Dernière mise à jour à 15h47 le 24/06
Deux anciens squelettes exhumés dans un cimetière de Londres pourraient être d'origine chinoise, renversant des hypothèses de longue date sur l'histoire de l'Empire romain et de la capitale britannique. À l'aide de techniques de pointe, une équipe d'archéologues et de scientifiques a examiné des échantillons d'émail dentaire provenant de plus de 20 ensembles de restes humains datés du 2e et du 4e siècles après J.-C. Le Dr Rebecca Redfern, conservateur du département d'ostéologie humaine au Musée de Londres, a révélé que deux des squelettes trouvés sur le site de Lant Street, à Southwark, avaient été identifiés comme pouvant être d'origine chinoise.
« C'est absolument phénoménal. C'est la première fois dans la Grande Bretagne romaine que nous avons identifié des personnes d'ascendance asiatique et seulement la 3e ou la 4e fois de l'empire dans son ensemble », a-t-elle déclaré à l'émission The World at One de BBC Radio 4. Cette découverte défie la domination de la vision traditionnelle selon laquelle la Grande Bretagne, et plus précisément le « Londinium » tel qu'il était alors connu, était une société relativement homogène. Elle suggère également que les empires romains et chinois ont pu avoir plus d'échanges que beaucoup d'historiens ne le pensaient jusqu'à aujourd'hui. D'une manière cruciale, cela soulève aussi la possibilité que du commerce ait eu lieu entre Rome et la Chine en dehors de la célèbre Route de la Soie.
Si des travaux archéologiques antérieurs ont montré la nature multiculturelle de la Londres de l'antiquité et son importance en tant que centre commercial majeur, ce n'est que la deuxième fois que les os d'un individu d'origine chinoise sont retrouvés sur un site romain, le premier étant la découverte d'un homme probablement asiatique à Vagnari, en Italie. Dans le Journal of Archaeological Science, le Dr Redfern a déclaré : « L'expansion de l'Empire romain dans la plus grande partie de l'Europe occidentale et de la Méditerranée a conduit à l'assimilation et au mouvement de nombreuses communautés ethniquement et géographiquement diverses. Sa puissance et ses richesses signifiaient qu'il avait également des liens commerciaux pour les matières premières et les produits, comme la soie dans toute l'Europe, l'Afrique et aussi à l'Est, y compris l'Inde et la Chine. Beaucoup de gens ont voyagé, souvent sur de vastes distances, pour le commerce ou en raison de leur profession, par exemple dans l'armée, ou leur statut social, par exemple s'ils étaient esclaves ».
Les archéologues et les historiens sont en revanche divisés quant à l'explication de la présence éventuelle d'individus d'origine chinoise en Grande-Bretagne romaine. Les résultats de l'étude soulèvent la possibilité que des commerçants chinois se soient installés dans la région et aient peut-être même mis en place leurs propres communautés commerciales. Cependant, dans son article du journal, le Dr Redfern a ajouté : « Il se pourrait fort bien aussi que ces individus soient eux-mêmes ou soient issus d'esclaves originaires d'Asie, puisqu'il y avait des liens de commerce d'esclaves entre l'Inde et la Chine, et l'Inde et Rome ».