Dernière mise à jour à 08h26 le 27/06
Pour les Etats-Unis et la Chine, 2019 aurait dû être l'année de la célébration du 40e anniversaire de leurs relations diplomatiques. Cet élan a pourtant été assombri par une panoplie de mesures hostiles prises unilatéralement par les Etats-Unis envers la Chine, qui risquent de bouleverser l'une des relations bilatérales les plus importantes au monde.
Pour l'instant, l'idée qui semble régner à Washington est que la Chine et les Etats-Unis sont pris au piège d'une compétition conflictuelle dont ces derniers devraient impérativement sortir vainqueurs. Certains commentateurs politiques ont même avancé l'idée que les deux pays entrent dans une nouvelle "Guerre froide".
Il est à rappeler que certains parmi ceux qui réclament une approche opiniâtre dans le traitement de la soi-disant "menace chinoise" sont du même genre que les faucons qui ont passé des années ou même des décennies à promouvoir, en vain, une stratégie d'opposition frontale à la Chine.
Après avoir été marginalisés par le courant de pensée dominant aux Etats-Unis pendant des décennies, ces critiques de la Chine semblent maintenant prendre le dessus au sein d'un environnement politique qui consacre "l'Amérique d'abord" comme doctrine de gouvernement.
La guerre commerciale qu'engage Washington envers Beijing ne semble pas relever d'une politique économique rationnelle, mais plutôt d'une revanche tardive des faucons tels que Peter Navarro et Steve Bannon, qui ont passé des années à pousser des cris d'orfraie quant à une confrontation musclée contre la "Chine rouge". Leurs idées peuvent enfin rencontrer un certain écho dans une administration favorable au protectionnisme.
Depuis plus d'un an, en lieu et place d'une "victoire facile", tout ce que l'administration américaine actuelle a récolté de l'offensive tarifaire contre la Chine est une augmentation du coût des biens de consommation pour les habitants américains, et une opposition qui va croissant parmi les agriculteurs américains, les travailleurs industriels et les chefs d'entreprise.
De plus, le durcissement des tensions commerciales risque de ralentir la croissance économique des Etats-Unis, voire entraîner une récession l'an prochain. Selon une enquête Duke University/CFO Global Business Outlook publiée plus tôt ce mois-ci, près de la moitié des responsables financiers aux Etats-Unis prédisent que l'économie américaine sera en récession d'ici la moitié de l'année 2020, arguant que les guerres commerciales seraient l'un des principaux facteurs paralysants.
En outre, l'aggravation de la situation commerciale entre les deux premières économies mondiales a des conséquences négatives à l'échelle mondiale. Les politiques commerciales protectionnistes de Washington ont perturbé les chaînes d'approvisionnement mondiales, minent la confiance du monde dans le libre-échange, et pourraient assombrir davantage les perspectives de l'économie planétaire.
Une relation solide entre la Chine et les Etats-Unis peut non seulement donner un fort coup de pouce à l'économie mondiale, mais aussi aider la communauté internationale à résoudre bon nombre de formidables défis, tels que le changement climatique, le terrorisme, les crimes transfrontaliers, le trafic de stupéfiants et la non-prolifération nucléaire.
Par conséquent, la question de savoir si les Etats-Unis et la Chine peuvent travailler ensemble est une question vitale, qui concerne la stabilité et le bien-être du monde.
"Nous sommes dans une position où la paix et la prospérité du monde dépendent de la capacité de la Chine et des Etats-Unis à trouver une méthode pour travailler ensemble, pas toujours en plein accord, mais en gérant leurs désaccords", a déclaré Henry Kissinger, ancien secrétaire d'Etat américain et un poids lourd en politique étrangère, lors d'un événement à Washington en septembre dernier.
L'expérience la plus importante acquise par Beijing et Washington au cours des quatre dernières décennies est que les relations entre les deux parties ont conduit à "une ère distinguée par la paix en Asie de l'est et dans la région du Pacifique", a noté l'ancien président américain Jimmy Carter en décembre dernier.
Les performances impressionnantes de la Chine dans la relance de son économie et l'intégration continue des économies chinoise et américaine ont également permis aux deux pays de devenir des "moteurs de la prospérité mondiale", a ajouté l'ancien dirigeant américain.
MM. Carter et Kissinger ont tous deux contribué à mettre en branle les relations diplomatiques sino-américaines. Ils représentent la voix de la raison face à la mentalité actuelle de Washington, qui consiste à voir le développement de la Chine comme un défi stratégique à relever.
Dans son message à l'occasion du 40e anniversaire de l'établissement des relations diplomatiques sino-américaines au début de l'année, le président américain Donald Trump a déclaré qu'il faisait de la promotion des relations constructives entre les Etats-Unis et la Chine sa priorité.
A cette fin, son administration devrait écouter la voix de la raison. Le prochain sommet du Groupe des 20 constitue une bonne occasion de faire le premier pas.