La controverse actuelle entre la France et les États-Unis, suite aux accusations de collecte de renseignements à grande échelle par la NSA, peut à première vue sembler similaire aux allégations précédentes de surveillance du gouvernement français par les services de renseignement américains.
Cependant, les dernières révélations en date sont beaucoup plus graves et pourraient s'avérer plus préjudiciables à la réputation et aux intérêts des États-Unis que le comportement passé de la NSA.
Les accusations antérieures concernaient la surveillance de certaines agences gouvernementales françaises, notamment le ministère des Affaires étrangères, par les États-Unis. Ces actions ont provoqué des tensions dans les relations sino-américaines, mais il est peu probable que qui que ce soit au sein du gouvernement français ait été véritablement surpris d'apprendre l'existence de ce programme.
Néanmoins, les dernières révélations représentent un défi beaucoup plus sérieux. En ciblant les communications de la population, les États-Unis ont directement défié la responsabilité française de protéger ses propres citoyens.
Plusieurs aspects de ce problème pourraient entraîner de graves dommages à la capacité des États-Unis à collaborer avec le gouvernement français dans le futur.
Le premier obstacle est la colère du peuple français. Quelles que soient les justifications fournies par Washington, le point de vue dominant est que ces programmes représentent une grave invasion de la vie privée par la NSA.
Vu le grand nombre de cibles, il est difficile de croire que la NSA ne visait que des terroristes connus. Il semble plutôt qu'elle avait jeté un grand filet dans l'espoir de découvrir des informations potentiellement utiles aux États-Unis. Même si les autorités françaises étaient prêtes à passer l'éponge, la colère publique pourrait les empêcher de le faire.
Le deuxième problème réside dans la difficulté de convaincre le gouvernement français que cette surveillance a cessé.
Après tout, l'attitude récente du gouvernement américain a été de nier l'existence de programmes jusqu'à ce que celle-ci ne fasse plus l'ombre d'un doute. Les promesses de mettre fin à d'autres programmes de cette nature ou de travailler en collaboration avec le gouvernement français seraient probablement accueillies avec scepticisme.
Enfin, il y a la question de ce à quoi ont servi ces renseignements.
Ce vaste programme a certainement permis l'obtention de secrets commerciaux, et les entreprises françaises et européennes sont en droit de s'inquiéter de la possibilité que leurs propres secrets commerciaux soient utilisés contre elles.
De même, les organisations qui prennent position pour des questions auxquelles les États-Unis s'opposent peuvent craindre que leurs communications soient écoutées par les États-Unis et qu'elles puissent être mises à la disposition de leurs ennemis.
Cela pourrait avoir des conséquences négatives pour les groupes de dissidents et de lanceurs d'alerte, ainsi que décourager des dénonciateurs de leur fournir des informations confidentielles par crainte d'être découverts.
Ce dernier point pourrait être celui qui causera le plus de dommages sur le long terme à la relation politique des deux nations.
En l'absence d'une réponse ferme à une telle intrusion, même si ce n'est qu'une intrusion électronique sur le territoire souverain de la France, Paris aurait l'air incapable ou réticent à prendre des mesures pour protéger son propre peuple. Cela endommagerait considérablement la légitimité du gouvernement actuel aux yeux des citoyens.
Pour ces raisons, la France ne peut se permettre d'accepter moins que des excuses et une garantie que cette activité ne se répétera pas à l'avenir. Cependant, comme nous l'avons mentionné plus tôt, toute affirmation des États-Unis que la collecte de renseignements par la NSA en France a cessé sera sans doute accueillie avec scepticisme.