

"Avec mon tableau, je pense qu'on voit des scènes, on voit la douleur, tous ces sentiments de peur, de haine, d'angoisse," a expliqué Poirot.

L' artiste a pourtant découvert ses propres limites, réalisant qu'il ne pouvait pas représenter certains des actes les plus violents enregistrés dans les annales historiques du massacre. Au lieu de cela, il a peint des colombes quittant les corps des victimes, comme un symbole de paix et de vie.

"C' est comme ils disent, vous pouvez prendre mon corps, mais jamais mon âme!" a-t-il déclaré.

Il a expliqué qu'il avait d'abord voulu peindre les colombes formant au ciel une carte de la Chine, mais que le format de la peinture l' avait rendu impossible, et il espère que les spectateurs pourront imaginer ce qu'il n'avait pas pu inclure dans la toile.

"Un tableau, d'abord, c'est toujours la joie des yeux qui attire, après la joie de l'esprit qui captive, et après il y a la joie de cœur qui retient le travail," a déclaré l' artiste.

La décision de faire don de la peinture était évidente pour Poirot. Même si elle peut facilement être évaluée à 300.000 euros ou plus, la peinture représente un geste d'amitié envers la Chine.

"Le don c'est tout simplement parce que j'ai appris à connaître le peuple chinois, qui m'a touché par sa gentillesse," a-t-il affirmé. Emu par les personnes qui l'avaient accueilli lors de ses voyages à travers la Chine, il a estimé qu'un tel geste était la manière la plus forte de démontrer son appréciation.

Le peintre français n'a pas toujours eu de relation avec la Chine. Ce fut seulement en 2009 quand un ami l'a invité à visiter la Chine que Poirot a connu l'hospitalité et la culture chinoise. Depuis ce moment, il y est retourné au moins neuf fois, et ses peintures souvent joyeuses sont des représentations des paysages urbains de la Chine. En effet, les images macabres de "Délivrance" diffèrent de son travail habituel, qui est lumineux, coloré, et suggère le bonheur.

Selon le peintre, "Délivrance" fera partie de la collection du Memorial Hall Nanjing, et il espère qu'un jour ce tableau sera dans l'exposition permanente pour que les visiteurs puissent voir son rendu du massacre. Poirot travaille actuellement sur de nouvelles peintures, y compris un projet de collaboration avec un peintre chinois.

Ancien employé en chimie, Poirot a commencé à peindre à l'âge de 26 ans quand un accident du travail l' a laissé invalide. Ayant d'abord étudié au niveau régional, puis au niveau national à Paris, le natif de l'Alsace a rapidement développé à la fois de la passion et de la technique. Dans sa carrière Poirot a eu beaucoup de succès, avec des prix gagnés en France et au Royaume-Uni, ainsi que des expositions dans des galeries dans plusieurs pays. Deux de ses peintures sont collectionnées par l'ancien Président français Jacques Chirac lors d' une exposition à Paris.

(Rédacteurs :Qian HE, Guangqi CUI)
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