Dernière mise à jour à 14h01 le 29/04
Le Bureau national des statistiques a annoncé la semaine dernière que le taux de croissance du PIB de la Chine au premier trimestre était de 6,4%, ce qui correspond à la limite supérieure de l'objectif de 6% à 6,5% fixé par le gouvernement pour 2019. Cette croissance plus rapide que prévu donne aux responsables politiques une marge de manœuvre pour poursuivre une politique monétaire stable et mettre en œuvre des politiques budgétaires visant à la fois à transformer l'économie et à réduire les risques de dette accumulée.
Les décideurs chinois sont aux prises avec le difficile dilemme de transformer simultanément la nature à long terme de l'économie du pays tout en évitant l'inflation à court terme ou la récession. Pour transformer l'économie, la Chine doit continuer à réduire les niveaux d'endettement et à passer d'industries extractives lourdes et en surcapacité à une économie plus innovante, axée sur le consommateur. Mais le danger est que le fait d'aller trop vite dans cette direction risque de mettre beaucoup de monde au chômage ou de provoquer l'effondrement financier d'entreprises.
Les données de ce trimestre montrent que la Chine a su éviter ces dangers à court terme tout en poursuivant ses objectifs à long terme.
Le taux d'inflation à la consommation a été de 1,8% d'une année sur l'autre et les prix à la production n'ont augmenté que de 0,2%. Une règle générale utilisée par les banquiers centraux du monde entier est que le taux d'inflation devrait être fixé à environ 2% par an -cette règle est d'ailleurs intégrée dans le mandat de la Banque centrale européenne. C'est pourquoi la politique monétaire stable de la Banque populaire de Chine, la banque centrale, fonctionne.
En mars, le taux de chômage dans les zones urbaines était de 5,2%, soit un niveau légèrement inférieur à celui de l'année dernière. La plupart des économistes définissent le « plein emploi » comme une valeur inférieure à 6%, de sorte que nous ne constatons pas de chômage problématique significatif, même en période de transformation économique majeure.
Les autres mesures de croissance ventilées couramment utilisées sont cohérentes avec le chiffre de croissance de PIB le plus élevé mesuré. Par exemple, la production et la fourniture d'électricité, d'énergie thermique, de gaz et d'eau ont augmenté de 7,1% au cours du trimestre. De plus, l'indice du transport, du stockage et de la poste à valeur ajoutée a augmenté de 7,3%.
Un examen plus attentif des secteurs en forte croissance montre que l'économie chinoise s'achemine vers l'objectif à long terme de passer d'une stratégie de développement reposant sur de lourds investissements dans l'industrie et les infrastructures à une stratégie axée sur les services et la consommation intérieure. En outre, les industries plus productives produisant des biens à plus forte valeur ajoutée connaissent une croissance beaucoup plus rapide que l'industrie lourde traditionnelle.
Parmi les grandes entreprises, les entreprises publiques ont progressé de 4,5% par rapport à l'année précédente, tandis que les entreprises par actions ont progressé presque deux fois plus vite, à 7,8%. De grands progrès ont ainsi été accomplis dans la promotion de l'entreprise privée, renforcée par de nombreuses politiques annoncées lors de la réunion de l'Assemblée populaire nationale le mois dernier.
Par ailleurs, les services se développent rapidement. La valeur ajoutée du secteur tertiaire, constitué principalement de services, est passée de 56,7% à 57,3% du PIB par rapport à la même période de l'année dernière. L'indice de la production de services a augmenté de 7,4% d'une année sur l'autre, un niveau supérieur au taux de croissance du PIB global.
Dans l'ensemble, les ventes au détail de biens de consommation ont également augmenté de 8,3%. Les ventes de biens de consommation modernisés ont connu une croissance rapide, les taux les plus élevés étant concentrés sur les produits modernisés tels que les cosmétiques, les téléphones et les ordinateurs.
A noter aussi que les services de haute technologie ont connu une croissance étonnante de 21,2%. Dans le cadre des préparations pour les télécommunications 5G grand public l'an prochain, la production des stations de base de communications mobiles a augmenté de 153,7%.
Les données montrent également un fort mouvement vers l'objectif du gouvernement de créer une civilisation écologique. Les automobiles à énergies nouvelles et les cellules solaires ont enregistré une croissance de 48,2% et 18,2%, respectivement. Les ventes de véhicules ferroviaires urbains ont augmenté de 54,1%, ce qui montre la poursuite des investissements dans des transports en commun urbains respectueux de l'environnement. Selon les estimations préliminaires du BNS, la part de la consommation d'énergies propres, telle que le gaz naturel, l'hydroélectricité, le nucléaire et l'éolien, dans la consommation totale d'énergie au premier trimestre était supérieure de 1,5 point à celle de la même période l'an dernier, et, de plus, la consommation d'énergie par unité de PIB a diminué de 2,7% sur un an.
Les investissements totaux en immobilisations ont augmenté de 6,3%, l'investissement privé progressant de 6,4%, soit un peu plus rapidement que l'ensemble. C'est un chiffre particulièrement important quand on se souvient des craintes de l'an dernier au sujet d'un possible effondrement des investissements privés dans l'économie. Les efforts du gouvernement pour renforcer le secteur privé semblent donc avoir porté leurs fruits.
Les investissements dans la fabrication de haute technologie ont quant à eux augmenté de 11,4% et les investissements dans les services de haute technologie ont augmenté de 19,3%, un taux bien supérieur à la croissance globale des investissements qui montre que le passage à une fabrication et à des services de pointe est en bonne voie.
Fait notable, malgré des tensions persistantes, la valeur totale des importations et des exportations a fortement rebondi en mars pour atteindre 9,6% de plus qu'en mars 2018. Le commerce global a donc progressé de 3,7% en glissement annuel, malgré les faibles taux de croissance enregistrés en janvier et en février. Les exportations de produits électriques et mécaniques, qui représentent une valeur ajoutée supérieure, ont augmenté de 5,4% au cours du trimestre. De plus, les échanges du secteur privé ont progressé de 9,9%, soit bien plus que le taux de croissance global.
On peut toutefois s'inquiéter de voir que l'investissement total dans l'immobilier a augmenté de 11,8% sur un an. Ceux qui ont vécu la crise financière de 2008 aux États-Unis savent mieux que quiconque combien il faut se méfier des investissements toujours élevés dans l'immobilier à une époque où les prix de ce secteur sont déjà étonnamment élevés et où la surface habitable de la Chine par personne a déjà dépassé celle de l'Europe.
L'essentiel est toutefois que les politiques budgétaire et monétaire, combinées à des politiques de promotion de la transformation structurelle, ont permis de stabiliser la situation macroéconomique et d'assurer la modernisation de l'offre.