Dernière mise à jour à 09h10 le 06/09
La réforme consistant à prélever les impôts directement sur les salaires et les pensions entrera en vigueur en France, comme prévu, le 1er janvier prochain, mais avec certains ajustements techniques, a annoncé mardi soir le Premier ministre Edouard Philippe, levant le doute sur son application en s'efforçant de rassurer.
Le chef du gouvernement a donc confirmé à la télévision la mise en œuvre du prélèvement à la source au 1er janvier 2019. Une réforme qui concerne 38 millions de foyers fiscaux.
Les propos du président Emmanuel Macron le 30 août dernier en marge d'un déplacement à Helsinki (Finlande) avaient alimenté toutes sortes de spéculations. Le chef de l'Etat français avait alors déclaré avoir "besoin d'une série de réponses très précises et d'être sûr de ce que nos concitoyens vivront le jour où on le mettra en place, si on le met en place".
"Nous avons aujourd'hui l'ensemble des réponses aux questions que nous nous posions. Nous avons la garantie (....) que cette réforme sera mise en oeuvre dans de bonnes conditions pour les contribuables", a assuré Edouard Philippe mardi soir, quelques heures après l'annonce d'un remaniement, provoqué par les démissions surprises du ministre emblématique de la Transition écologique Nicolas Hulot et de celle des Sports, Laura Flessel.
L'intervention télévisée du Premier ministre visait non seulement à lever le doute sur l'application de cette réforme soulevant certaines controverses, mais aussi à faire de la pédagogie et à annoncer certains ajustements techniques.
Ces dernières semaines, plusieurs voix s'étaient élevées pour critiquer une "usine à gaz" aux effets potentiellement délétères sur le pouvoir d'achat et la croissance, évoquant le risque d'un "choc psychologique" lié à l'amputation du salaire net sur la fiche de paie.
Le Medef (Mouvement des entreprises de France) s'était montré quant à lui très frileux face à un système qui transforme les entreprises en collecteurs d'impôt.
Des ajustements techniques ont été annoncés par le gouvernement. Pour éviter que les Français ne voient leur pouvoir d'achat amputé lors des premiers mois de l'année, une avance de 30% était initialement prévue pour les bénéficiaires de réductions et crédits d'impôts, liés par exemple aux frais de garde d'enfant ou à l'emploi d'une aide à domicile.
Le gouvernement a finalement décidé de doubler la somme versée aux contribuables concernés : l'acompte, versé dès le 15 janvier, atteindra donc 60% du crédit d'impôt total.
Selon le ministère des Finances, ce dispositif sera étendu aux réductions d'impôt en faveur de l'investissement locatif.
D'autre part, pour régler le cas des 250.000 salariés de particuliers-employeurs, le gouvernement a finalement décidé la mise en place d'un acompte annuel, en 2019. Cet acompte, appelé en septembre 2019, sera calculé sur la base des derniers revenus connus.
"Cette solution permettra de préserver l'environnement administratif de ces personnes et d'éviter le double prélèvement en 2020", a noté le ministère des Finances.
Après Edouard Philippe, le ministre des Comptes publics, Gérald Darmanin, chargé de la mise en oeuvre du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu, est monté à son tour au créneau mercredi en affirmant que cette réforme aurait un "choc psychologique positif".
"Il n'y aura aucun perdant en trésorerie de la réforme de l'impôt à la source" alors qu'il y en avait "à peu près trois millions" dans la réforme initialement proposée, a-t-il déclaré.
"Le 15 janvier, le premier choc psychologique de l'impôt à la source sera positif, puisqu'on remboursera, ce qui n'a jamais été fait, ces crédits d'impôts", a-t-il dit.
Le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire, est lui aussi venu en renfort, jugeant que la mise en oeuvre du prélèvement à la source était "une bonne décision pour les Français".
"Je crois que le président de la République s'est posé les bonnes questions", a-t-il déclaré. "Il fallait apporter des réponses (...) et Gérald Darmanin a apporté toutes les réponses techniques", a-t-il insisté.
Au 1er janvier 2019, la France devrait donc rejoindre la quasi-totalité des Etats européens qui ont déjà mis en place un dispositif de prélèvement à la source, de l'Allemagne, pionnière en la matière depuis 1925 à l'Espagne en 1979 en passant par les Pays-Bas en 1941, le Royaume-Uni depuis 1944 ou encore la Belgique en 1962. Seule la Suisse n'a pas adopté ce système.
Si la France conservait jusqu'ici un système de recouvrement indirect, c'est notamment parce que ce sont les ménages qui sont imposés et non les individus et que son système est particulièrement complexe en raison de l'existence de nombreuses niches fiscales.