Dernière mise à jour à 14h54 le 04/05
Le sélectionneur de l'équipe nationale féminine de Chine Bruno Bini (D), lors d'un entraînement à Beijing, capitale chinoise, le 26 avril 2016. (Xinhua/Xia Yifang)
Par Tang Ji
En 2007, Bruno Bini, en tant qu'entraîneur de l'équipe de France de football féminin, avait dirigé les Bleues face aux Chinoises pour son premier match international. A l'époque, il n'aurait sans doute jamais pu imaginer que, huit ans plus tard, son destin serait étroitement lié à la Chine.
En 2015, il a en effet été recruté par la Fédération chinoise de football pour être le nouveau sélectionneur de l'équipe nationale féminine. Mais il n'aurait pas également pu imaginer que la première question posée par les médias serait de savoir s'il était au courant des mandats inachevés de ses deux prédécesseurs étrangers, qui avaient démissionné très vite. Il en avait plaisanté: "C'est comme demander aux jeunes mariés quand est-ce qu'ils vont divorcer au lieu de leur offrir leurs voeux".
M. Bini, ex-sélectionneur d'une équipe de France qui s'est classée 4e du Mondial 2011 et des Jeux olympiques de 2012, s'est vite rendu compte que le football féminin chinois constituait un vrai défi.
Dans une interview à FIFA.com, il a révélé qu'avant son entrée en fonction, les joueuses chinoises n'avaient pas le moral à cause de six défaites consécutives et qu'elles étaient soumises à "une forte pression, car on comptait sur nous pour décrocher le billet olympique".
En effet, cette réelle pression vient d'une attente considérable des Chinois envers leur équipe nationale de foot féminin, dont les joueuses sont surnommées les Roses d'acier grâce à leurs belles performances passées. La Chine est parvenue en finale des JO de 1996 et de la Coupe du monde 1999.
Dynamiques, laborieuses et talentueuses, les joueuses de cette génération ont enchaîné une série de victoires miraculeuses face à de redoutables adversaires. Moins bien payées que leurs homologues masculins, elles disent ne travailler que pour assouvir leur passion et leurs rêves, faisant d'elles les idoles du peuple chinois.
Mais à l'issue du Mondial 1999, faute d'une nouvelle génération suffisamment compétente pour prendre la relève, l'équipe connaîtra une chute fulgurante, reflétant un problème aigu en Chine: une formation des jeunes joueuses négligée. En 2010, les Chinoises n'ont même pas décroché leur billet pour le Mondial au terme des qualifications asiatiques et ne figurent pas sur le podium de la dernière Coupe d'Asie des nations.
Mais Bruno Bini dit avoir décelé un énorme potentiel au sein de l'équipe chinoise de foot féminin et se sent confiant dans le fait de pouvoir rétablir son lustre d'antan lors de son mandat de quatre ans.
"Quand j'ai regardé la Coupe du monde féminine l'année dernière, j'ai suivi de près les progrès de l'équipe chinoise. J'ai remarqué qu'elles ont en moyenne 22 ans et demi. Elles sont très jeunes! C'est un grand avantage", a-t-il confié à l'agence de presse Xinhua. "Imaginez : dans quatre ans, elles auront 26 ou 27 ans, le meilleur âge pour jouer au football. Et elles deviendront plus matures, expérimentées et sophistiquées. Cette équipe sera tellement forte!".
Des membres de l'équipe de Chine de football féminin participent à un entraînement à Beijing, le 26 avril 2016. (Xinhua/Xia Yifang)
M. Bini, grâce à sa baguette magique, a réussi en mars dernier au Japon à qualifier les filles chinoises pour le Tournoi olympique qu'elles avaient raté en 2012. La Chine (pour l'heure 17e au classement FIFA) a signé une série de victoires cruciales, battant notamment le Japon 2-1, pays hôte et finaliste de la dernière Coupe du monde au Canada en 2015.
Huit ans d'attente après les JO de Beijing 2008! Le foot féminin chinois se redresse donc en passant d'une phase de turbulences à une reconstruction sur plusieurs années. Et l'entraîneur français y a joué un rôle important. Il a attaché une grande importance à l'amélioration de la technique et rétabli la confiance au sein des jeunes joueuses.
"Elles ont beaucoup progressé dans le collectif et les combinaisons", résume-t-il en disant avoir découvert le talent précieux de son équipe chinoise : "Les filles ont de l'endurance, courant longtemps et partout. Et l'équipe est énergique et très bien organisée". D'autre part, les joueuses chinoises trouvent que Bruno Bini est impartial et que l'équipe est animée d'une forte cohésion.
En fait, cette équipe a retrouvé la confiance sous la houlette du technicien français grâce à ses victoires l'an dernier en amical face à l'Angleterre (2-1), médaillée de bronze du dernier Mondial, et face aux Américaines (1-0), championnes du monde en titre.
Mais ce n'est qu'un début. L'acquisition du billet pour Rio ne signifie pas une augmentation qualitative du niveau du foot chinois. "Je ne suis pas un magicien", avoue M. Bini. Pour le football féminin chinois, il reste beaucoup à faire d'ici les Jeux de Rio qui auront lieu l'été prochain.
Les grands travaux ont en tout cas déjà démarré en Chine. Au fur et à mesure du lancement d'un plan à long terme en matière de réforme du football chinois en 2015, le football féminin chinois profitera de nouvelles opportunités: davantage d'investissements dans les matchs du championnat féminin, amélioration de la logistique pour l'équipe nationale et attachement plus grand à la formation des adolescents.
Pour Rio 2016, Bruno Bini se veut ambitieux. "Toutes les équipes iront là-bas pour gagner. Tous les entraîneurs visent une médaille", dit-il.
Evidemment, il a un autre objectif. "On dit que la plus belle phrase française est 'Je t'aime'. Mais pour moi, je préfère l'autre phrase : 'Nous sommes ensemble'", a-t-il confié à Xinhua. "Je voudrais rassembler toutes les forces de l'équipe pour qu'elle soit aussi forte que les Roses d'acier dans les années 1990 qui seront de retour sur scène sous ma direction".