L'inaction de Washington envers une Afrique en pleine pandémie

A mesure que la pandémie de COVID-19 continue à se propager sur le continent africain, où le nombre total d'infections a franchi la semaine dernière la barre d'un million, plusieurs organisations internationales et des quresponsables africains ont affirmé ne recevoir que peu d'aide humanitaire des Etats-Unis, faisant part de leurs inquiétudes sur l'inaction de Washington envers la crise sanitaire en Afrique.

"Les Etats-Unis sont pour l'essentiel absents des actions sur le front international, ce que je trouve vraiment déchirant", a commenté Jeremy Konyndyk du Centre pour le développement mondial (CGD) basée à Washington, lors d'une discussion organisée par le Centre d'études stratégiques et internationales (CSIS), lui aussi basé dans la capitale américaine.

L'agence de presse américaine Associated Press (AP) a rapporté qu'une vingtaine d'organisations humanitaires internationales avaient écrit le 4 juin une lettre à l'administrateur par intérim de l'Agence américaine pour le développement international (USAID), John Barsa, déplorant que "peu d'aide humanitaire américaine, voire aucune, a atteint ceux qui se trouvent sur la ligne de front" contre la pandémie. Et d'ajouter que "malgré des mois de conversations prometteuses" avec les personnels locaux de l'USAID, peu d'organisations ont reçu de l'aide.

Elles ont qualifié le retard dans la réponse du gouvernement américain de "dévastateur", avertissant que le moment d'agir pour atténuer les pires impacts de la pandémie sur le monde entier allait passer.

Le même jour de l'envoi de la missive, le directeur du groupe de travail de l'USAID contre le COVID-19, Kenneth Staley, a annoncé que les Etats-Unis avaient fourni au total près de 400 millions de dollars aux Africains pour lutter contre la pandémie. Cependant, les responsables américains n'ont pas donné de détails sur le nombre exact d'équipements médicaux délivrés aux pays africains.

Interrogé par les journalistes d'AP sur le nombre de respirateurs, de kits de dépistage, ainsi que d'autres équipements médicaux livrés par les Etats-Unis, le directeur du Centre africain de contrôle et de prévention des maladies (CDC Afrique), John Nkengasong, a avoué que "malheureusement, je ne peux pas vous en donner le chiffre (...) C'est un moment difficile pour de nombreux pays qui font face à leur propre pandémie".

"Au lieu d'être à la tête des partenaires internationaux, ou même de se joindre à eux pour aider l'Afrique, les Etats-Unis ont choisi de harceler leurs rivaux géopolitiques et de saper les efforts multilatéraux pour faire face à cette urgence", a écrit William Bellamy, un haut conseiller pour l'Afrique du CSIS et ancien ambassadeur des Etats-Unis au Kenya, dans une tribune parue en mai dernier sur le webzine sud-africain Daily Maverick.

En mai dernier, le président américain Donald Trump a même annoncé que son pays romprait ses liens avec l'OMS et mettrait fin au financement par son pays de cette organisation sur laquelle comptent la plupart des nations les moins avancées ou en voie de développement. Deux mois plus tard, les Etats-Unis ont notifié le secrétaire général de l'ONU de leur retrait.

La douleur qu'inflige la sortie des Etats-Unis de l'OMS, une décision "à la fois immorale et probablement illégale", sera ressentie sur les "champs de bataille contre le COVID-19 et dans toutes les communautés pauvres qui s'appuient sur les agences des Nations Unies pour l'aide alimentaire d'urgence, la vaccination des enfants, les médicaments essentiels et les conseils", a mis en garde Laurie Garrett, écrivain scientifique et lauréate du prix Pulitzer, dans une tribune parue dans la revue Foreign Policy.

"Nous espérons que les Etats-Unis se concentreront sur leur propre réponse à l'épidémie et contribueront également à la lutte mondiale contre le virus par des actions concrètes, au lieu de saper et de salir la réponse d'autres pays tout en propageant le 'virus politique'", a déclaré le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères Zhao Lijian.