Dernière mise à jour à 15h04 le 28/06
La Commission Vérité et Réconciliation du Burundi est "dans un besoin immense" de moyens matériels et financiers, a déclaré jeudi à Bujumbura M. Pierre-Claver Ndayicariye, président de cette Commission nationale burundaise recommandée pour la toute première fois le 28 août 2000 à Arusha (nord de Tanzanie) par l'Accord d'Arusha pour la Paix et la Réconciliation au Burundi (AAPRB) au cours d'une médiation internationale pilotée par l'ancien président sud-africain, feu Nelson Mandela.
M. Ndayicariye, qui est également un ancien président de la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI) qui a organisé les élections générales multipartites burundaises de 2010 et de 2015, s'exprimait au cours d'un point de presse tenu à l'issue d'une présentation officielle du "plan d'actions stratégiques" de la CVR burundaise pour une période de quatre ans (2019-2022).
La rédaction de ce plan s'est appuyée sur les éléments contenus dans l'article 6 de la loi n°1/022 promulguée le 6 novembre 2018 par le chef d'Etat burundais Pierre Nkurunziza et portant modification de la loi n°1/18 du 15 mai 2014 portant création, mandat, composition, organisation et fonctionnement de la CVR.
Cet article assigne à la CVR burundaise notamment la réalisation de plusieurs missions dont celle d'enquêter et d'établir la vérité sur "les violations graves des droits de l'homme et du droit international humanitaire" commises au Burundi durant une période de 123 ans allant du 26 février 1885 au 4 décembre 2008, date de la fin de la belligérance armée.
De surcroît, cette CVR est chargée aussi de lister les personnes "disparues et assassinées", les personnes tant burundaises qu'étrangères qui se sont distinguées dans la protection des vies humaines pendant toutes les crises, les victimes qui ont accordé le pardon ainsi que les auteurs ayant bénéficié du pardon.
Cette loi promulguée en novembre 2018 par le président Nkurunziza, recommande à la CVR de contribuer, notamment par une recherche documentaire, en se servant, le cas échéant, des archives détenues par les anciennes puissances coloniales, à "la réécriture de l'histoire du Burundi pendant la période couverte par le mandat.
Cette loi assigne aussi à la CVR de mener des enquêtes visant à "déterminer le rôle du colonisateur" dans les violences cycliques qui ont endeuillé le Burundi.
Au total, les Burundais ont vécu 66 ans de régime colonial : d'abord allemand (20 ans, de 1896 à 1916), et ensuite belge (46 ans, de 1916 à 1962).
L'ultime but visé est, selon cette loi de la CVR burundaise, celui de permettre aux Burundais d'avoir "une vision des événements partagée et acceptée".
Dans sa présentation faite devant des invités de marque à la cérémonie ad hoc, M. Ndayicariye a révélé que le plan d'actions stratégiques de la CVR burundaise au cours de la période précitée (4 ans, du 1er janvier 2019 au 31 décembre 2022), "requiert au total" un financement de 21.000.000.000 francs burundais (21 milliards FBU), soit environ 11.488.467,767 dollars américains (1 USD = 1827,92 FBU).
Le document présenté aujourd'hui portant sur un financement prévisionnel de 21 milliards de francs burundais, est "un document de budget à minima", a-t-il souligné en précisant qu'il n'a pas intégré certains axes d'activités inscrites à l'agenda du plan d'actions stratégiques de la CVR 2019-2022.
En effet, a-t-il expliqué, la loi du 6 novembre 2018 régissant la CVR, stipule qu'à la fin du processus y relatif, il y aura érection des monuments au niveau national, au niveau provincial et au niveau communal.
"Ce volet ne figure pas dans ce plan d'actions stratégiques parce qu'on est au début du processus ; et ce seront des décisions qui seront prises par les pouvoirs publics au fur et à mesure que les Burundais vont avancer dans la recherche de la vérité sur les crises du passé", a-t-il ajouté.
M. Ndayicariye a signalé que le deuxième axe non intégré dans ce document portant plan d'actions stratégiques de la CVR 2019-2022, est constitué par "les frais occasionnés par les cérémonies d'enterrement en toute dignité" ; comme c'est le cas pour "les restes humains" qui sortiront des fosses communes.
Ce chantier est "énorme" et son exécution nécessitera la poursuite du dialogue avec les autorités politiques et budgétaires nationales, pour que "tous les moyens financiers nécessaires" à la réalisation des missions assignées à la CVR burundaise soient disponibles, a-t-il fait remarquer.
"Nous ne doutons pas que les autorités burundaises qui ont mis en place la CVR, vont continuer à appuyer la réalisation des missions assignées à cette dernière ; car ils savaient que ce chantier important politiquement et socialement, était également coûteux au niveau budgétaire", a-t-il rassuré.
Signalons que ce plan d'actions stratégiques de la CVR burundaise 2019-2022, souligne que l'histoire du Burundi postcolonial a été "jalonnée de crises cycliques ponctuées de bains de sang" notamment celles de 1965, 1969, 1972, 1988, 1991, ainsi que la plus longue d'entre elles étalée sur une période de 15 ans (21 octobre 1993-4 décembre 2008).