Les 9893 conseillers municipaux issus de 360 communes du Cameroun élisent dimanche 70 sénateurs à raison de 7 par région, qui s'ajouteront aux 30 autres que le président Paul Biya nommera, conformément à la Loi fondamentale, pour consacrer l'entrée en vigueur de cette seconde chambre du Parlement prévue par la Constitution du 18 janvier 1996.
Les conseillers municipaux appartenant à 9 partis politiques, qui constituent le corps électoral de ces premières élections sénatoriales de l'histoire du Cameroun en attendant la mise en place des conseils régionaux, doivent choisir entre 20 listes des candidats présentés par quatre partis politiques en lice pour ce scrutin de liste.
Le Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) au pouvoir, vient en tête avec 8 listes, suivi du Social Democratic Front (SDF) avec 7 listes, de l'Union nationale pour la démocratie et le progrès (UNDP) qui présente 4 listes et de l'Union démocratique du Cameroun (UDC) avec une seule liste.
D'après les données fournies par Elections Cameroon (ELECAM) en charge de l'organisation des élections au Cameroun, huit partis politiques ont au total déposé 40 listes, dont 23 rejetées en raison de diverses violations de la loi électorale. Des rejets confirmés par la Cour suprême siégeant comme Conseil constitutionnel qui n'a réhabilité que deux listes du RDPC et une liste de l'UNDP.
Si la campagne s'est déroulée en heurts, en revanche elle a été marquée par la corruption à ciel ouvert des électeurs. Dans la région de l'Adamaoua par exemple, M. Nana, propriétaire de l'entreprise de distribution Soacam, un riche homme d'affaires, a offert 200 USD environ à chaque conseiller municipal du RDPC, disqualifié ici, qui ramènera le bulletin de vote du SDF, le principal adversaire du parti au pouvoir.
Sont aussi constatés des efforts pour s'attirer les faveurs des électeurs par des moyens matériels : « Vous, candidats du RDPC (..) allez dans les domiciles des conseillers, donnez-leur tout ce que vous avez pour qu'ils vous donnent en retour leurs voix », propos d'un chef traditionnel dans la région du nord, le lamido de Rey-Bouba, rapportés par le quotidien privé "Le Jour".
C'est que, pour les conseillers municipaux qui ne reçoivent pas de rémunération pour leurs fonctions, ces sénatoriales constituent une occasion en or pour poser des exigences susceptibles d'orienter leur choix.
De surcroit, la disqualification des listes du RDPC dans les régions de l'ouest et de l'Adamaoua a suscité le mécontentement des militants et ouvert la voie à toutes sortes de tractations de coulisses.
Le parti au pouvoir a ainsi pris l'opinion de court en invitant ses militants à voter pour le SDF à l'Ouest, qui à son tour a demandé à ses électeurs de voter pour le RDPC dans le Littoral.
Dans d'autres régions, le RDPC n'exclut pas des sanctions pour ses électeurs qui s'aviseront de violer les consignes du parti. « Aucun vote en faveur du SDF ne sera toléré », a menacé Jacques Fame Ndongo, président de la commission régionale de campagne du RDPC dans le Sud.
Même si le RDPC a d'ores et déjà perdu les 14 sénateurs des régions de l'Ouest et de l'Adamaoua en raison du rejet de ses listes dans ces circonscriptions électorales, le parti au pouvoir emporte les faveurs des pronostics. En effet, il compte l'écrasante majorité des 9893 électeurs.
Et avec cette victoire annoncée du parti au pouvoir aux sénatoriales, le Parlement aura une forte coloration RDPC, qui dispose déjà de 153 députés sur les 180 que compte l'Assemblée nationale du Cameroun.
Un peu plus de 3500 observateurs nationaux et internationaux, dont une dizaine de l'Union africaine (UA), ont été accrédités par le ministère de l'Administration territoriale et de la Décentralisation (Minatd), pour ce scrutin qui se déroule dans 182 bureaux de vote répartis dans 58 villes.