Après le renversement du président François Bozizé par les rebelles de la Séléka dimanche malgré la signature d' un accord de paix en janvier à Libreville au Gabon, un consensus national s' impose pour une solution à la crise centrafricaine, a estimé dans un entretien mercredi à Xinhua à Durban le commissaire à la paix de l' Union africaine (UA), Ramtane Lamamra.
Pour le diplomate africain, qui a participé à une rencontre entre les dirigeants des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) et quelques leaders africains sur les préoccupations concernant les infrastructures ainsi que la paix et la sécurité sur le continent, des efforts sont menés pour aider la République centrafricaine (RCA) à retrouver l' ordre constitutionnel.
Question : Monsieur le commissaire, les derniers développements de la crise centrafricaine, c' est un nouveau défi pour les efforts de paix et de sécurité de l' Union africaine...
Réponse : Oui, bien sûr, mais on a des défis tout le temps et notre rôle, c' est de travailler à être au service de nos peuples. Tout naturellement, nous nous attachons à appliquer les principes fondamentaux de la doctrine de l' Union africaine dans ce genre de situation. Là, les choses sont claires, le Conseil de paix et de sécurité de l' Union africaine a appliqué la doctrine de notre Union en matière de rébellions armées, de changement anticonstitutionnel de gouvernement. Aujourd' hui, nous travaillons avec le reste de nos dirigeants, avec la CEEAC (Communauté économique des Etats de l' Afrique centrale, à laquelle la République centrafricaine appartient, NDLR), avec évidemment le Conseil de sécurité des Nations Unies à trouver une solution pacifique qui permettra de protéger les civils, qui permettra de prendre en charge les urgences humanitaires dans ce pays, mais qui permettra aussi de travailler au respect de l' Etat de droit et au retour à l' ordre constitutionnel.
Q : Il y a des sanctions qui ont toujours été imposées dans de telles situations et on sait comment ça s' est toujours passé. Sincèrement, peut-on se permettre de penser que ce cas dérogera à la règle en produisant des effets positifs ?
R : Les sanctions produisent toujours des effets. Ces effets peuvent être décisifs, ces effets peuvent être étalés dans le temps. Mais je voudrais souligner ici que notre rôle n' est pas de punir. Notre rôle, c' est d' exercer une pression suffisante pour que la raison prévale, pour que l' intérêt supérieur du pays soit pris en charge par tous les acteurs. Il est clair qu' un pays comme la République centrafricaine ne peut pas se permettre l' isolement, ne peut pas se permettre de vivre en tournant le dos à la légalité internationale. C' est pour ça que nous devons commencer avec la CEEAC les efforts tendant à aider les parties centrafricaines à transcender la conjoncture actuelle et à retrouver la voie d' un consensus national pour appliquer les accords de Libreville qui sont toujours valables.
Q : Vous voulez dire que le retour au pouvoir de François Bozizé est encore possible ?
R : Je ne suis pas aussi spécifique, s' agissant du sort des personnes, à cause de la jurisprudence, la doctrine africaine. Regardez autour de vous, vous voyez des tas de formules qui ont été appliqués, qui ont été considérés comme prompt rétablissement de l' ordre constitutionnel dans un pays donné. Je ne veux pas rentrer dans les détails à ce stade, ça serait prématuré. Je veux dire que l' ordre constitutionnel peut être rétabli, il peut y avoir le constat de satisfaction de la part de l' Afrique et de la communauté internationale, dans la mesure où une solution conforme à la Constitution centrafricaine et conforme à la doctrine de l' Union africaine devrait être trouvée.
Q : En République démocratique du Congo, l' amélioration de la situation sécuritaire à l' Est du pays reste aussi attendue, surtout qu' un nouveau foyer de tension vient de faire jour dans cette région...
R : Il y aura quand même une évolution positive. Je crois que la communauté internationale est au chevet de la RDC. La RDC elle-même a pris des engagements, la région a pris des engagements,
l'accord-cadre qui a été signée à Addis-Abeba le 24 février dernier est un document de portée historique. Donc, il ne faut pas juger l' orientation générale de la situation en RDC par rapport à des circonstances passagères. Il faut savoir - et j' en suis persuadé - que nous sommes dans la bonne voie, même si les obstacles demeurent nombreux et qu' il faut naturellement les surmonter les uns après les autres.
Par Raphaël MVOGO