Dernière mise à jour à 16h27 le 27/05
La visite que le président américain Barack Obama a prévu d'effectuer à Hiroshima, ville japonaise bombardée par les Etats-Unis à la bombe A pendant la Seconde Guerre mondiale, semble porter une noble intention, mais n'est en réalité rien de plus qu'une autre opportunité pour Washington et Tokyo de poursuivre leurs propres objectifs cachés.
A première vue, pour une ville devenue la première victime de la bombe atomique dans l'histoire humaine, une visite par le premier président en exercice du pays qui a largué l'arme fatale semble "historique".
Cependant, la nature symbolique de cette visite ne signifie pas que les deux alliés se rapprochent davantage de l'objectif de dénucléarisation prôné par M. Obama; les politiciens de Washington et de Tokyo ont clairement d'autres arrières-pensées.
Pour le président américain sortant, la visite d'Hiroshima l'aidera à laisser un autre héritage politique. Il sera le premier président en exercice des Etats-Unis à visiter cette ville victime de la bombe atomique, après être déjà devenu le premier président afro-américain, le premier président américain en exercice à avoir obtenu un prix Nobel de la paix après la Seconde Guerre mondiale, et le premier président américain à avoir effectué une visite à Cuba en près de 90 ans.
En outre, sa visite à Hiroshima -- symbole pour l'identité de "victime de guerre" du Japon aux yeux de nombreux Japonais -- aidera apparemment à renforcer davantage les relations entre Washington et Tokyo, relations qui représentent un pilier dans la stratégie américaine de "rééquilibrage vers l'Asie".
De plus, le déplacement à Hiroshima sera un moyen d'intimidation pour M. Obama, lui permettant de montrer son fort sens des responsabilités vis-à-vis des alliés des Etats-Unis en tant que président démocrate, ce qui permettrait de faire gagner des points à la candidate démocrate à la Maison Blanche Hillary Clinton, tout en minimisant l'importance de son adversaire républicain Donald Trump.
Tokyo a également un objectif caché, à savoir apaiser le mécontentement du public face à une économie morose et à l'intention du gouvernement de renforcer son attitude belliciste. Le gouvernement japonais dirigé par le Premier ministre Shinzo Abe cherche ainsi désespérément à acquérir un avantage politique pour poursuivre ses mesures.
Par exemple, M. Abe envisage de convoquer une élection parlementaire anticipée dans le but de faciliter ses efforts visant à réviser la constitution pacifiste du Japon.
M. Abe pense évidemment qu'accompagner M. Obama à Hiroshima et se tenir à ses côtés permettra d'accroître sa cote de popularité.
Par ailleurs, vu l'identité sensible d'Hiroshima, le gouvernement japonais tente d'utiliser cette visite historique pour mettre en relief l'image de "victime de guerre" du Japon, tout en minimisant son rôle d'agresseur durant la Seconde Guerre mondiale.
Pourtant, quels que soient les désirs que Washington et Tokyo prennent pour des réalités, la visite d'Hiroshima par le président Obama ne devrait pas être utilisée en tant qu'occasion pour blanchir les atrocités commises par le Japon pendant la Seconde Guerre mondiale.
La mort de civils japonais dans le bombardement d'Hiroshima mérite la compassion du monde entier, mais cette tragédie a été provoquée par le Japon lui même. Le gouvernement militariste japonais d'alors avait fait de la ville le site du quartier général de son armée, des arsenaux et des camps, ainsi qu'une part essentielle de sa machine de guerre qui a fait des dizaines de millions de morts dans d'autres pays.
Pour éviter une répétition de la tragédie d'Hiroshima, il est souhaitable que le Japon tire des leçons de ses erreurs du passé et ne reprenne jamais une voie militariste.