Le décès dimanche à Agadir (602 km au sud-ouest de Rabat) d'une petite fille dénommée Fatima, 14 ans, à cause de la maltraitance de ses employés a relancé le débat autour de la protection des petites bonnes au Maroc.
Le décès de Fatima est survenu après son transfert à l'hôpital suite à des brûlures de troisième degré sur plusieurs parties de son corps causées pas ses employeurs, un couple formé d'un gendarme et d'une enseignante, a précisé le quotidien «Aujourd'hui le Maroc».
La société civile crie son indignation et interpelle le gouvernement. "Aujourd'hui c'est Fatima, avant c'était Khadija, Zinebà mais elles sont 60.000", s'est indignée la directrice opérationnelle de l'Institution marocaine de solidarité avec les femmes (INSAF), Houda El Bourahli, en appelant le gouvernement marocain à assumer ses responsabilités en accélérant la promulgation de la loi de protection des employés domestiques.
Le projet de loi relatif au travail domestique traîne depuis l'ancien gouvernement et n'a toujours pas été voté au Parlement, bien qu'il ait été mis à jour et adopté par l'actuel Exécutif.
Le combat pour lutter contre ce fléau est à mener sur différents fronts (législatif, juridique, institutionnel et social) . Mais si la société se mobilise, de l'autre côté, les institutions peinent à réagir.
Sachant que le Code du travail marocain interdit l'emploi des mineurs avant l'âge de 15 ans. Il considère, comme délit, le travail de ces enfants. En cas de récidive, la pénalité va du paiement d'une amende pouvant aller jusqu'à 60.000 DH. Aussi, l' emploi de la petite fille ou du petit garçon expose-t-il à une peine de trois mois d'emprisonnement.
Toutefois, le Collectif associatif pour l'éradication du travail des "petites bonnes", qui rassemble 34 associations et réseaux marocains de promotion de justice et de dignité humaine, reproche au texte de ne pas traiter ni des dispositions légales ni du mode et des conditions de retrait et d'accueil des petites bonnes retirées de ces lieux d'exploitation pour les remettre en état sur les plans physique et psychologique et les préparer à leur réinsertion et suivi familial, social et scolaire.
Pour le collectif associatif marocain, ce phénomène est du essentiellement à la pauvreté, l'analphabétisme et la précarité des infrastructures au niveau des zones rurales, estimant que ces mineures subissent une violence physique et économique surtout qu'elles sont pour la plupart mal payées.
Selon la même source, 93,5% de ces enfants en milieu rural sont employés dans les secteurs de l'agriculture et de la pêche, alors que 43,9% des enfants travaillant en milieu urbain sont employés dans les services et 36,4% dans l'industrie et l'artisanat.
Surexploités et mal payés, ces enfants représentent une main-d' oeuvre bon marché, qui reste à la merci totale de l'employeur. En cas d'accident, ce qui est très fréquent, les petits ouvriers se retrouvent à la rue sans aucune forme d'indemnisation.
En novembre 2012, l'ONG Human Rights Watch (HRW) avait exhorté les autorités marocaines à mettre fin à l'exploitation des enfants, majoritairement des filles, de moins de quinze ans, qui travaillent dur comme domestiques pendant 12 heures par jour, 7 jours par semaine, pour des sommes aussi minimes que 11 dollars par mois.
Dans ce document de 73 pages, l'ONG a relevé que certaines filles avaient affirmé que leurs employeurs les battaient et les insultaient fréquemment, les privaient d'éducation et leur refusaient parfois des repas suffisants.
"Des jeunes filles âgées de huit ans à peine endurent des sévices physiques et travaillent de longues heures pour un maigre salaire en tant comme travailleuses domestiques au Maroc", avait indiqué HRW dans un rapport rendu public à Rabat sous le titre « Une servitude solitaire: Le travail des enfants domestiques au Maroc».