Dernière mise à jour à 16h26 le 16/08
La veille de la signature du mémorandum présidentiel du 14 août permettant au représentant américain du commerce de pouvoir lancer une enquête sur les « pratiques commerciales chinoises injustes », le conseiller à la sécurité nationale, HR McMaster, a déclaré que l'aide de la Chine était essentielle pour résoudre le problème nucléaire de la péninsule coréenne et que les Etats-Unis ne cherchaient pas un conflit commercial.
En refusant d'associer le commerce avec le programme nucléaire de la République populaire démocratique de Corée, McMaster a déclaré que le but final n'était pas de « punir », mais de « concurrencer efficacement », et « d'exiger des relations commerciales et économiques justes et réciproques non seulement avec la Chine mais avec tous les pays ».
Les remarques du principal conseiller en matière de sécurité des Etats-Unis semblent être en contradiction avec celle de son président. Donald Trump aurait en effet fait part d'une perte annuelle « de centaines de milliards de dollars » au niveau des relations commerciales avec la Chine, ajoutant « que sa position pourrait changer » si Beijing aidait Washington à contrer Pyongyang.
Il s'agit d'une bien triste tentative mais incontournable pour faire de la Chine le bouc émissaire concernant les tensions croissantes dans la péninsule coréenne. Et notamment le fait que le président Xi Jinping ait joint Trump samedi par téléphone, et a réitéré qu'il espérait que la péninsule soit dénucléarisée.
Peut-être le président américain utilise de tels stratagèmes pour détourner l'attention du public des dramatiques changements du personnel dans les échelons supérieurs de l'administration du pays, et des revers politiques dans des domaines aussi variés que les soins de santé et l'immigration.
Face aux questions de plus en plus nombreuses sur sa capacité à gouverner, Trump a accru les menaces contre Pyongyang en critiquant non seulement les progrès de ce dernier dans la miniaturisation des charges nucléaires, mais se plaignant également de « l'indifférence » de Beijing.
Ironiquement, le même jour de la signature du mémorandum permettant aux Etats-Unis d'appliquer une loi -rarement utilisée depuis les années 90- et qui pourrait conduire à des tarifs punitifs sur les importations chinoises ; le ministère chinois du Commerce a annoncé sa décision de mettre en place à partir du 15 août « une totale interdiction » sur l'importation de minerai de fer, de charbon et produits marins de la RPDC.
En 2016, la politique commerciale a constitué l'essentiel de la rhétorique de Donald Trump dans sa campagne présidentielle, en particulier avec un dénigrement systématique de la Chine. Il s'est abstenu de mettre la pression économique sur la Chine au cours des six premiers mois de son nouveau mandat, attendant probablement le bon moment. Mais les groupes d'intérêts, dont il a profité à l'occasion de son élection, semblent l'obliger à devoir respecter ses promesses de campagne.
L'éventuelle utilisation de l'article 301 de la loi américaine sur le commerce datant de 1974 marque une nouvelle tentative pour résoudre la question complexe de la sécurité régionale du problème exclusif de la Chine. Indiquant également que les USA attendaient plus du plan d'action de 100 jours établi lors de la réunion de Xi-Trump à Mar-a-Lago en Floride, ainsi que du dialogue économique sino-américain à Washington le mois dernier.
Il n'y a aucune raison pour que la Chine laisse de telles représailles tirer le meilleur parti du jugement, même si elle doit s'opposer aux mouvements protectionnistes de Washington, comme les 232 enquêtes sur les importations d'aluminium et d'acier, visant principalement les produits chinois. Beijing devrait exiger des éclaircissements auprès de l'administration Trump et rappeler le risque de toute action imprudente des Etats-Unis au nom de la défense des entreprises et des salariés américains.
Même si l'initiative du 14 août incite une enquête immédiate sur les pratiques de la Chine dans le secteur de la propriété intellectuelle, il est probable qu'il faudra plus d'un an pour compléter et achever l'ensemble des négociations avec Beijing. De plus, les résultats ne seront pas forcément contre la Chine.
Alors que la nation chinoise doit faire preuve de patience, elle devrait exiger des promesses convaincantes que l'administration Trump ne liera pas le commerce bilatéral avec le problème nucléaire de la RPDC.
(L'auteur de l'article, Yu Xiang est le directeur du département des études économiques américaines à l'Institut d'études américaines, et de l'Institut des relations internationales contemporaines de Chine. Il s'agit là d'un extrait de son entretien avec China Daily.)