Dernière mise à jour à 13h27 le 29/02
Il s'appelait Jean de Miribel, il était Professeur honoraire à l'Université des Etudes Internationales de Xi'an, et son cœur était partagé entre deux villes : l'une en France, Paris, et l'autre en Chine, Xi'an.
Son appartement de l'Université des études internationales de Xi'an, de moins de 60 mètres carrés, est très simple, rempli de livres sur les étagères, et à côté de la pendule sa photo, tout sourire. « De son vivant, les visiteurs à son domicile de Xi'an étaient nombreux et fréquents, beaucoup même en avaient la clé », dit Li Tao, un habitant de Xi'an qui fut son ami : « Et sa résidence de Paris était souvent le premier endroit où ses amis chinois venant en France arrivaient ».
Le 10 octobre 2015, Jean est mort à Xi'an, à l'âge de 96 ans. Conformément à ses souhaits, son corps a été remis à la Faculté de médecine de l'Université Jiaotong de Xi'an. A cette occasion, le vice-consul de l'ambassade de France a dit : « Jean de Miribel était un homme de foi, il était enraciné à Xi'an, il n'a seulement fait don de son corps, son esprit reste aussi en Chine ».
Récemment, l'Université des études internationales de Xi'an a érigé un monument de l'« amitié profonde » à la mémoire de Jean dans le District de Yanta, pour que les générations futures se souviennent de lui.
« Je suis fier d'être Chinois »
« Jean ». C'est ainsi que ses amis chinois, les enseignants et les élèves l'appelaient, de façon courte mais très respectueuse, une sorte de titre honorifique.
Né en 1919 à Paris, c'est en septembre 1976 qu'il avait choisi d'enseigner à l'Université des études internationales de Xi'an, et il avait fait de la Chine sa seconde patrie depuis près de 40 ans. « C'est la sagesse et la bonté incomparables du peuple chinois qui m'ont attiré », disait-il. Après son départ à la retraite, Jean a décidé de rester en Chine, et de poursuivre ses études de la culture chinoise à l'Université des études internationales de Xi'an. Il disait souvent : « Le peuple chinois aime la paix, il n'a jamais lancé de guerre d'agression, je suis fier, je suis fier d'être Chinois ! ».
Lors de sa deuxième année d'enseignement à l'Université des études internationales de Xi'an, il a demandé à ne plus recevoir de salaire, et il n'a plus perçu que les subventions que le gouvernement français lui envoyait.
Jean revenait en France une fois ou deux fois par an, et c'est lui qui apporta de France les premiers magnétophones et télévisions de l'école. Il achetait également souvent des livres et du matériel pour le département de langue française. « Alors qu'à cette époque on ne regardait que des opéras révolutionnaires, c'est lui qui nous a présenté des films à succès en version originale», se souvient Chen Youtai, l'ancien vice-président de l'Université des études internationales de Xi'an.
Jean était aussi très généreux avec ceux qui avaient besoin d'aide, tandis qu'il se montrait très « radin » envers lui-même. Comme le rappelle Lu Dong, professeur de langue chinoise, Jean mangeait souvent les restes d'un jour ou deux, et il s'habillait également de manière très simple. Son appartement était rempli d'objets artistiques et folkloriques chinois, c'était des cadeaux des étudiants et des amis, et pour lui ils étaient particulièrement précieux.
Jean avait aussi un nom chinois, Mi Ruizhe, mais il avait aussi donné son nom à une bourse d'études» destiné à aider les élèves habitant dans les zones montagneuses.
« J'ai découvert le talent extraordinaire des Chinois, c'est la grande chance de ma vie ».
Au domicile de Jean, le professeur Zhang, de l'Université de Jianghan, a dit, en classant ses livres « Parmi tous ces livres, certains ont été publiés par Jean lui-même en tant que professeur.
Ces ouvrages sont du matériel de recherche écrit par Jean sur la médecine chinoise ou la ville de Xi'an sous la Dynastie Han. Après son arrivée en Chine, il s'est intéressé à la médecine chinoise, puis il a écrit, avec les yeux d'un occidental, deux livres, un « Précis de chirurgie traditionnelle chinoise » et « La société chinoise ancienne et des maladies infectieuses ». Jean a également travaillé six ans pour terminer un autre ouvrage, la monographie « Les fonctionnaires locaux de la dynastie Ming et le système de service civil – Recherches sur le gouvernement de Xi'an et du Shaanxi ».
Il écrivit aussi un poème à la gloire du peuple chinois : « Tout au long de ces 30 années, j'ai découvert que le peuple chinois avait des talents extraordinaires, ce fut la grande chance de ma vie. Ils savent tout faire de leurs mains, ils ont des idées uniques, et leurs cœurs cachent des trésors… ».
Jean aida également un grand nombre d'étudiants chinois en France. Au fil des ans, il apporta son aide à plus de 40 enseignants et étudiants souhaitant aller étudier à l'étranger, et même soutenu financièrement nombre de médecins de Xi'an pour leur permettre d'aller en France enseigner ou travailler. De plus, il offrait gratuitement son appartement de Paris aux étudiants et enseignants vivent, mais il s'acharnait aussi à convaincre les responsables du secteur de la santé en France à accorder des bourses d'études aux médecins. Tout le monde l'appelait le « professeur étranger bienveillant ».
Pendant toutes les décennies qu'il passa en Chine, il invita de très nombreuses fois sa famille, ses amis et ses proches à venir visiter Xi'an, et organisa des conférences sur l'histoire et la culture chinoise. Et c'est ainsi que, en reconnaissance de ses contributions exceptionnelles aux échanges culturels sino-français que, le 5 mai 1994, l'ambassadeur de France François Plaisant vint à Xi'an, pour lui décerner, au nom du Président français, la Légion d'Honneur, dont il fit don à la collection permanente de l'Université des études internationales de Xi'an.
Par la suite, l'Université des études internationales de Xi'an décerna à Jean le titre de professeur honoraire. Et le 18 juin 1997, il obtint un permis de résidence permanente en Chine, devenant le premier expert étranger de la province du Shaanxi à obtenir le droit de séjourner de façon permanente en Chine. En 2014 enfin, ce fut le Bureau Central de la Civilisation qui lui octroya le titre honorifique de « Bon Chinois ».