En France, depuis une loi de 1981 sur le prix unique du livre, les libraires sont contraints de fixer leurs tarifs selon des critères relativement stricts. Elle a montré son efficacité pendant de nombreuses années, mais depuis qu'internet est entré dans les mœurs et le développement du commerce en ligne, certains acteurs ont tenté de jouer au maximum avec la législation pour pratiquer les prix les plus bas possibles. Et c'est notamment le cas d'Amazon, qui propose fréquemment à ses clients de bénéficier à la fois d'une remise de 5 % sur leurs livres, tout en offrant les frais de port correspondant. La Fnac, célèbre détaillant français, le fait également, mais en revanche, à la différence du géant américain, elle n'en fait bénéficier que ses clients adhérents.
Désormais, ces pratiques pourraient bientôt ne devenir qu'un souvenir. Plusieurs députés du principal parti d'opposition français, l'UMP, ont déposé cet été une proposition de loi visant à interdire la gratuité de la livraison, estimant que cette concurrence vis-à-vis des libraires traditionnels est déloyale. Le Gouvernement a emboité le pas de ces députés, mais modifié la proposition, afin d'interdire de fait le cumul entre la gratuité des frais de port et la réduction maximale de 5 % que peuvent accorder les cybermarchands à leurs clients sur les ouvrages neufs, dès lors que ceux-ci sont livrés à domicile. Le texte avait été adopté à l'unanimité par l'Assemblée Nationale française le 3 octobre dernier, avant d'être transmis au Sénat, qui l'a adopté la nuit dernière, également à l'unanimité.
Pour la Ministre française de la Culture Aurélie Filippetti, cette loi n'a pas pour but de « brimer certains acteurs », mais elle a ajouté, sans cibler nommément Amazon, dont elle a cependant dénoncé les pratiques, « Ne voyons pas dans cette stratégie une marque d'altruisme pour les consommateurs. Elle est un argument commercial au service de la conquête de parts de marché ». Désormais, les cybermarchands devront donc choisir entre la livraison gratuite et le rabais de 5 %. Si le vendeur opte pour la remise, celle-ci sera déduite du montant des frais de port, de telle sorte que ces derniers restent malgré tout facturés, au minimum de 1 centime d'Euro. Le texte va maintenant revenir devant l'Assemblée Nationale pour son vote définitif.