La décision rendue le 25 novembre par un grand jury du Comté de Saint Louis, dans l'Etat du Missouri, aux États-Unis, a été comme une étincelle qui a mis le feu aux poudres et a fait éclater une vague, longtemps retenue, de forte émotion au sein de la communauté afro-américaine, qui s'est transformée en une série d'émeutes qui ont eu lieu un peu partout dans le pays.
Face à ces émeutes, le Président américain Barack Obama a déclaré que cette affaire révélait le « problème américain ». Mais en fin de compte, quel est ce problème ? Barack Obama met cela sur le compte de lois « ne sont pas appliquées de façon uniforme ou juste » envers les minorités ethniques ; de son côté, le magazine « Time », dans un article publié en septembre, estime que les incidents de Ferguson sont plutôt révélateurs d'une « guerre » entre riches et pauvres aux Etats-Unis, et que cela n'a rien à voir avec un problème de racisme.
En surface, ce « problème américain » révélé par les émeutes de Ferguson, c'est l'échec de l'Etat de droit à se mettre en concordance avec les réalités de la gouvernance ; de manière plus profonde, le problème est que personne n'a conscience que les Etats-Unis ne sont pas un pays capable de faire des exceptions dans les lois régissant leur nation, c'est que personne n'est conscient que les Etats-Unis n'ont pas compris qu'au sein des institutions démocratiques existantes se produisent des abus inévitables.
Si le système juridique américain est considéré comme un modèle unique qu'on ne peut ni faire bouger ni faire changer, et qui peut s'appliquer au monde entier, alors il sera amené tôt ou tard à souffrir de la même maladie, un mal incurable qui pourrait bien le faire mourir plus vite.
Chaque pays a ses propres problèmes de gouvernance, et sur cette question, ils sont peu nombreux à avoir une bonne politique. Ces dernières années, le Royaume-Uni et la France aussi ont connu des émeutes raciales très graves. La chancelière allemande Angela Merkel a ainsi déclaré publiquement en 2011 que le multiculturalisme a échoué et qu'il est impossible de faire face aux barrières ethniques. Cela montre les limites de la gouvernance moderne : il n'existe aucun pays qui soit un paradis, et il ne faut pas s'imaginer que les pays développés peuvent offrir aux autres pays un programme polyvalent de solutions aux problèmes économiques, politiques et sociaux ; d'un autre côté, cela doit rappeler à tous que si ce type de problème arrive dans un autre pays, celui-ci devrait devenir une référence quand il s'agit de traiter des problèmes similaires.
Alexandre Herzen, philosophe russe du 19e siècle apôtre du pluralisme, posa un jour une question à laquelle peu de personnes occidentalisées d'aujourd'hui ont songé : « Pourquoi un pays qui suit sa propre voie de développement, dont les conditions nationales sont très différentes de celles des pays d'Europe occidentale, qui a des modes de vie différents devrait-il suivre les vieux sentiers ? Et cela d'autant plus quand on sait où mènent ces chemins ? ».